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27/11/2015 | FRANCE | N°374025

France | France, Conseil d'État, 5ème / 4ème ssr, 27 novembre 2015, 374025


Vu la procédure suivante :

Les consorts A...et la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Haute-Marne ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner le centre hospitalier de Troyes à les indemniser des préjudices subis à la suite de la prise en charge de M. B...A...par le centre hospitalier. Par un jugement n° 0901124 du 14 avril 2011, le tribunal administratif a partiellement fait droit aux conclusions des consorts A...mais a rejeté celles de la caisse comme irrecevables.

Par un arrêt n° 11NC00946 du 17 octobre 2013, la cour admin

istrative d'appel de Nancy a, d'une part, décidé de ne pas admettre u...

Vu la procédure suivante :

Les consorts A...et la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Haute-Marne ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner le centre hospitalier de Troyes à les indemniser des préjudices subis à la suite de la prise en charge de M. B...A...par le centre hospitalier. Par un jugement n° 0901124 du 14 avril 2011, le tribunal administratif a partiellement fait droit aux conclusions des consorts A...mais a rejeté celles de la caisse comme irrecevables.

Par un arrêt n° 11NC00946 du 17 octobre 2013, la cour administrative d'appel de Nancy a, d'une part, décidé de ne pas admettre une intervention de la CPAM de l'Aube et, d'autre part, sur la requête de la CPAM de la Haute-Marne, annulé le jugement en tant qu'il rejetait les conclusions de cette caisse et condamné le centre hospitalier de Troyes à lui verser une indemnité de 163 250,85 euros en remboursement des frais exposés pour la prise en charge de M. A...et une somme de 1 015 euros au titre des frais de gestion.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 16 décembre 2013 et 14 mars 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le centre hospitalier de Troyes demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt en tant qu'il prononce cette condamnation.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Lionel Collet, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Le Prado, avocat du centre hospitalier de Troyes et à la SCP Foussard, Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B...A...a subi le 5 janvier 2006 une intervention chirurgicale au centre hospitalier de Troyes au cours de laquelle il a présenté un choc anaphylactique avec arrêt cardiaque ; que, demeuré plongé dans un coma végétatif à la suite de cet accident, il est décédé le 28 juillet 2007 ; que, saisi par les consorts A...d'une demande indemnitaire, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a, par un jugement du 14 avril 2011, jugé que le centre hospitalier de Troyes avait commis des fautes de nature à engager sa responsabilité et ayant entraîné une perte de chance de 95 % d'éviter le dommage ; que le tribunal administratif a condamné l'établissement à verser aux consorts A...des indemnités réparant 95 % des conséquences du dommage corporel pour la victime et ses proches mais a rejeté comme irrecevables les conclusions présentées par la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Haute-Marne tendant au remboursement des sommes que la CPAM de l'Aube avait exposées à la suite de l'accident ; que, sur appel de la CPAM de la Haute-Marne, la cour administrative d'appel de Nancy a, par un arrêt du 17 octobre 2013, annulé le jugement en tant qu'il rejetait ses conclusions et condamné le centre hospitalier de Troyes à lui rembourser l'intégralité des débours exposées par la CPAM de l'Aube ; que le centre hospitalier de Troyes se pourvoit en cassation contre cet arrêt ;

2. Considérant qu'aux termes du huitième alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, relatif au recours subrogatoire des caisses de sécurité sociale contre le responsable d'un accident ayant entraîné un dommage corporel : " L'intéressé ou ses ayants droit doivent indiquer, en tout état de la procédure, la qualité d'assuré social de la victime de l'accident ainsi que les caisses de sécurité sociale auxquelles celle-ci est ou était affiliée pour les divers risques. Ils doivent appeler ces caisses en déclaration de jugement commun ou réciproquement (...) " ; qu'il appartient au juge administratif, qui dirige l'instruction, d'assurer, en tout état de la procédure, le respect de ces dispositions ; qu'ainsi, le tribunal administratif, saisi par la victime ou par la caisse d'une demande tendant à la réparation du dommage corporel par l'auteur de l'accident, doit appeler en la cause, selon le cas, la caisse ou la victime ; que la cour administrative d'appel, saisie dans le délai légal d'un appel de la victime ou de la caisse, doit communiquer la requête, selon le cas, à la caisse ou la victime ; qu'eu égard au lien que les dispositions de l'article L. 376-1 établissent entre la détermination des droits de la victime et celle des droits de la caisse, la caisse ou la victime est recevable à faire à son tour appel du jugement même si le délai légal est expiré ; que la méconnaissance des obligations de mise en cause entache le jugement ou l'arrêt d'une irrégularité que le juge d'appel ou le juge de cassation doit, au besoin, relever d'office ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit qu'il appartenait à la cour administrative d'appel de Nancy, saisie par la CPAM de la Haute-Marne d'un appel contre le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne qui rejetait sa demande et faisait partiellement droit à celle des consortsA..., de communiquer la requête à ces derniers ; qu'en s'abstenant de procéder à cette communication, elle a entaché son arrêt d'irrégularité ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens du pourvoi, son arrêt doit être annulé ;

4. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge du centre hospitalier de Troyes qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 17 octobre 2013 de la cour administrative d'appel de Nancy est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Nancy.

Article 3 : Les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par la CPAM de la Haute-Marne sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au centre hospitalier de Troyes et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne.

Copie en sera adressée aux consortsA....


Synthèse
Formation : 5ème / 4ème ssr
Numéro d'arrêt : 374025
Date de la décision : 27/11/2015
Type d'affaire : Administrative

Analyses

PROCÉDURE - INSTRUCTION - LITIGE TENDANT À LA RÉPARATION DU DOMMAGE CORPOREL PAR L'AUTEUR DE L'ACCIDENT - 1) OBLIGATION D'APPELER EN LA CAUSE - SELON LE CAS - LA VICTIME OU LA CAISSE - EXISTENCE - 2) CARACTÈRE D'ORDRE PUBLIC DE LA MÉCONNAISSANCE DE CETTE OBLIGATION - EXISTENCE.

54-04 1) Pour assurer le respect de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, le tribunal administratif, saisi par la victime ou par la caisse d'une demande tendant à la réparation du dommage corporel par l'auteur de l'accident, doit appeler en la cause, selon le cas, la caisse ou la victime. La cour administrative d'appel, saisie dans le délai légal d'un appel de la victime ou de la caisse, doit communiquer la requête, selon le cas, à la caisse ou la victime.,,,2) La méconnaissance de ces obligations de mise en cause entache le jugement ou l'arrêt d'une irrégularité que le juge d'appel ou le juge de cassation doit, au besoin, relever d'office.

PROCÉDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - QUESTIONS GÉNÉRALES - MOYENS - MOYENS D'ORDRE PUBLIC À SOULEVER D'OFFICE - EXISTENCE - MÉCONNAISSANCE - PAR LE JUGE DE PREMIÈRE INSTANCE OU LE JUGE D'APPEL - SAISI PAR LA CAISSE OU LA VICTIME D'UN LITIGE TENDANT À LA RÉPARATION DU DOMMAGE CORPOREL PAR L'AUTEUR DE L'ACCIDENT - DE L'OBLIGATION D'APPELER EN LA CAUSE - SELON LE CAS - LA VICTIME OU LA CAISSE.

54-07-01-04-01-02 Pour assurer le respect de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, le tribunal administratif, saisi par la victime ou par la caisse d'une demande tendant à la réparation du dommage corporel par l'auteur de l'accident, doit appeler en la cause, selon le cas, la caisse ou la victime. La cour administrative d'appel, saisie dans le délai légal d'un appel de la victime ou de la caisse, doit communiquer la requête, selon le cas, à la caisse ou la victime.,,,La méconnaissance de ces obligations de mise en cause entache le jugement ou l'arrêt d'une irrégularité que le juge d'appel ou le juge de cassation doit, au besoin, relever d'office.

PROCÉDURE - VOIES DE RECOURS - APPEL - RECEVABILITÉ - EXISTENCE - APPEL DE LA CAISSE DE SÉCURITÉ SOCIALE OU DE LA VICTIME FORMÉ AU-DELÀ DU DÉLAI DE RECOURS - EN CAS D'APPEL RECEVABLE - SELON LE CAS - DE LA VICTIME OU DE LA CAISSE [RJ1].

54-08-01-01 Pour assurer le respect de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, le tribunal administratif, saisi par la victime ou par la caisse d'une demande tendant à la réparation du dommage corporel par l'auteur de l'accident, doit appeler en la cause, selon le cas, la caisse ou la victime. La cour administrative d'appel, saisie dans le délai légal d'un appel de la victime ou de la caisse, doit communiquer la requête, selon le cas, à la caisse ou la victime.,,,Eu égard au lien que les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale établissent entre la détermination des droits de la victime d'un accident et celle des droits de la caisse de sécurité sociale à laquelle elle est affiliée, la caisse ou la victime est recevable à faire appel à son tour du jugement même si le délai légal est expiré.

SÉCURITÉ SOCIALE - CONTENTIEUX ET RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES - LITIGE TENDANT À LA RÉPARATION DU DOMMAGE CORPOREL PAR L'AUTEUR DE L'ACCIDENT - 1) OBLIGATION D'APPELER EN LA CAUSE - SELON LE CAS - LA VICTIME OU LA CAISSE - EXISTENCE - 2) CARACTÈRE D'ORDRE PUBLIC DE LA MÉCONNAISSANCE DE CETTE OBLIGATION - EXISTENCE - 3) RECEVABILITÉ DE L'APPEL DE LA CAISSE OU LA VICTIME FORMÉ AU-DELÀ DU DÉLAI DE RECOURS - EXISTENCE - EN CAS D'APPEL RECEVABLE - SELON LE CAS - DE LA VICTIME OU DE LA CAISSE [RJ1].

62-05 1) Pour assurer le respect de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, le tribunal administratif, saisi par la victime ou par la caisse d'une demande tendant à la réparation du dommage corporel par l'auteur de l'accident, doit appeler en la cause, selon le cas, la caisse ou la victime. La cour administrative d'appel, saisie dans le délai légal d'un appel de la victime ou de la caisse, doit communiquer la requête, selon le cas, à la caisse ou la victime.,,,2) La méconnaissance de ces obligations de mise en cause entache le jugement ou l'arrêt d'une irrégularité que le juge d'appel ou le juge de cassation doit, au besoin, relever d'office.,,,3) En cas d'appel recevable de la victime ou de la caisse, eu égard au lien que les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale établissent entre la détermination des droits de la victime d'un accident et celle des droits de la caisse de sécurité sociale à laquelle elle est affiliée, la caisse ou la victime est recevable à faire appel à son tour du jugement même si le délai légal est expiré.


Références :

[RJ1]

Cf. CE, Section, 1er juillet 2005, S., n° 234403, p. 300 ;

CE, 16 mai 2007, Mme Le Reun, n° 277568, T. pp. 1044-1078-1096 ;

CE, 16 mai 2007, Caisse primaire d'assurance maladie d'Angers, n° 285514, T. pp. 1044-1078-1095.

Rappr., s'agissant de la recevabilité du pourvoi en cassation, CE, 31 mai 2013, Consorts Dejardin, n°s 346876 346945, T. pp. 433-508-509-627-804-842-854.


Publications
Proposition de citation : CE, 27 nov. 2015, n° 374025
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Lionel Collet
Rapporteur public ?: M. Nicolas Polge
Avocat(s) : SCP FOUSSARD, FROGER ; LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2015:374025.20151127
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