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23/10/2015 | FRANCE | N°391862

France | France, Conseil d'État, 8ème ssjs, 23 octobre 2015, 391862


Vu la procédure suivante :

La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a transmis au tribunal administratif de Fort-de-France, en application de l'article L. 52-15 du code électoral, la décision du 22 juillet 2014 par laquelle elle a rejeté le compte de campagne de M. B...A..., candidat aux élections municipales de La Trinité (Martinique) organisées les 23 et 30 mars 2014. Par un jugement n° 1400557 du 6 juillet 2015, le tribunal administratif a déclaré que le compte de campagne du candidat avait été rejeté à bon droit et déclaré M. A..

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Vu la procédure suivante :

La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a transmis au tribunal administratif de Fort-de-France, en application de l'article L. 52-15 du code électoral, la décision du 22 juillet 2014 par laquelle elle a rejeté le compte de campagne de M. B...A..., candidat aux élections municipales de La Trinité (Martinique) organisées les 23 et 30 mars 2014. Par un jugement n° 1400557 du 6 juillet 2015, le tribunal administratif a déclaré que le compte de campagne du candidat avait été rejeté à bon droit et déclaré M. A...inéligible pour une durée d'un an à compter de la date à laquelle le présent jugement sera devenu définitif.

Par une requête et un nouveau mémoire, enregistrés les 20 juillet et 7 octobre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la saisine de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code électoral ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Marc Anton, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public ;

1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par une décision du 22 juillet 2014, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de campagne déposé par M. A..., candidat aux élections municipales de La Trinité (Martinique) organisées les 23 et 30 mars 2014, en se fondant sur la circonstance que le candidat avait réglé lui-même, postérieurement à la désignation de son mandataire, l'intégralité des dépenses engagées en vue de l'élection et antérieures à la date du tour de scrutin où elle a été acquise ; qu'en application des dispositions de l'article L. 52-15 du code électoral, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a saisi le tribunal administratif de Fort-de-France qui, par un jugement du 6 juillet 2015, a déclaré M. A...inéligible pour une durée d'un an ; que M. A... fait appel de ce jugement ;

Sur le bien-fondé du rejet du compte de campagne :

2. Considérant que l'article L. 52-4 du code électoral rend obligatoire la désignation d'un mandataire financier par tout candidat à une élection au plus tard à la date à laquelle sa candidature est enregistrée ; qu'aux termes du troisième alinéa de cet article, le mandataire " règle les dépenses engagées en vue de l'élection et antérieures à la date du tour de scrutin où elle a été acquise, à l'exception des dépenses prises en charge par un parti ou groupement politique. Les dépenses antérieures à sa désignation payées directement par le candidat ou à son profit font l'objet d'un remboursement par le mandataire et figurent dans son compte bancaire ou postal " ;

3. Considérant que si, par dérogation à la formalité substantielle que constitue l'obligation de recourir à un mandataire pour toute dépense effectuée en vue de sa campagne, le règlement direct de menues dépenses par le candidat peut être admis, ce n'est qu'à la double condition que leur montant, en vertu des dispositions précitées de l'article L. 52-4 du code électoral, soit faible par rapport au total des dépenses du compte de campagne et négligeable au regard du plafond de dépenses autorisées fixé par l'article L. 52-11 du même code ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté que M. A... a, après la désignation de son mandataire financier, réglé directement l'intégralité des dépenses effectuées en vue de l'élection, pour un montant total de 4 841 euros, la circonstance que sa banque ait omis de lui commander un chéquier à l'ouverture de son compte de campagne étant sans incidence dès lors qu'il ne fait état d'aucune diligence de sa part pour y remédier ; que le total des dépenses ainsi acquittées en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 52-4 du code électoral représente 100 % du montant total des dépenses retracées dans le compte du candidat et 24 % du plafond des dépenses alors autorisées pour la circonscription de La Trinité ;

5. Considérant que, par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Fort-de-France a jugé que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques était fondée à rejeter son compte de campagne ;

Sur l'inéligibilité :

6. Considérant que le troisième alinéa de l'article L. 118-3 du code électoral dispose que le juge de l'élection, saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, " prononce (...) l'inéligibilité du candidat dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit en cas de volonté de fraude ou de manquement d'une particulière gravité aux règles relatives au financement des campagnes électorales " ; que, pour déterminer si un manquement est d'une particulière gravité au sens de ces dispositions, il incombe au juge de l'élection d'apprécier, d'une part, s'il s'agit d'un manquement caractérisé à une règle substantielle relative au financement des campagnes électorales, d'autre part, s'il présente un caractère délibéré ; qu'en cas de manquement aux dispositions de l'article L. 52-4 du code électoral, il incombe, en outre, au juge de tenir compte de l'existence éventuelle d'autres motifs d'irrégularité du compte, du montant des sommes en cause ainsi que de l'ensemble des circonstances de l'espèce ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, compte tenu du montant des dépenses en cause, qui n'est pas demeuré limité, et des circonstances de l'espèce rappelées ci-dessus, M. A...doit être regardé comme ayant commis un manquement d'une particulière gravité aux règles relatives au financement des campagnes électorales ; que, par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Fort-de-France l'a déclaré inéligible ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.

Copie en sera adressée, pour information, au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 8ème ssjs
Numéro d'arrêt : 391862
Date de la décision : 23/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 23 oct. 2015, n° 391862
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Anton
Rapporteur public ?: M. Benoît Bohnert

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:391862.20151023
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