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13/07/1989 | FRANCE | N°89BX00220

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 13 juillet 1989, 89BX00220


Vu la décision en date du 1er décembre 1988, enregistrée au greffe de la cour le 15 décembre 1988, par laquelle le président de la 7ème sous-section de la Section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, le recours présenté pour le MINISTRE CHARGE DU BUDGET contre le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 7 juillet 1987 ;
Vu le recours, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 13 novembre 1987, présenté pour le MINISTRE CHARGE DU BUDGET, et tendant à ce que

le Conseil d'Etat :
1°/ annule le jugement du 7 juillet 1987 par ...

Vu la décision en date du 1er décembre 1988, enregistrée au greffe de la cour le 15 décembre 1988, par laquelle le président de la 7ème sous-section de la Section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, le recours présenté pour le MINISTRE CHARGE DU BUDGET contre le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 7 juillet 1987 ;
Vu le recours, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 13 novembre 1987, présenté pour le MINISTRE CHARGE DU BUDGET, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°/ annule le jugement du 7 juillet 1987 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a accordé à M. Roger X... la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu ainsi que des pénalités y afférentes auxquelles il a été assujetti au titre des années 1980 à 1982,
2°/ remette intégralement l'imposition contestée ainsi que les pénalités correspondantes à la charge de M. Roger X...,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-707 du 9 mai 1988 et le décret 88-906 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 20 juin 1989 :
- le rapport de M. Baixas, conseiller ;
- les observations de M. Roger X... ;
- et les conclusions de M. de Malafosse, commissaire du gouvernement ;

Sur le régime d'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article 69 A du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux années d'imposition : "I. Lorsque les recettes d'un exploitant agricole, pour l'ensemble de ces exploitations, dépassent une moyenne de 500.000 F mesurée sur deux années consécutives, l'intéressé est obligatoirement imposé d'après son bénéfice réel, à compter de la deuxième de ces années" ; qu'aux termes de l'article 38 sexdecies de l'annexe III à ce code : "Les recettes à retenir pour l'appréciation de la limite de 500.000 F prévue à l'article 69 A du code général des impôts s'entendent de toutes les sommes encaissées au cours de l'année civile augmentées de la valeur des produits prélevés dans l'exploitation et alloués soit au personnel salarié, soit au propriétaire du fonds en paiement du fermage" ; que l'article 68 B du même code précise que : "Le régime simplifié d'imposition s'applique : ... b. De plein droit, aux autres exploitants, y compris ceux dont le forfait aura été dénoncé par l'administration, dont les recettes n'excèdent pas le double de la limite prévue à l'article 69 A pour l'imposition obligatoire d'après le bénéfice réel ..." que, pour l'application de ces textes, doivent être regardées comme encaissées au cours d'une année toutes les sommes provenant de la commercialisation de la récolte mises à la disposition du contribuable soit par voie de paiement, soit par voie d'inscription au crédit d'un compte courant sur lequel l'intéressé a opéré ou aurait pu, en fait et en droit, opérer un prélèvement au plus tard le 31 décembre de ladite année ;
Considérant que M. Roger X..., exploitant agricole à Buzet-sur-Baïse, a été assujetti, au titre des années 1980 à 1982, à des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu qui procèdent, en ce qui concerne la détermination des bénéfices imposables de son exploitation agricole, de la substitution, pour les années 1980 à 1981, du régime d'imposition selon le bénéfice réel simplifié et, pour l'année 1982, du régime d'imposition selon le bénéfice réel à celui du forfait légal à laquelle l'administration a procédé en se fondant sur ce que les recettes tirées par l'intéressé de son exploitation avaient dépassé au cours des deux années 1980 et 1981, le seuil de 500.000 F prévu par les dispositions précitées de l'article 69 A du code général des impôts et, au cours de l'année 1982, le seuil de 1.000.000 F fixé par les dispositions précitées de l'article 68-B-b de ce code ;

Considérant qu'il est constant que le compte dont M. Roger X... était titulaire dans les écritures de la société de conditionnement des arboriculteurs de Tonneins a été débité à la fin des mois de décembre 1978, 1979 et 1980 respectivement des sommes de 200.150 F, 160.000 F et 80.000 F ; que ces sommes, qui provenaient de la répartition entre les différents sociétaires d'un prêt obtenu par la société après warrantage des récoltes de ces années, ne pouvaient avoir le caractère de recettes encaissées, au sens des dispositions précitées du code, dès lors que la commercialisation des récoltes en cause n'avait pas été effectuée à la date de l'inscription de ces sommes au débit du compte ; que si certains sociétaires, parmi lesquels figurait le requérant, avaient, pour éviter d'avoir à supporter des frais financiers, la possibilité de rétrocéder ces sommes à la société, cette rétrocession n'a pu avoir pour conséquence de modifier la nature des sommes ainsi débitées ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les récoltes ainsi warrantées ont été commercialisées au cours des années 1979, 1980 et 1981 ; que les recettes provenant de cette commercialisation ont été, au cours des mêmes années, inscrites au crédit du compte du requérant ; que les sommes ainsi créditées ont été entièrement encaissées, au cours de chacune des années en cause, par M. Roger X... soit sous forme de prélèvements directs, soit sous forme de remboursements de la rétrocession ci-dessus décrite ; que les encaissements ainsi effectués ont été inscrits au débit du compte de l'intéressé ; que les montants des sommes ainsi débitées et créditées sur le compte en cause sont identiques ; que dès lors, les membres de la société devaient ranger dans leurs recettes annuelles toutes les sommes dont leur compte courant était crédité et n'en point déduire ou ajouter les sommes dont ils avaient été débités respectivement au cours de l'année précédente et au cours de la même année au titre du prêt obtenu par warrantage de la récolte ;
Considérant qu'il est constant que, pour l'année 1982, les sommes inscrites au débit et au crédit du compte de M. Roger X... sont identiques dès lors qu'aucune avance sur récolte n'a été sollicitée à ce titre ; que par suite, la méthode utilisée par l'administration pour reconstituer les recettes de cette année et qui a consisté, comme pour les autres années, à retenir toutes les sommes dont le compte courant a été crédité, ne peut être considérée comme radicalement viciée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, pour décharger M. Roger X... des impositions supplémentaires litigieuses, le tribunal administratif de Bordeaux s'est fondé d'une part sur ce que le montant net des sommes portées au débit de son compte n'excédait pas 500.000 F pour chacune des années 1980 à 1981 et d'autre part, sur la constatation que la méthode de reconstitution des recettes de l'année 1982 était radicalement viciée ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la cour saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. Roger X... ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition des années 1979, 1980 et 1981 :

Considérant d'une part, qu'il résulte de l'instruction qu'aucun redressement n'a été notifié au titre de 1979 à M. Roger X... ; que dès lors, le moyen selon lequel les redressements relatifs à cette année procèderaient d'une vérification irrégulièrement réalisée sans que le requérant en ait été avisé, manque en fait ;
Considérant d'autre part, que la demande de renseignements, par laquelle le service a demandé à M. Roger X..., le 17 octobre 1983, s'il tenait une comptabilité et la nature des pièces ou documents comptables en sa possession, ne saurait être considérée comme ayant marqué le début des opérations de vérification de la comptabilité ; qu'il est constant que la vérification de la comptabilité des années 1980, 1981 et 1982 a été régulièrement effectuée après que le contribuable en ait été avisé le 7 février 1984 ; que dès lors, M. Roger X... n'est pas fondé à soutenir que la vérification de la comptabilité des années 1980 et 1981 a été entreprise avant l'envoi de l'avis prévu à l'article L.47 du livre des procédures fiscales ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les suppléments d'impôt sur le revenu, auxquels M. Roger X... a été assujetti au titre des années 1980 à 1982, ont été à bon droit calculés sur la base d'un bénéfice agricole réel évalué d'office ;
Considérant que ce bénéfice a été déterminé en prenant en considération les recettes encaissées telles qu'elles ont été définies ci-dessus, les charges non contestées de l'exploitation agricole et la variation des stocks évalués de récoltes en début et en fin d'année ; que l'intéressé, à qui incombe la charge de la preuve de l'exagération de la base d'imposition ainsi évaluée, soutient que la méthode de reconstitution, ci-dessus décrite, est radicalement viciée dans son principe dès lors qu'elle prend en considération la variation d'un stock de fruits dont il n'est plus propriétaire et que la valeur des stocks d'entrée et de sortie ne pouvait être évaluée à partir de la valeur des apports inscrite au crédit de son compte, en juin de chacune des années en cause, soit à une date à laquelle les fruits en question étaient vendus ;
Considérant d'une part, que M. Roger X... soutient que la société de conditionnement des arboriculteurs de Tonneins, agissant exclusivement comme mandataire pour le compte de ses sociétaires, n'effectue aucun achat et aucune revente pour son compte et reçoit uniquement des apports ; qu'il est constant que la récolte d'une année considérée n'est commercialisée qu'au cours de l'année suivante ; que dès lors, en se fondant sur les dispositions de l'article 11 du règlement intérieur de cette société, qui précisent que le sociétaire perd la propriété de ses fruits dès qu'il les lui apporte, M. Roger X... n'établit pas que la prise en considération de la variation des récoltes à commercialiser en fin et début d'exercice vicie radicalement la méthode de reconstitution du service ;

Considérant d'autre part, qu'à défaut d'autres éléments en sa possession le service a pu évaluer les récoltes à commercialiser à partir de la valeur d'apport de ces récoltes telle qu'elle a été comptabilisée en juin de chacune des années en cause ; qu'en faisant valoir qu'à cette dernière date les fruits étaient déjà vendus M. Roger X... n'établit pas que la valeur des stocks d'entrée et de sortie retenue par le service est erronée ; qu'il ne propose aucune autre méthode de reconstitution des bénéfices litigieux ; que dès lors, il n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de l'exagération des bases d'imposition qu'il conteste ;
Sur les pénalités :
Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles 1728 et 1729 du code général des impôts que la majoration de 50 % prévue à l'article 1729, tel qu'il était rédigé au cours des années litigieuses, n'est applicable que lorsque la mauvaise foi du redevable est établie ; qu'il appartient à l'administration d'établir cette mauvaise foi ; qu'en soutenant que l'opération, qui a consisté à assimiler des liquidités, obtenues par la société de conditionnement auprès d'un organisme financier, à des recettes provenant de la vente de la récolte, met en évidence la volonté du contribuable de se maintenir en deçà de la limite du forfait agricole alors qu'il est constant que le montant réel des récoltes des années litigieuses dépassait cette limite, l'administration établit la mauvaise foi de M. Roger X... au titre de 1980 à 1982 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE CHARGE DU BUDGET est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué ; le tribunal administratif de Bordeaux a accordé à M. Roger X... la décharge des impositions et pénalités contestées ;
Article 1er : Le jugement du 7 juillet 1987 du tribunal administratif de Bordeaux est annulé.
Article 2 : Les compléments d'impôt sur le revenu ainsi que les pénalités correspondantes auxquels M. Roger X... a été assujetti au titre des années 1980 à 1982 sont intégralement remis à sa charge.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-02-04-03 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES AGRICOLES - REGIME DU BENEFICE REEL


Références :

. CGI Livre des procédures fiscales L47
. CGIAN3 38 sexdecies
CGI 69 A, 68 B, 1728, 1729


Publications
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Baixas
Rapporteur public ?: de Malafosse

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Date de la décision : 13/07/1989
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 89BX00220
Numéro NOR : CETATEXT000007473344 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;1989-07-13;89bx00220 ?
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