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10/02/2017 | FRANCE | N°387398

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 10 février 2017, 387398


Vu la procédure suivante :

La SARL Melissa a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 et 2005 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période allant du 18 octobre 2003 au 31 décembre 2005, ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 0808028 du 19 février 2013, le tribunal administratif de Versailles a fait droit à sa demande.

Par un arrêt n° 13VE01647 du 4 novemb

re 2014, la cour administrative d'appel de Versailles a annulé ce jugement et a ...

Vu la procédure suivante :

La SARL Melissa a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 et 2005 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période allant du 18 octobre 2003 au 31 décembre 2005, ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 0808028 du 19 février 2013, le tribunal administratif de Versailles a fait droit à sa demande.

Par un arrêt n° 13VE01647 du 4 novembre 2014, la cour administrative d'appel de Versailles a annulé ce jugement et a remis à la charge de la société Melissa les suppléments d'impôt sur les sociétés et les rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels la société Melissa avait été assujettie.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 26 janvier et 22 avril 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SARL Melissa demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Séverine Larere, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, avocat de la société Melissa ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Melissa, qui exploite un établissement de vente de spécialités culinaires gréco-turques, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 18 octobre 2003 au 31 décembre 2005 à l'issue de laquelle l'administration fiscale, après avoir écarté sa comptabilité comme irrégulière et non probante et reconstitué son chiffre d'affaires, lui a notifié un rehaussement de ses bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés et à la taxe sur la valeur ajoutée. La société a contesté les impositions supplémentaires et les pénalités auxquelles elle a, en conséquence, été assujettie respectivement au titre des années 2004 et 2005 et de la période du 18 octobre 2003 au 31 décembre 2005. Par un jugement du 19 février 2013 le tribunal administratif de Versailles a fait droit à sa demande de décharge. Par l'arrêt attaqué, rendu sur l'appel du ministre des finances et des comptes publics, la cour administrative d'appel de Versailles a, toutefois, annulé ce jugement et remis à sa charge les impositions et pénalités litigieuses.

2. Il résulte de l'ensemble des dispositions du livre des procédures fiscales relatives aux opérations de vérification de comptabilité que celles-ci se déroulent chez le contribuable ou au siège de l'entreprise vérifiée. Toutefois, sur la demande écrite du contribuable, le vérificateur peut emporter, dans les bureaux de l'administration qui en devient ainsi dépositaire, certains documents détenus par l'entreprise présentant le caractère de pièces comptables se rattachant à la période vérifiée. En ce cas, il doit remettre à l'intéressé un reçu détaillé des pièces qui lui sont confiées. Cette pratique ne peut avoir pour effet de priver le contribuable des garanties qu'il tient des articles L. 47 et L. 52 du livre des procédures fiscales et qui ont notamment pour objet de lui assurer des possibilités de débat oral et contradictoire avec le vérificateur. Cependant, un document établi postérieurement à la période vérifiée, à la demande du vérificateur et pour les seuls besoins du contrôle, ne peut être regardé comme une pièce comptable se rattachant à la période vérifiée dont l'emport, par le vérificateur, sans demande écrite du contribuable et sans remise d'un reçu, serait de nature à vicier la procédure de contrôle.

3. La cour a estimé, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, que le relevé des ventes réalisées par l'entreprise postérieurement à la période vérifiée, avait été établi par le gérant, à la demande du vérificateur et pour les besoins du contrôle, aux fins de reconstitution à postériori du chiffre d'affaires. Par suite, la cour n'a pas inexactement qualifié ce relevé de ventes en estimant qu'il ne pouvait être regardé comme une pièce comptable. Il en résulte qu'elle n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que l'emport de ce relevé des ventes par le vérificateur, sans demande écrite du contribuable et sans remise d'un reçu, n'avait pas vicié la procédure.

4. Pour demander l'annulation de l'arrêt attaqué, la société Melissa soutient, pour le surplus, en premier lieu, qu'il est entaché d'insuffisances de motivation faute pour la cour d'avoir répondu au moyen tiré de ce que la proposition de rectification du 21 décembre 2006 était insuffisamment motivée en raison de la différence entre les motifs avancés dans cette proposition et ceux de la décision de rejet de sa réclamation contentieuse du 18 juin 2008, en deuxième lieu, que la cour a omis de répondre au moyen tiré de ce que l'administration fiscale aurait pris en compte des factures d'achats pour déterminer des revenus distribués alors que ces factures auraient dû être considérées comme retraçant des charges déductibles, en troisième lieu, qu'elle a également insuffisamment motivé son arrêt en ne répondant pas au moyen selon lequel l'administration fiscale n'avait pas fait droit à sa demande tendant à la communication des pièces ayant servi de fondement à la proposition de rectification du 21 décembre 2006 et, enfin, que la cour a commis une erreur de qualification juridique des faits en jugeant qu'elle avait eu l'intention délibérée de se soustraire à l'impôt. Aucun de ces moyens n'est de nature à justifier l'annulation de l'arrêt attaqué.

5. Il résulte de ce qui précède que la société Melissa n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la société Melissa est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Melissa et au ministre de l'économie et des finances.


Synthèse
Formation : 9ème - 10ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 387398
Date de la décision : 10/02/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-03-01-02-05 CONTRIBUTIONS ET TAXES. GÉNÉRALITÉS. RÈGLES GÉNÉRALES D'ÉTABLISSEMENT DE L'IMPÔT. CONTRÔLE FISCAL. VÉRIFICATION DE COMPTABILITÉ. POUVOIRS DE L'ADMINISTRATION. - EMPORT DE DOCUMENTS - 1) DOCUMENT ÉTABLI POSTÉRIEUREMENT À LA PÉRIODE VÉRIFIÉE, À LA DEMANDE DU VÉRIFICATEUR ET POUR LES SEULS BESOINS DU CONTRÔLE - IRRÉGULARITÉ - ABSENCE [RJ1] - 2) ESPÈCE.

19-01-03-01-02-05 1) Il résulte de l'ensemble des dispositions du livre des procédures fiscales (LPF) relatives aux opérations de vérification de comptabilité que celles-ci se déroulent chez le contribuable ou au siège de l'entreprise vérifiée. Toutefois, sur la demande écrite du contribuable, le vérificateur peut emporter, dans les bureaux de l'administration qui en devient ainsi dépositaire, certains documents détenus par l'entreprise présentant le caractère de pièces comptables se rattachant à la période vérifiée. En ce cas, il doit remettre à l'intéressé un reçu détaillé des pièces qui lui sont confiées. Cette pratique ne peut avoir pour effet de priver le contribuable des garanties qu'il tient des articles L. 47 et L. 52 du LPF et qui ont notamment pour objet de lui assurer des possibilités de débat oral et contradictoire avec le vérificateur.... ,,Cependant, un document établi postérieurement à la période vérifiée, à la demande du vérificateur et pour les seuls besoins du contrôle, ne peut être regardé comme une pièce comptable se rattachant à la période vérifiée dont l'emport, par le vérificateur, sans demande écrite du contribuable et sans remise d'un reçu, serait de nature à vicier la procédure de contrôle.,,,2) Cour ayant estimé souverainement que le relevé des ventes réalisées par l'entreprise au cours de la période soumise à vérification avait été établi par le gérant, à la demande du vérificateur et pour les besoins du contrôle, aux fins de reconstitution a posteriori du chiffre d'affaires. Par suite, absence d'erreur de qualification juridique à estimer que ce relevé ne pouvait être regardé comme une pièce comptable. Absence d'erreur de droit à en déduire que l'emport de ce relevé des ventes par le vérificateur, sans demande écrite du contribuable et sans remise d'un reçu, n'avait pas vicié la procédure.


Références :

[RJ1]

Comp. CE, 29 juillet 1983, S.A. Edouard Knecht, n°s 27794, 27795, 27797, p. 318.


Publications
Proposition de citation : CE, 10 fév. 2017, n° 387398
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Séverine Larere
Rapporteur public ?: Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon
Avocat(s) : SCP FABIANI, LUC-THALER, PINATEL

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:387398.20170210
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