La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/10/2014 | FRANCE | N°382375

France | France, Conseil d'État, 10ème ssjs, 06 octobre 2014, 382375


Vu la procédure suivante :

A l'appui de sa requête tendant à l'annulation pour excès de pouvoir du décret n° 2014-164 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département de la Haute-Saône, M. A...demande au Conseil d'Etat, par des mémoires enregistrés le 7 juillet 2014, de renvoyer au Conseil constitutionnel, en application de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, les questions de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article L. 191-1 du code électoral et

des articles L. 3113-1 et L. 3113-2 du code général des collectivit...

Vu la procédure suivante :

A l'appui de sa requête tendant à l'annulation pour excès de pouvoir du décret n° 2014-164 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département de la Haute-Saône, M. A...demande au Conseil d'Etat, par des mémoires enregistrés le 7 juillet 2014, de renvoyer au Conseil constitutionnel, en application de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, les questions de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article L. 191-1 du code électoral et des articles L. 3113-1 et L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la Constitution, notamment son article 61-1 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- le code électoral, notamment son article L. 191-1 ;

- le code général des collectivités territoriales, notamment ses articles L. 3113-1 et L. 3113-2 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Pâquita Morellet-Steiner, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Delphine Hedary, rapporteur public ;

1. Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ". Il résulte des dispositions de cet article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.

Sur l'article L. 191-1 du code électoral :

2. L'article L. 191-1 du code électoral, inséré dans ce code par l'article 4 de la loi du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral, prévoit la réduction de moitié du nombre des cantons dans lesquels seront élus les conseillers départementaux par rapport au nombre de cantons existant au 1er janvier 2013.

3. Le Conseil constitutionnel, dans les motifs et le dispositif de sa décision n° 2013-667 DC du 16 mai 2013, a déclaré conforme à la Constitution l'article 4 de la loi du 17 mai 2013. Depuis cette décision, il n'est intervenu aucun changement de circonstances de nature à justifier que la conformité à la Constitution de ces dispositions soit à nouveau examinée par le Conseil constitutionnel. Par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions de l'article L. 191-1 du code électoral portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution ne peut qu'être écarté, sans qu'il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée à leur encontre.

Sur l'article L. 3113-1 du code général des collectivités territoriales :

4. L'article L. 3113-1 du code général des collectivités territoriales détermine les règles selon lesquelles sont décidées les créations et suppressions d'arrondissements, les modifications des limites territoriales des arrondissements et les transferts des chefs-lieux d'arrondissement. Ces dispositions ne sont pas applicables à un litige portant sur la délimitation de cantons. Par suite, le moyen, soulevé à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir formé contre un décret portant délimitation de cantons, tiré de ce que les dispositions de l'article L. 3113-1 portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution ne peut qu'être écarté, sans qu'il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée à leur encontre.

Sur l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales :

5. Aux termes de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction résultant de la loi du 17 mai 2013, applicable à la date du décret attaqué : " I.- Les modifications des limites territoriales des cantons, les créations et suppressions de cantons et le transfert du siège de leur chef-lieu sont décidés par décret en Conseil d'Etat après consultation du conseil général qui se prononce dans un délai de six semaines à compter de sa saisine. A l'expiration de ce délai, son avis est réputé rendu. / II. - La qualité de chef-lieu de canton est maintenue aux communes qui la perdent dans le cadre d'une modification des limites territoriales des cantons, prévue au I, jusqu'au prochain renouvellement général des conseils généraux. / III. La modification des limites territoriales des cantons effectuée en application du I est conforme aux règles suivantes : / a) Le territoire de chaque canton est défini sur des bases essentiellement démographiques ; / b) Le territoire de chaque canton est continu ; / c) Est entièrement comprise dans le même canton toute commune de moins de 3 500 habitants. / IV. Il n'est apporté aux règles énoncées au III que des exceptions de portée limitée, spécialement justifiées, au cas par cas, par des considérations géographiques ou par d'autres impératifs d'intérêt général ".

6. Ces dispositions sont issues de l'article 46 de la loi du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral, lequel a numéroté et complété le paragraphe regroupant les dispositions qui figurent désormais au I de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, a modifié les dispositions du II de cet article et y a ajouté les dispositions des III et IV.

7. Le Conseil constitutionnel, dans les motifs et le dispositif de sa décision du 16 mai 2013 précédemment citée, a déclaré conformes à la Constitution les dispositions promulguées de l'article 46 de la loi du 17 mai 2013. Depuis cette décision, il n'est intervenu aucun changement de circonstances de nature à justifier que la conformité de ces dispositions à la Constitution soit à nouveau examinée par le Conseil constitutionnel. Par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions des II, III et IV de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution ne peut qu'être écarté, sans qu'il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée à leur encontre.

8. En outre, et en tout état de cause, s'agissant des dispositions du I de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, il résulte des termes mêmes de la Constitution, notamment de ses articles 37, 38, 39 et 61-1 tels qu'interprétés par le Conseil constitutionnel, que le Conseil d'Etat est simultanément chargé par la Constitution de l'exercice de fonctions administratives et placé au sommet de l'un des deux ordres de juridiction qu'elle reconnaît. Ces dispositions n'ont ni pour objet, ni pour effet de porter les avis rendus par les formations administratives du Conseil d'Etat à la connaissance de ses membres siégeant au contentieux. Au demeurant, les membres du Conseil d'Etat qui ont participé à un avis rendu sur un projet d'acte soumis par le Gouvernement ne participent pas au jugement des recours mettant en cause ce même acte. Enfin, il appartient au surplus à toute partie qui s'y croit fondée de faire verser au dossier les pièces permettant de s'assurer de la régularité des consultations des formations administratives du Conseil d'Etat. Il s'ensuit que la question de constitutionnalité invoquée à l'encontre du I de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, qui n'est pas nouvelle, ne présente, en tout état de cause, pas un caractère sérieux. Par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions de ce I portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution ne peut qu'être écarté, sans qu'il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée à leur encontre.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel les questions prioritaires de constitutionnalité soulevées par M.A....

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B...A....

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel, au Premier ministre et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 10ème ssjs
Numéro d'arrêt : 382375
Date de la décision : 06/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 06 oct. 2014, n° 382375
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Pâquita Morellet-Steiner
Rapporteur public ?: Mme Delphine Hedary

Origine de la décision
Date de l'import : 17/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:382375.20141006
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award