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17/04/2015 | FRANCE | N°385222

France | France, Conseil d'État, 4ème ssjs, 17 avril 2015, 385222


Vu la procédure suivante :

Par un déféré du 28 mars 2014, le préfet de la Haute-Savoie a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'élection de M. B...A...en qualité de conseiller municipal à l'issue des opérations électorales qui se sont déroulées le 23 mars 2014 en vue de la désignation des conseillers municipaux de la commune d'Annecy-le-Vieux.

Par un jugement n° 1401752 du 18 septembre 2014, le tribunal administratif de Grenoble, faisant droit à ce déféré, a annulé l'élection de M. A...en qualité de conseiller municipal de la commune d'An

necy-le-Vieux.

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoir...

Vu la procédure suivante :

Par un déféré du 28 mars 2014, le préfet de la Haute-Savoie a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'élection de M. B...A...en qualité de conseiller municipal à l'issue des opérations électorales qui se sont déroulées le 23 mars 2014 en vue de la désignation des conseillers municipaux de la commune d'Annecy-le-Vieux.

Par un jugement n° 1401752 du 18 septembre 2014, le tribunal administratif de Grenoble, faisant droit à ce déféré, a annulé l'élection de M. A...en qualité de conseiller municipal de la commune d'Annecy-le-Vieux.

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 20 octobre et 19 novembre 2014 et le 9 mars 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code électoral ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Benjamin de Maillard, auditeur,

- les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, avocat de M. A...;

1. Considérant qu'en vertu de l'article L. 231 du code électoral, ne peuvent être élus conseillers municipaux, d'une part, les agents salariés des communes qui les emploient, d'autre part, dans les communes situées dans le ressort où ils exercent ou ont exercé leurs fonctions depuis moins de six mois, en vertu des 1° à 7° et 9° de cet article, certains magistrats et fonctionnaires de l'Etat, les entrepreneurs des services municipaux et, aux termes du 8° de cet article, dans sa rédaction issue de l'article 22 de la loi du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral : " Les personnes exerçant, au sein du conseil régional, du conseil départemental, de la collectivité territoriale de Corse, de Guyane ou de Martinique, d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ou de leurs établissements publics, les fonctions de directeur général des services, directeur général adjoint des services, directeur des services, directeur adjoint des services ou chef de service, ainsi que les fonctions de directeur de cabinet, directeur adjoint de cabinet ou chef de cabinet en ayant reçu délégation de signature du président, du président de l'assemblée ou du président du conseil exécutif (...) " ;

2. Considérant que les dispositions du 8° de l'article L. 231 du code électoral citées au point 1 doivent s'entendre, eu égard à leur objet, comme visant non le conseil régional ou le conseil départemental mais les collectivités dont ils sont les organes délibérants ; qu'entrent ainsi dans le champ de ces dispositions, qui sont d'interprétation stricte, d'une part, les établissements publics dépendant exclusivement d'une région ou d'un département, ainsi que des autres collectivités territoriales et établissements mentionnés par ces dispositions, d'autre part, ceux qui sont communs à plusieurs de ces collectivités ; que doivent être seulement regardés comme dépendant de ces collectivités ou établissements ou comme communs à plusieurs collectivités, pour l'application de ces dispositions, les établissements publics créés par ces seuls collectivités ou établissements ou à leur demande ; qu'en revanche, il ne ressort pas de ces dispositions que l'inéligibilité qu'elles prévoient s'étende aux personnes exerçant les fonctions qu'elles mentionnent dans d'autres établissements publics que ceux qui dépendent d'une ou plusieurs des collectivités et établissements qu'elles citent ou sont communs à plusieurs de ces collectivités ;

3. Considérant que les agents de l'Etat, dont les dispositions du premier alinéa et des 1° à 7° et 9° de l'article L. 231 du code électoral fixent les conditions d'inéligibilité aux conseils municipaux, ne sont pas inéligibles en application des dispositions du 8° de cet article lorsqu'ils ont été nommés par l'acte d'un représentant de l'Etat aux fonctions qu'elles mentionnent dans un établissement public dépendant des collectivités territoriales ou établissements qu'elles citent ;

4. Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'élection de M. A...en qualité de conseiller municipal de la commune d'Annecy-le-Vieux, au motif que, en qualité de chef du centre principal d'incendie et de secours d'Epagny en Haute-Savoie, il exerçait des fonctions équivalentes à celles de chef de service au sein du conseil départemental de la Haute-Savoie et, dès lors, était inéligible ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1424-1 du code général des collectivités territoriales : " Il est créé dans chaque département un établissement public, dénommé " service départemental d'incendie et de secours ", qui comporte un corps départemental de sapeurs-pompiers, composé dans les conditions prévues à l'article L. 1425-5 et organisé en centres d'incendie et de secours. Il comprend un service de santé et de secours médical. / L'établissement mentionné à l'alinéa précédent peut passer avec les collectivités locales ou leurs établissements publics toute convention ayant trait à la gestion non opérationnelle du service d'incendie et de secours. / Ont également la qualité de service d'incendie et de secours les centres d'incendie et de secours qui relèvent des communes ou des établissements publics de coopération intercommunale disposant d'un corps communal ou intercommunal de sapeurs-pompiers. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 1424-24 du même code : " Le service départemental d'incendie et de secours est administré par un conseil d'administration composé de représentants du département, des communes et des établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de secours et de lutte contre l'incendie (...) " ;

6. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les services départementaux d'incendie et de secours, qui associent pour la gestion et la mise en oeuvre des moyens au niveau local les communes au département et aux établissements publics de coopération intercommunale, ne sont pas seulement rattachés à des collectivités ou établissements mentionnés au 8° de l'article L. 231 du code électoral ; qu'en outre, ils ne sont pas créés par le département ou à sa demande mais par la loi dans chaque département ; qu'il suit de là que les services départementaux d'incendie et de secours ne peuvent être regardés comme des établissements publics du département au sens et pour l'application du 8° de l'article L. 231 du code électoral ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement qu'il attaque, le tribunal administratif de Grenoble a annulé son élection en qualité de conseiller municipal, à l'issue des opérations électorales qui se sont déroulées le 23 mars 2014 dans la commune d'Annecy-le-Vieux ; qu'aucun autre grief n'a été soulevé par le préfet dans son déféré devant le tribunal ; qu'il y a donc lieu de valider l'élection de M. A...;

8. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. A...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 18 septembre 2014 du tribunal administratif de Grenoble est annulé.

Article 2 : L'élection de M. B...A...en qualité de conseiller municipal à l'issue des opérations électorales qui se sont déroulées le 23 mars 2014 dans la commune d'Annecy-le-Vieux est validée.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le déféré présenté par le préfet de la Haute-Savoie devant le tribunal administratif de Grenoble est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et au préfet de la Haute-Savoie.

Copie en sera adressée pour information au ministre de l'intérieur.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 17 avr. 2015, n° 385222
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Benjamin de Maillard
Rapporteur public ?: Mme Gaëlle Dumortier
Avocat(s) : SCP POTIER DE LA VARDE, BUK LAMENT

Origine de la décision
Formation : 4ème ssjs
Date de la décision : 17/04/2015
Date de l'import : 23/03/2016

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 385222
Numéro NOR : CETATEXT000030509836 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2015-04-17;385222 ?
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