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26/11/2014 | FRANCE | N°376617

France | France, Conseil d'État, 5ème sous-section jugeant seule, 26 novembre 2014, 376617


Vu 1°, sous le n°376617, la requête, enregistrée le 24 mars 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune de Morgemoulin (55400), représentée par son maire ; la commune de Morgemoulin demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-166 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département de la Meuse ;

Vu 2°, sous le n° 376804, la requête, enregistrée le 28 mars 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune de Lissey (55150), représentée par son maire

; la commune de Lissey demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de po...

Vu 1°, sous le n°376617, la requête, enregistrée le 24 mars 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune de Morgemoulin (55400), représentée par son maire ; la commune de Morgemoulin demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-166 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département de la Meuse ;

Vu 2°, sous le n° 376804, la requête, enregistrée le 28 mars 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune de Lissey (55150), représentée par son maire ; la commune de Lissey demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-166 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département de la Meuse ;

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Vu 3°, sous le n° 376981, la requête, enregistrée le 1er avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune de Robert-Espagne (55000), représentée par son maire ; la commune de Robert-Espagne demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-166 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département de la Meuse ;

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Vu 4°, sous le n° 377054, la requête, enregistrée le 3 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune de Nubécourt (55250), représentée par son maire ; la commune de Nubécourt demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-166 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département de la Meuse ;

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Vu 5°, sous le n° 377202, la requête, enregistrée le 7 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune de Waly (55250), représentée par son maire ; la commune de Waly demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-166 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département de la Meuse ;

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Vu 6°, sous le n° 377280, la requête enregistrée le 9 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune de Vaubecourt (55250), représentée par son maire ; la commune de Vaubecourt demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-166 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département de la Meuse ;

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Vu 7°, sous le n° 377630 la requête enregistrée le 14 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune de Nançois-sur-Ornain (55500), représentée par son maire ; la commune demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-166 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département de la Meuse ;

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Vu 8°, sous le n°377631 la requête enregistrée le 14 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune de Consenvoye (55110), représentée par son maire ; la commune de Consenvoye demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-166 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département de la Meuse ;

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Vu 9°, sous le n°377632 la requête, enregistrée le 14 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune de Pagny-sur-Meuse (55190), représentée par son maire ; la commune de Pagny-sur-Meuse demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-166 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département de la Meuse ;

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Vu 10°, sous le n°378607, la requête, enregistrée le 18 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune de Lanhères (55400), représentée par son maire ; la commune de Lanhères demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-166 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département de la Meuse ;

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Vu 11°, sous le n°378608, la requête, enregistrée le 18 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune de Burey-la-Côte (55140), représentée par son maire ; la commune de Burey-la-Côte demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-166 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département de la Meuse ;

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Vu 12°, sous le n° 378610, la requête, enregistrée le 18 avril 2014, présentée par la commune de Belrain (55260), représentée par son maire ; la commune de Belrain demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-166 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département de la Meuse ;

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Vu 13°, sous le n°378611, la requête, enregistrée le 18 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune de Seuil d'Argonne (55250), représentée par son maire ; la commune de Seuil d'Argonne demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-166 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département de la Meuse ;

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Vu 14°, sous le n°378679, la requête, enregistrée le 18 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune de Bannoncourt (55300), représentée par son maire ; la commune de Bannoncourt demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-166 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département de la Meuse ;

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Vu 15°, sous le n°378680, la requête, enregistrée le 18 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune de Raival (55260), représentée par son maire ; la commune de Raival demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-166 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département de la Meuse ;

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Vu 16°, sous le n°378681, la requête, enregistrée le 18 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. B...A..., demeurant à... ; M. A...demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-166 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département de la Meuse ;

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Vu 17°, sous le n°379522, la requête, enregistrée le 23 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune de Gondrecourt-le-Château (55130), représentée par son maire ; la commune de Gondrecourt-le-Château demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-166 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département de la Meuse ;

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Vu 18°, sous le n°379606, la requête, enregistrée le 2 mai 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune de Pretz-en-Argonne (55250), représentée par son maire ; la commune de Pretz-en-Argonne demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-166 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département de la Meuse ;

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Vu 19°, sous le n°379756, la requête, enregistrée le 23 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la commune de Vaudoncourt (55230), représentée par son maire ; la commune de Vaudoncourt demande au Conseil d'Etat d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-166 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département de la Meuse ;

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Vu 20°, sous le n°380613, la requête, enregistrée le 23 mai 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le département de la Meuse représenté par le président du conseil général ; le département de la Meuse demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler, pour excès de pouvoir, le décret n° 2014-166 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département de la Meuse ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du ministre de l'intérieur du 25 mars 2014 rejetant son recours gracieux contre ce décret ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la Constitution ;

Vu le code électoral ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de l'organisation judiciaire ;

Vu la loi n° 90-1103 du 11 décembre 1990 ;

Vu le décret n° 2012-1479 du 27 décembre 2012 ;

Vu le décret n° 2013-938 du 18 octobre 2013, modifié par le décret n° 2014-112 du 6 février 2014 ;

Vu le décret n° 2013-1289 du 27 décembre 2013 ;

Vu le code de justice administrative, notamment son article R. 611-8 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Charles Touboul, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public ;

1. Considérant que les requêtes visées ci-dessus sont dirigées contre le même décret ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 191-1 du code électoral, dans sa rédaction applicable à la date du décret attaqué : " Le nombre de cantons dans lesquels sont élus les conseillers départementaux est égal, pour chaque département, à la moitié du nombre de cantons existant au 1er janvier 2013, arrondi à l'unité impaire supérieure si ce nombre n'est pas entier impair. / Le nombre de cantons dans chaque département comptant plus de 500 000 habitants ne peut être inférieur à dix-sept. Il ne peut être inférieur à treize dans chaque département comptant entre 150 000 et 500 000 habitants " ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable à la date du décret attaqué : " I. - Les modifications des limites territoriales des cantons, les créations et suppressions de cantons et le transfert du siège de leur chef-lieu sont décidés par décret en Conseil d'Etat après consultation du conseil départemental qui se prononce dans un délai de six semaines à compter de sa saisine. A l'expiration de ce délai, son avis est réputé rendu. / II. - La qualité de chef-lieu de canton est maintenue aux communes qui la perdent dans le cadre d'une modification des limites territoriales des cantons, prévue au I, jusqu'au prochain renouvellement général des conseils départementaux. / III. - La modification des limites territoriales des cantons effectuée en application du I est conforme aux règles suivantes : / a) Le territoire de chaque canton est défini sur des bases essentiellement démographiques ; / b) Le territoire de chaque canton est continu ; / c) Est entièrement comprise dans le même canton toute commune de moins de 3 500 habitants ; / IV. - Il n'est apporté aux règles énoncées au III que des exceptions de portée limitée, spécialement justifiées, au cas par cas, par des considérations géographiques ou par d'autres impératifs d'intérêt général " ;

4. Considérant que le décret attaqué a, en application de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, procédé à une nouvelle délimitation des cantons du département de la Meuse, compte tenu de l'exigence de réduction du nombre des cantons de ce département de 31 à 17 résultant de l'article L. 191-1 du code électoral ;

Sur la légalité externe :

5. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des termes mêmes des dispositions législatives mentionnées ci-dessus qu'il appartenait au Premier ministre de procéder, par décret en Conseil d'Etat, à une nouvelle délimitation territoriale de l'ensemble des cantons ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le Premier ministre était incompétent pour procéder à une telle délimitation ne peut qu'être écarté ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 22 de la Constitution : " Les actes du Premier ministre sont contresignés, le cas échéant, par les ministres chargés de leur exécution " ; que les ministres chargés de l'exécution sont ceux qui ont compétence pour signer ou contresigner les mesures réglementaires ou individuelles que comporte nécessairement l'exécution des actes en cause ; qu'aucune disposition du décret attaqué, qui se borne à procéder à la délimitation des cantons du département de la Meuse, qui sont des circonscriptions électorales, n'appelle de mesure d'exécution que le garde des sceaux, ministre de la justice, serait compétent pour signer ou contresigner ; que le décret attaqué n'a eu notamment ni pour objet ni pour effet de modifier les ressorts des juridictions de l'ordre judiciaire fixés conformément au tableau IV annexé à l'article D. 211-1 du code de l'organisation judiciaire en fonction des cantons tels qu'ils étaient définis à la date d'entrée en vigueur des décrets ayant institué puis modifié ce tableau ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'absence de contreseing de ce ministre ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant, en troisième lieu, que les dispositions de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales se bornent à prévoir la consultation du conseil général du département concerné à l'occasion de l'opération de création et de suppression de cantons ; qu'aucune autre disposition législative ou réglementaire non plus qu'aucun principe n'imposent que la modification de la délimitation des cantons fasse l'objet soit d'une consultation des communes, des établissements publics de coopération intercommunale ou des populations ou élus locaux concernés, soit d'autres formes de consultations ou concertations ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le conseil général a été saisi d'un projet accompagné d'un exposé des motifs décrivant, avec une précision suffisante, la méthode retenue pour procéder à la nouvelle délimitation ; que ces éléments ont mis le conseil général à même d'exprimer un avis sur les questions soulevées par le projet, et notamment sur les modalités de mise en oeuvre de la nouvelle délimitation des cantons prévue par le législateur, de formuler des observations et de faire des propositions d'amendements aptes à répondre à ses préoccupations ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la consultation du conseil général aurait été sur ce point entachée d'irrégularité doit être écarté ;

9. Considérant, enfin, que l'instance dont une disposition législative ou réglementaire prévoit la consultation avant l'intervention d'une décision doit être mise à même d'exprimer son avis sur l'ensemble des questions soulevées par cette décision ; que, si la délimitation territoriale des cantons du département de la Meuse figurant dans le décret attaqué n'est pas en tous points identique à celle qui était prévue dans le projet soumis pour avis au conseil général, il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que cette instance a été saisie de l'ensemble des questions soulevées par le projet, qui tendait à définir une nouvelle délimitation de l'ensemble des cantons du département ; que les requérants ne sont ainsi pas fondés à soutenir que le conseil général aurait dû être consulté une nouvelle fois, compte tenu des modifications apportées au projet après sa consultation initiale ; que le moyen tiré de ce que le décret publié n'est pas intégralement conforme au texte soumis pour avis au conseil général ne peut, par suite, qu'être écarté ;

Sur la légalité interne :

En ce qui concerne les données démographiques :

10. Considérant qu'aux termes de l'article 71 du décret du 18 octobre 2013, dans sa rédaction issue de l'article 8 du décret du 6 février 2014 : " (...) Pour la première délimitation générale des cantons opérée en application de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction résultant de l'article 46 de la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, (...), le chiffre de la population municipale auquel il convient de se référer est celui authentifié par le décret n° 2012-1479 du 27 décembre 2012 authentifiant les chiffres des populations (...) " ; que c'est conformément à ces dispositions que le décret attaqué a procédé à la délimitation des cantons du département de la Meuse sur la base des données mentionnée dans le décret du 27 décembre 2012 authentifiant les chiffres des populations de départements de la métropole, des départements et collectivités d'outre-mer de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de la Réunion, de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon ; que le département de la Meuse soutient, par la voie de l'exception, que l'article 8 du décret du 6 février 2014 portant différentes mesures d'ordre électoral est illégal ; que, toutefois, en premier lieu, la circonstance que le décret n'est pas revêtu du contreseing des ministres chargés de l'économie, des finances et de l'outre-mer ne l'entache pas d'irrégularité dès lors qu'il n'appelle toutefois aucune mesure d'exécution que ces ministres seraient compétents pour signer ou contresigner ; qu'en deuxième lieu, la délimitation des nouveaux cantons devait, conformément aux dispositions de l'article 7 de la loi du 11 décembre 1990, être effectuée au plus tard un an avant le prochain renouvellement général des conseils généraux ; que, dans les circonstances de l'espèce, eu égard, d'une part, aux délais inhérents à l'élaboration de l'ensemble des projets de décrets de délimitation des cantons, à la consultation des conseils généraux et à la saisine pour avis du Conseil d'Etat, d'autre part, à la circonstance que la ventilation à l'échelon infra-communal des chiffres de population applicables à compter du 1er janvier 2014, nécessaire à la délimitation de certains cantons, n'était pas disponible à la date à laquelle devait être entreprise la délimitation des nouveaux cantons, le décret du 6 février 2014 a pu légalement prévoir que le chiffre de la population communale auquel il convenait de se référer était le chiffre authentifié par le décret du 27 décembre 2012 et non celui figurant au décret du 27 décembre 2013 authentifiant les chiffres de population auxquels il convient de se référer pour l'application des lois et règlements à compter du 1er janvier 2014 ; qu'en dernier lieu, s'il est également soutenu que les dispositions de l'article 8 du décret du 6 février 2014 seraient sans rapport avec les autres dispositions de ce décret, une telle circonstance n'est pas de nature à les entacher d'illégalité ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de ce que les données démographiques retenues pour la nouvelle délimitation des cantons du département de la Meuse ne correspondaient pas à la situation la plus récente ou seraient erronées ne peuvent qu'être écartés ;

En ce qui concerne la délimitation des cantons :

12. Considérant qu'il résulte des dispositions des III et IV de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, citées au point 3, que le territoire de chaque canton doit être établi sur des bases essentiellement démographiques, qu'il doit être continu et que toute commune de moins de 3 500 habitants doit être entièrement comprise dans un même canton, des exceptions de portée limitée et spécialement justifiées au cas par cas pouvant toutefois être apportées à ces règles ;

13. Considérant, en premier lieu, qu'ainsi qu'il a été dit au point 2 la réduction du nombre des cantons résulte non du décret attaqué mais des dispositions de l'article L.191-1 du code électoral ; que, par suite, les moyens tirés de ce que le décret litigieux procéderait arbitrairement à une réduction du nombre des cantons, à une augmentation de leur taille et du nombre de communes qu'ils regroupent, qu'il aurait pour effet d'augmenter le nombre d'élus ou qu'il rendrait la tâche de ceux-ci plus difficile en empêchant une " gestion de proximité " sont inopérants ;

14. Considérant, en deuxième lieu, que ni les dispositions de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, ni aucun autre texte non plus qu'aucun principe n'imposent au Premier ministre de prévoir que les limites des cantons, qui sont des circonscriptions électorales, coïncident avec les limites des établissements publics de coopération intercommunale, notamment de ceux à fiscalité propre, existants ou en projet en vertu du schéma départemental de coopération intercommunale ou qu'elles coïncident avec les limites des " bassins de vie " définis par l'Institut national de la statistique et des études économiques ; qu'aucune disposition législative en vigueur à la date du décret attaqué n'imposait de prendre en considération les limites des arrondissements, subdivisions administratives de l'Etat, aux fins de délimiter les nouveaux cantons ; qu'aucun texte ni aucun principe ne faisait obligation au Premier ministre de retenir comme critère de délimitation des nouveaux cantons les limites des anciens cantons ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la délimitation de plusieurs cantons du département ne respecterait pas les limites de ces subdivisions administratives ne peut qu'être écarté ;

15. Considérant, en troisième lieu, que dès lors que la délimitation a été conduite dans le respect des principes édictés par le législateur à l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, les moyens tirés de ce que les zones rurales seraient, du fait de la mise en oeuvre de ces règles, moins bien représentées que les zones urbaines en raison de leur faible densité ou que le caractère rural de certains territoires aurait été méconnu, sont inopérants ; que, pour le même motif, ne peuvent être utilement soulevés les moyens tirés de ce que la délimitation des cantons ne tiendrait pas suffisamment compte de l'histoire, de la géographie et de l'identité des territoires concernés, notamment du point de vue culturel ; qu'il en est de même des moyens tirés de ce que cette délimitation ferait abstraction des " réalités du terrain " ou des " attractivités territoriales ", ne tiendrait pas compte des habitudes de vie, des affinités des habitants ou des bassins d'emploi ou de ce que certains cantons ne disposeraient d'aucun pôle d'activité sur leur territoire ; que, de même, ne peuvent être utilement soulevés les moyens tirés de ce que la délimitation serait arbitraire, méconnaîtrait l'intérêt général ou porterait atteinte tant à l'organisation qu'au fonctionnement des pouvoirs publics et des services publics, notamment d'enseignement, ou aux projets ou initiatives locales ; que ne peuvent pas davantage être utilement soulevés les moyens tirés de ce que les communes appartenant à un même canton seraient trop éloignées les unes des autres, ou que les liaisons assurées à l'intérieur de certains cantons par les transports publics seraient insuffisantes ;

16. Considérant, enfin, que les requérants contestent les choix opérés par le décret attaqué conduisant au rattachement des communes de Morgemoulin, Lissey, Robert-Espagne, Nubécourt, Waly, Vaubecourt, Nançois-sur-Ornain, Consenvoye, Pagny-sur-Meuse, Lanhères, Rouvres-en-Woëvre, Burey-la-Côte, Belrain, Seuil d'Argonne, Bannoncourt, Raival, Velaines, Tronville-en-Barrois, Pretz-en-Argonne, Spincourt et Foameix-Ornel ainsi qu'au rattachement des communes formant la communauté d'agglomération de Meuse-Grand-Sud et les communautés de communes de Triaucourt-Vaubecourt, d'Etain, du Sammiellois et du Pays de Spincourt à l'un des dix-sept cantons du département de la Meuse plutôt qu'à un autre alors qu'un rattachement différent leur aurait semblé préférable ; que sont également contestés les choix ayant conduit à la délimitation des nouveaux cantons d'Ancerville, de Bar-le-Duc 1, de Bar-le-Duc 2, de Belleville-sur-Meuse, de Bouligny, de Clermont-en-Argonne, de Commercy, de Dieue-sur-Meuse, d'Etain, de Ligny-en-Barrois, de Montmédy, de Revigny-sur-Ornain, de Saint-Mihiel, de Stenay, de Vaucouleurs, de Verdun-1 et de Verdun-2 ; que, toutefois et dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que ces rattachements respectent les critères définis par les dispositions de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, les requérants n'apportent pas au soutien d'un tel moyen les éléments permettant d'établir que les choix auxquels il a ainsi été procédé reposeraient sur une erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne la détermination des chefs-lieux de cantons et des bureaux centralisateurs ainsi que la dénomination des cantons :

17. Considérant, en premier lieu, que le paragraphe II de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales a maintenu jusqu'au prochain renouvellement général des conseils départementaux les chefs-lieux de canton existants ; que le décret attaqué s'est borné, en application du décret du 18 octobre 2013 portant application de la loi du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires et modifiant le calendrier électoral, à désigner pour chaque nouveau canton un bureau centralisateur des résultats électoraux, notion qui est distincte de celle de chef-lieu de canton ; que le décret attaqué n'a dès lors, par lui-même, ni pour objet ni pour effet de faire perdre cette qualité aux actuels chefs-lieux de cantons ; que, par suite, les moyens tirés des conséquences de la perte de cette qualité pour les communes chefs-lieux de canton qui n'ont pas été désignées comme bureaux centralisateurs ne peuvent qu'être écartés ;

18. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la désignation des communes de Bouligny, de Dieue-sur-Meuse, de Montmédy et de Vaucouleurs, respectivement comme bureaux centralisateurs des cantons n° 5, n° 8, n° 11 et n° 15 serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

19. Considérant, enfin, que si est également critiqué le choix de dénommer " Vaucouleurs " le canton n° 15, la dénomination des cantons retenue par le décret attaqué ne peut être utilement contestée ;

En ce qui concerne le détournement de pouvoir :

20. Considérant que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

21. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non recevoir opposées par le ministre de l'intérieur, que les requêtes mentionnées ci-dessus doivent être rejetées ;

D E C I D E :

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Article 1er : Les requêtes de la commune de Morgemoulin et autres sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la commune de Morgemoulin, à la commune de Lissey, à la commune de Robert-Espagne, à la commune de Nubécourt, à la commune de Waly, à la commune de Vaubecourt, à la commune de Nançois-sur-Ornain, à la commune de Consenvoye, à la commune de Pagny-sur-Meuse, à la commune de Lanhères, à la commune de Burey-la-Côte, à la commune de Belrain, à la commune de Seuil d'Argonne, à la commune de Bannoncourt, à la commune de Raival, à M. B...A..., à la commune de Gondrecourt-le-Château, à la commune de Pretz-en-Argonne, à la commune de Vaudoncourt, au département de la Meuse et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée, pour information, au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 5ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 376617
Date de la décision : 26/11/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 26 nov. 2014, n° 376617
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Charles Touboul
Rapporteur public ?: M. Nicolas Polge

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:376617.20141126
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