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17/12/2014 | FRANCE | N°382544

France | France, Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 17 décembre 2014, 382544


Vu la requête, enregistrée le 10 juillet 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme A...B..., demeurant ... ; Mme B...demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2014-171 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département du Val-de-Marne ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code électoral ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance pu

blique :

- le rapport de Mme Florence Chaltiel-Terral, maître des requêtes en service extraordinaire,...

Vu la requête, enregistrée le 10 juillet 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme A...B..., demeurant ... ; Mme B...demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2014-171 du 17 février 2014 portant délimitation des cantons dans le département du Val-de-Marne ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code électoral ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Florence Chaltiel-Terral, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Aurélie Bretonneau, rapporteur public ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 191-1 du code électoral, résultant de la loi du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires et modifiant le calendrier électoral : " Le nombre de cantons dans lesquels seront élus les conseillers départementaux est égal, pour chaque département, à la moitié du nombre de cantons existant au 1er janvier 2013, arrondi à l'unité impaire supérieure si ce nombre n'est pas entier impair. / Le nombre de cantons dans chaque département comptant plus de 500 000 habitants ne peut être inférieur à dix-sept. Il ne peut être inférieur à treize dans chaque département comptant entre 150 000 et 500 000 habitants " ; qu'aux termes de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction issue de la même loi, applicable à la date du décret attaqué : " I. - Les modifications des limites territoriales des cantons, les créations et suppressions de cantons et le transfert du siège de leur chef lieu sont décidés par décret en Conseil d'Etat après consultation du conseil général qui se prononce dans un délai de six semaines à compter de sa saisine. A l'expiration de ce délai, son avis est réputé rendu. (...) III. - La modification des limites territoriales des cantons effectuée en application du I est conforme aux règles suivantes : / a) Le territoire de chaque canton est défini sur des bases essentiellement démographiques ; / b) Le territoire de chaque canton est continu ; / c) Est entièrement comprise dans le même canton toute commune de moins de 3 500 habitants ; / IV. - Il n'est apporté aux règles énoncées au III que des exceptions de portée limitée, spécialement justifiées, au cas par cas, par des considérations géographiques (...) ou par d'autres impératifs d'intérêt général. " ;

2. Considérant que le décret attaqué a, sur le fondement de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, procédé à une nouvelle délimitation des cantons du département du Val-de-Marne, compte tenu de l'exigence de réduction du nombre des cantons de ce département de quarante-neuf à vingt-cinq résultant de l'application de l'article L. 191-1 du code électoral ;

3. Considérant que les dispositions de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales prévoient la consultation du conseil général du département concerné à l'occasion de l'opération de création et de suppression de cantons ; que l'article L. 3121-19 de ce code dispose que : " Douze jours au moins avant la réunion du conseil général, le président adresse aux conseillers généraux un rapport, sous quelque forme que ce soit, sur chacune des affaires qui doivent leur être soumises (...) " ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'en application de ces dispositions, le président du conseil général du Val-de-Marne a adressé aux conseillers généraux, le 8 janvier 2013, en vue de la réunion du conseil général prévue le 20 janvier 2013, le projet de décret délimitant les nouveaux cantons du département, accompagné de l'exposé des motifs ainsi que de plusieurs annexes, comportant des cartes et des tableaux ; que, contrairement à ce que soutient la requérante, la seule circonstance qu'un document rectifié ait été transmis aux conseillers généraux le 15 janvier 2013, à la suite d'une erreur matérielle sur le canton de Vincennes, ne démontre pas que l'information donnée ait été insuffisante, que l'organisme dont une disposition législative ou réglementaire prévoit la consultation avant l'intervention d'une décision doit être mis à même d'exprimer son avis sur l'ensemble des questions soulevées par cette décision ; que la procédure de consultation a ainsi, répondu aux exigences fixées par l'article L. 3121-19 du code général des collectivités territoriales ; qu'en outre, la requête ne peut, à cet égard et en tout état de cause, utilement se prévaloir des termes de la circulaire du ministre de l'intérieur du 12 avril 2013 relative à la méthodologie du redécoupage cantonal en vue de la mise en oeuvre du scrutin binominal majoritaire aux élections départementales, laquelle est dépourvue de caractère réglementaire ;

4. Considérant que si les limites territoriales du canton de Nogent-sur-Marne, telles qu'elles résultent du décret attaqué, ne sont pas identiques en tous points à celles prévues dans le projet soumis pour consultation au conseil général, il ne saurait sérieusement être soutenu que l'assemblée départementale n'a pas été saisie de l'ensemble des questions posées par le projet dès lors que celui-ci tendait au redécoupage de tous les cantons du département ; que la requérante n'est ainsi pas fondée à soutenir que le conseil général aurait dû être consulté une nouvelle fois compte tenu des modifications apportées au projet après la consultation ;

5. Considérant que, comme en l'espèce, lorsqu'un décret doit être pris en Conseil d'Etat, le texte retenu par le Gouvernement ne peut être différent à la fois du projet qu'il avait soumis au Conseil d'Etat et du texte adopté par ce dernier ; que le respect de cette exigence doit être apprécié par ensemble de dispositions ayant un rapport entre elles ;

6. Considérant que la requérante soutient que la procédure d'adoption du décret attaqué serait viciée dès lors que le texte du décret serait différent tant de celui du projet soumis au Conseil d'Etat que du texte adopté par lui ; qu'il ressort toutefois de l'examen des pièces versées au dossier par le ministre de l'intérieur que le texte publié ne contient pas de disposition qui différerait du texte adopté par la section de l'intérieur, lors de la séance du 28 janvier 2014, qu'il en va notamment ainsi des dispositions de l'article 15 du décret attaqué, relatives au canton de Nogent-sur-Marne ; que, par suite, Mme B...n'est pas fondée à soutenir que les règles qui gouvernent l'examen par le Conseil d'Etat des projets de décret auraient été méconnues ;

7. Considérant qu'il résulte des dispositions des III et IV de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales citées au point 1 que le territoire de chaque canton doit être établi sur des bases essentiellement démographiques, qu'il doit être continu et que toute commune de moins de 3 500 habitants doit être entièrement comprise dans un même canton, des exceptions de portée limitée et spécialement justifiées au cas par cas pouvant toutefois être apportées à ces règles ; que le décret attaqué procède à la délimitation des 25 nouveaux cantons du département du Val de-Marne en se fondant sur une population moyenne et en rapprochant la population de chaque canton de cette moyenne ; que la circonstance que la nouvelle délimitation accroitrait les écarts entre certains des nouveaux cantons par rapport à ceux auxquels ils auraient pu succéder, est sans incidence sur la légalité du décret litigieux ; que de même, si la requérante soutient que les écarts de population entre les cantons les plus peuplés et les moins peuplés entraineraient un accroissement des écarts de représentativité, elle n'apporte au soutien de cette allégation aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

8. Considérant que la requérante critique certain des choix effectués par le décret attaqué, en particulier en ce qui concerne le rattachement d'une part, selon elle, insuffisant de la commune de Vincennes au canton de Fontenay-sous-Bois, ainsi que le rattachement d'une partie de la commune de Villeneuve-Saint-Georges au canton de Choisy-le-Roi alors que le canton de Villeneuve-Saint-Georges inclut les communes de Limeil-Brévannes et Valenton et une partie seulement de la commune de Villeneuve-Saint-Georges, et fait valoir que d'autres rattachements auraient été préférables ; que de même, elle soutient que des considérations arbitraires auraient porté atteinte à l'intégrité territoriale de certaines communes ; qu'il ne ressort toutefois pas des éléments versés au dossier que les choix auxquels il a été procédé, qui respectent les critères définis par l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, reposeraient sur des considérations arbitraires et que le décret serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; que, de même, s'agissant du rattachement de la commune de Villecresnes au canton du Plateau Briard, dont résulterait une superficie anormalement étendue du canton, il ressort des pièces du dossier que la délimitation de ce canton ainsi créé par le décret attaqué ne méconnaît pas le principe de continuité du territoire de l'article L. 3113-2 du code général de collectivités territoriales ;

9. Considérant que ni les dispositions de l'article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, ni aucun autre texte non plus qu'aucun principe n'imposent au Premier ministre de prendre comme critères de délimitation de ces circonscriptions électorales les ressorts des bureaux de vote actuels ;

10. Considérant que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'enjoindre au gouvernement la production au dossier d'éléments complémentaires, que Mme B... n'est pas fondée à demander l'annulation du décret attaqué ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête Mme B...est rejeté.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme A...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 4ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 382544
Date de la décision : 17/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 17 déc. 2014, n° 382544
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Florence Chaltiel-Terral
Rapporteur public ?: Mme Aurélie Bretonneau

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:382544.20141217
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