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18/01/2017 | FRANCE | N°386434

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 18 janvier 2017, 386434


Vu la procédure suivante :

La SARL MRB a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2005 et 2006 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007, ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement nos 0903753, 1201320 du 25 juillet 2013, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes.

Par un arrêt n° 13LY02597 du 14 octobre 2014,

la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé par la SARL MR...

Vu la procédure suivante :

La SARL MRB a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2005 et 2006 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007, ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement nos 0903753, 1201320 du 25 juillet 2013, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes.

Par un arrêt n° 13LY02597 du 14 octobre 2014, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé par la SARL MRB contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 15 décembre 2014 et 16 mars 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SARL MRB demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Matias de Sainte Lorette, maître des requêtes en service extraordinaire ;

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Soltner, Texidor, Perier, avocat de la société MRB ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SARL MRB a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, à l'issue de laquelle l'administration fiscale lui a notifié, par une proposition de rectification en date du 11 juillet 2008, qu'elle entendait mettre à sa charge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2005 et 2006 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) au titre de la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2007. Ces cotisations et rappels ont été assortis de pénalités, dont notamment une majoration de 40 % pour manquement délibéré portant sur les rappels de TVA. La SARL MRB a sollicité la conclusion d'une transaction, par courrier en date du 21 octobre 2008. Le 5 novembre suivant, l'administration a adressé à la société une proposition de transaction par laquelle, en contrepartie de l'acceptation des redressements, les trois quarts des pénalités lui étaient remis et un échéancier de paiement de six mois lui était accordé. Le 18 novembre, le conseil de la société a, de nouveau, saisi l'administration d'une demande de transaction, sans se référer à la proposition du 5 novembre. Le 4 décembre, il a répondu au courrier du 5 novembre proposant la transaction. Le 22 décembre 2008, l'administration a mis en recouvrement les impositions et pénalités litigieuses. Le 6 janvier 2009, enfin, elle a adressé à la SARL un courrier lui indiquant que, celle-ci n'ayant pas accepté la proposition qui lui avait été faite, sa demande de transaction était rejetée. La SARL MRB se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 14 octobre 2014 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel qu'elle avait formé contre le jugement du 25 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes tendant à la décharge des impositions en litige.

2. Aux termes de l'article L. 247 du livre des procédures fiscales, dans sa version applicable au litige : " L'administration peut accorder sur la demande du contribuable ; / 1° Des remises totales ou partielles d'impôts directs régulièrement établis lorsque le contribuable est dans l'impossibilité de payer par suite de gêne ou d'indigence ; / 2° Des remises totales ou partielles d'amendes fiscales ou de majorations d'impôts lorsque ces pénalités et, le cas échéant, les impositions auxquelles elles s'ajoutent sont définitives ; / 3° Par voie de transaction, une atténuation d'amendes fiscales ou de majorations d'impôts lorsque ces pénalités et, le cas échéant, les impositions auxquelles elles s'ajoutent ne sont pas définitives. ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : " Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration. ". La charte des droits et devoirs du contribuable vérifié énonce, dans sa version applicable au litige, que : " Si l'administration envisage, dès l'envoi de la proposition de rectification, de vous accorder le bénéfice d'une transaction que vous solliciteriez, elle vous en informe dans ce document. / Vous pouvez par ailleurs en demander le bénéfice de votre propre initiative, avant ou après la mise en recouvrement des impositions. / Si le principe d'une transaction est retenu, des propositions vous seront adressées par écrit et vous aurez un délai de 30 jours pour y répondre. ".

3. En premier lieu, il résulte des dispositions citées au point 2 que lorsque le contribuable demande le bénéfice d'une transaction, une telle demande présente un caractère gracieux. Si par erreur de plume la cour a évoqué une procédure de " remise gracieuse " au lieu de faire état de la procédure de transaction organisée à titre gracieux à la demande du contribuable, elle n'a pas à ce faisant dénaturé les pièces du dossier ni donné une inexacte qualification juridique aux faits dont elle était saisie.

4. En deuxième lieu, il résulte des mêmes dispositions que la décision par laquelle l'administration fiscale rejette une demande de transaction présentée par un contribuable ne peut être contestée que par la voie d'un recours pour excès de pouvoir. Par suite, le contribuable ne peut utilement invoquer devant le juge de l'impôt les éventuelles irrégularités commises dans la procédure de transaction à l'appui de ses conclusions en décharge des impositions en litige. Il en résulte que la cour ayant relevé, par une motivation suffisante, que la demande de saisine du supérieur hiérarchique avait été présentée par le contribuable dans le cadre de la procédure transactionnelle, elle n'a ni commis d'erreur de droit ni entaché son arrêt d'une erreur de qualification juridique des faits en jugeant que l'administration n'avait pas entaché d'irrégularité la procédure d'imposition en litige en s'abstenant de donner suite à cette demande. Il en résulte également qu'elle n'a pas plus commis d'erreur de droit en jugeant que l'administration avait pu régulièrement mettre en recouvrement les impositions avant qu'une réponse ne fût apportée aux observations du requérant sur la proposition de transaction.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales. ". Ces dispositions instituent une garantie contre les changements de position de l'administration permettant, en particulier, aux contribuables passibles de pénalités fiscales de se prévaloir des énonciations contenues dans les notes ou instructions publiées, à la condition, notamment, que ces notes ou instructions aient été susceptibles d'influencer le comportement des intéressés au regard de leurs obligations fiscales. Tel n'est pas le cas de notes ou instructions administratives relatives à la procédure d'établissement ou de maintien d'une amende fiscale. Il en résulte que la cour a pu, sans erreur de droit, juger que la requérante ne pouvait utilement invoquer sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales la documentation de base 13 S-2531 relative aux décisions portant transaction.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la SARL MRB est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SARL MRB et au ministre de l'économie et des finances.


Synthèse
Formation : 9ème - 10ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 386434
Date de la décision : 18/01/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES - QUESTIONS COMMUNES - JURIDICTION GRACIEUSE - POUVOIR DE TRANSACTION DE L'ADMINISTRATION FISCALE - MOYEN TIRÉ DES IRRÉGULARITÉS COMMISES DANS LA PROCÉDURE DE TRANSACTION (ART - L - 247 DU LPF) PRÉSENTÉ À L'APPUI DE CONCLUSIONS TENDANT À LA DÉCHARGE D'IMPOSITIONS - INDÉPENDANCE DES PROCÉDURES - CONSÉQUENCE - MOYEN INOPÉRANT.

19-02-01-03 Il résulte des dispositions des articles L. 10 et L. 247 du livre des procédures fiscales (LPF) ainsi que de la charte des droits et devoirs du contribuable vérifié que la décision par laquelle l'administration fiscale rejette une demande de transaction présentée par un contribuable ne peut être contestée que par la voie d'un recours pour excès de pouvoir. Par suite, le contribuable ne peut utilement invoquer devant le juge de l'impôt les éventuelles irrégularités commises dans la procédure de transaction à l'appui de ses conclusions en décharge des impositions en litige.

PROCÉDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - QUESTIONS GÉNÉRALES - MOYENS - MOYENS INOPÉRANTS - EXISTENCE - MOYEN TIRÉ DES IRRÉGULARITÉS COMMISES DANS LA PROCÉDURE DE TRANSACTION (ART - L - 247 DU LPF) PRÉSENTÉ À L'APPUI DE CONCLUSIONS TENDANT À LA DÉCHARGE D'IMPOSITIONS.

54-07-01-04-03 Il résulte des dispositions des articles L. 10 et L. 247 du livre des procédures fiscales (LPF) ainsi que de la charte des droits et devoirs du contribuable vérifié que la décision par laquelle l'administration fiscale rejette une demande de transaction présentée par un contribuable ne peut être contestée que par la voie d'un recours pour excès de pouvoir. Par suite, le contribuable ne peut utilement invoquer devant le juge de l'impôt les éventuelles irrégularités commises dans la procédure de transaction à l'appui de ses conclusions en décharge des impositions en litige.


Publications
Proposition de citation : CE, 18 jan. 2017, n° 386434
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Matias de Sainte Lorette
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Avocat(s) : SCP CELICE, SOLTNER, TEXIDOR, PERIER

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:386434.20170118
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