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30/11/2016 | FRANCE | N°391848

France | France, Conseil d'État, 7ème chambre, 30 novembre 2016, 391848


Vu la procédure suivante :

Le syndicat viticole du cru minervois et le GAEC du Château de Villerembert-Moureau ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 1er mars 2011 par lequel le préfet de l'Aude a autorisé la SARL Les Carrières de Pompignan à exploiter une carrière à ciel ouvert au lieu dit " Plo dal Tablie " sur le territoire de la commune de Caunes-Minervois. Par un jugement n° 1102904 du 2 juillet 2013, le tribunal administratif a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 13MA03284 du 19 mai 2015, la cour administrative d'appel de

Marseille a, sur appel du syndicat viticole du Cru minervois et du GAEC du...

Vu la procédure suivante :

Le syndicat viticole du cru minervois et le GAEC du Château de Villerembert-Moureau ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 1er mars 2011 par lequel le préfet de l'Aude a autorisé la SARL Les Carrières de Pompignan à exploiter une carrière à ciel ouvert au lieu dit " Plo dal Tablie " sur le territoire de la commune de Caunes-Minervois. Par un jugement n° 1102904 du 2 juillet 2013, le tribunal administratif a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 13MA03284 du 19 mai 2015, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel du syndicat viticole du Cru minervois et du GAEC du château de Villerembert-Moureau, annulé ce jugement et l'arrêté du 1er mars 2011.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 20 juillet et 19 octobre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SARL Les Carrières de Pompignan demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel du syndicat viticole du Cru minervois et du GAEC du château de Villerembert-Moureau ;

3°) de mettre à la charge du syndicat viticole du Cru minervois et du GAEC du château de Villerembert-Moureau la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Philippe Mochon, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, Coudray, avocat de la SARL Les Carrières de Pompignan et à la SCP Didier, Pinet, avocat du syndicat viticole du Cru minervois ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 1er mars 2011, le préfet de l'Aude a autorisé la SARL Les Carrières de Pompignan à exploiter une carrière de marbre à ciel ouvert sur le territoire de la commune de Caunes-Minervois ; que, par un arrêt du 19 mai 2015 contre lequel la société Les Carrières de Pompignan se pourvoit en cassation, la cour administrative de Marseille a annulé, d'une part, le jugement du 2 juillet 2013 du tribunal administratif de Montpellier rejetant le recours du syndicat viticole du Cru minervois et du GAEC du Château de Villerembert-Moureau contre cet arrêté et, d'autre part, l'arrêté litigieux ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 123-6 du code de l'environnement, relatif aux enquêtes publiques portant sur les opérations susceptibles d'affecter l'environnement, dans sa rédaction alors applicable : " Le dossier soumis à l'enquête publique comprend les pièces suivantes : / (...) I. Lorsque l'opération n'est pas soumise à décision d'autorisation ou d'approbation : / (...) 8° Lorsqu'ils sont rendus obligatoires par un texte législatif ou réglementaire, les avis émis par une autorité administrative sur le projet d'opération (...) / II. - Lorsque l'opération est soumise à décision d'autorisation ou d'approbation : / 1° Le dossier prévu par la réglementation relative à l'opération projetée ; / 2° Les pièces visées aux 2°, 7° et 8° du I ci-dessus. " ; qu'aux termes de l'article L. 512-6 du même code, applicable aux installations classées pour la protection de l'environnement soumises à autorisation : " Dans les communes comportant une aire de production de vins d'appellation d'origine, l'autorité compétente pour délivrer l'autorisation consulte l'Institut national de l'origine et de la qualité. (...). " ; qu'aux termes du cinquième alinéa de l'article L. 515-1 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Toute autorisation ou enregistrement d'exploitation de carrières est soumise, dans les vignobles classés appellation d'origine contrôlée, vin délimité de qualité supérieure, et dans les aires de production de vins de pays, à l'avis de l'Institut national de l'origine et de la qualité et de l'Office national interprofessionnel des fruits, des légumes, des vins et de l'horticulture. " ; qu'il résulte de ces dispositions combinées que, lorsqu'un projet d'exploitation de carrières est situé dans une commune dont le territoire comporte des vignobles classés appellation d'origine contrôlée, vin délimité de qualité supérieure ou des aires de production de vins de pays, l'Institut national de l'origine et de la qualité (INAO) doit être consulté et son avis figurer au dossier soumis à l'enquête publique ;

3. Considérant que les inexactitudes, omissions ou insuffisances affectant le dossier soumis à enquête publique ne sont susceptibles de vicier la procédure et ainsi d'entacher d'irrégularité l'autorisation que si elles ont eu pour effet de nuire à l'information de l'ensemble des personnes intéressées par l'opération ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur les résultats de l'enquête et, par suite, sur la décision de l'autorité administrative ;

4. Considérant qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel de Marseille a estimé que le défaut de production, dans le dossier d'enquête publique, de l'avis émis par l'INAO sur le projet de carrière de la SARL Les Carrières de Pompignan avait entaché d'illégalité l'arrêté litigieux ; qu'elle s'est fondée sur la circonstance que cet avis, défavorable au projet en raison des nuisances susceptibles de résulter, pour l'activité viticole, de la production de poussière générée par l'exploitation, avait eu pour effet de nuire à l'information complète de la population, eu égard au public concerné par le projet, notamment constitué d'exploitants viticoles ;

5. Considérant, toutefois, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'avis de l'INAO reprenait les observations déjà formulées par le syndicat viticole, que le préfet avait sollicité sur les conséquences du projet sur l'exploitation agricole de la vigne et sur la mise en valeur du paysage pour l'oeno-tourisme ; qu'il ressort du texte de l'avis de ce syndicat que celui-ci avait, au préalable, recueilli les observations des caves et domaines riverains du projet, qui avaient été informés de l'existence de ce dernier et des nuisances susceptibles d'en résulter ; qu'en outre, l'étude d'impact jointe au dossier d'enquête publique reprenait ces différentes nuisances au titre des incidences du projet sur l'environnement ; qu'enfin, le rapport du commissaire-enquêteur fait ressortir ces inconvénients et indique qu'ils ont été mis en avant, dans leurs observations, par plusieurs riverains du projet au cours de l'enquête ; que, par suite, en estimant que l'absence de l'avis de l'INAO dans le dossier soumis à l'enquête publique avait eu pour effet de nuire à l'information complète de la population, la cour a entaché son arrêt de dénaturation des pièces du dossier ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que la SARL Les Carrières de Pompignan est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ;

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la SARL Les Carrières de Pompignan qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du syndicat viticole du Cru minervois et du GAEC du château de Villerembert-Moureau la somme de 1 500 euros chacun à verser à la SARL Les Carrières de Pompignan, au titre des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 19 mai 2015 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Marseille.

Article 3 : Le syndicat viticole du Cru minervois et le GAEC du château de Villerembert-Moureau verseront à la SARL Les Carrières de Pompignan une somme de 1 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions du syndicat viticole du Cru minervois présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SARL Les Carrières de Pompignan, au syndicat viticole du cru minervois et au GAEC du château de Villerembert-Moureau.

Copie en sera adressée à la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat.


Synthèse
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 391848
Date de la décision : 30/11/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 nov. 2016, n° 391848
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Philippe Mochon
Rapporteur public ?: M. Xavier de Lesquen
Avocat(s) : SCP DIDIER, PINET ; SCP MASSE-DESSEN, THOUVENIN, COUDRAY

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:391848.20161130
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