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20/10/2016 | FRANCE | N°394964

France | France, Conseil d'État, 2ème et 7ème chambres réunies, 20 octobre 2016, 394964


Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 2 décembre 2015 et 5 octobre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Cimade, le Groupe accueil et solidarité, le Groupe d'information et soutien des immigrés et l'association Dom'asile demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2015-1298 du 16 octobre 2015 pris pour l'application de la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d'asile et relatif à la procédure applicable devant la Cour nationale du dro

it d'asile ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au ...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 2 décembre 2015 et 5 octobre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Cimade, le Groupe accueil et solidarité, le Groupe d'information et soutien des immigrés et l'association Dom'asile demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2015-1298 du 16 octobre 2015 pris pour l'application de la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d'asile et relatif à la procédure applicable devant la Cour nationale du droit d'asile ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Clément Malverti, auditeur,

- les conclusions de M. Xavier Domino, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Spinosi, Sureau, avocat de la Cimade et autres.

1. Considérant que l'article 17 de la loi du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d'asile a modifié certaines dispositions du titre III du livre VII du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatif à la Cour nationale du droit d'asile ; que le décret du 16 octobre 2015, pris pour l'application de certaines des dispositions ainsi modifiées, comporte notamment des dispositions relatives aux conditions d'examen des recours devant la cour ; que la Cimade, le Groupe accueil et solidarité, le Groupe d'information et soutien des immigrés et l'association Dom'asile demandent l'annulation de ce décret ;

2. Considérant, en premier lieu, que la compatibilité d'une disposition législative aux stipulations d'un traité international ne peut être utilement invoquée à l'appui de conclusions dirigées contre un acte réglementaire que si ce dernier a été pris pour son application ou si en elle constitue la base légale ; qu'il suit de là que les associations requérantes ne peuvent, à l'appui de leurs conclusions, utilement contester, par la voie de l'exception, les dispositions des articles L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatives au droit au maintien sur le territoire français du demandeur d'asile dont la demande a fait l'objet d'une décision d'irrecevabilité de l'office, L. 733-4 de ce code, relatives à la communication par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides des information qu'il estime être confidentielles, et L. 733-5 du même code, qui encadrent la possibilité pour le demandeur d'asile de se prévaloir devant la Cour nationale du droit d'asile de l'enregistrement sonore de l'entretien personnel, le décret attaqué n'étant pas pris pour l'application de ces dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lesquelles n'en constituent pas la base légale ;

3. Considérant, en second lieu, que la directive 2013/32/UE du 26 juin 2013 prévoit la possibilité pour les autorités nationales compétentes d'examiner une demande d'asile dans le cadre d'une procédure accélérée dès lors que les motifs qui ont conduit cette autorité à examiner le bien-fondé de ladite demande dans le cadre d'une telle procédure peuvent être effectivement soumis à un contrôle juridictionnel dans le cadre du recours dont la décision finale de rejet est susceptible de faire l'objet et dans le respect du droit à un recours juridictionnel effectif garanti par l'article 46 de la directive ; que cette directive n'implique nullement que la contestation du choix de l'autorité nationale compétente de recourir à une procédure accélérée s'exerce devant une juridiction distincte de celle appelée à se prononcer, en qualité de juge de plein contentieux, sur la décision de rejet de la demande d'asile ; qu'elle n'impose pas davantage de renvoyer l'affaire à l'autorité nationale compétente dans l'hypothèse où le choix de recourir à la procédure accélérée serait jugé irrégulier ;

4. Considérant que le VI de l'article L. 723-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que la décision de statuer en procédure accélérée " ne peut pas faire l'objet, devant les juridictions administratives de droit commun, d'un recours distinct du recours qui peut être formé, en application de l'article L. 731-2, devant la Cour nationale du droit d'asile à l'encontre de la décision de l'office " ; qu'ainsi, la décision par laquelle l'office rejette une demande d'asile dans le cadre de la procédure accélérée est susceptible de faire l'objet d'un recours devant la Cour nationale du droit d'asile qui, en vertu de l'article L. 733-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, statue en qualité de juge de plein contentieux sur le droit du requérant à une protection au titre de l'asile, dans le respect du droit à un recours juridictionnel effectif garanti par l'article 46 de la directive 2013/32/UE ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompatibilité des dispositions législatives précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile avec les dispositions de l'article 46 de la directive 2013/32/UE ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'intérieur, que les associations requérantes ne sont pas fondées à demander l'annulation du décret qu'elles attaquent ; que leurs conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la Cimade, du Groupe accueil et solidarité, du Groupe d'information et soutien des immigrés et de l'association Dom'asile est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Cimade, au Groupe accueil et solidarité, au Groupe d'information et soutien des immigrés, à l'association Dom'asile, au ministre de l'intérieur et au Premier ministre.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 20 oct. 2016, n° 394964
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Clément Malverti
Rapporteur public ?: M. Xavier Domino
Avocat(s) : SCP SPINOSI, SUREAU

Origine de la décision
Formation : 2ème et 7ème chambres réunies
Date de la décision : 20/10/2016
Date de l'import : 22/11/2016

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 394964
Numéro NOR : CETATEXT000033285464 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2016-10-20;394964 ?
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