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30/11/1989 | FRANCE | N°89BX00643

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 30 novembre 1989, 89BX00643


Vu la décision en date du 2 janvier 1989, enregistrée au greffe de la cour le 19 janvier 1989, par laquelle le président de la 8ème sous-section de la Section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée pour M. Alain Y... ;
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés le 4 mai 1988 et le 1er septembre 1988 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Alain Y..., demeurant au lieu-dit "Lazinière" à Castres (81100) et tendant à

ce que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement du 24 février 1988 pa...

Vu la décision en date du 2 janvier 1989, enregistrée au greffe de la cour le 19 janvier 1989, par laquelle le président de la 8ème sous-section de la Section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée pour M. Alain Y... ;
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés le 4 mai 1988 et le 1er septembre 1988 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Alain Y..., demeurant au lieu-dit "Lazinière" à Castres (81100) et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement du 24 février 1988 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu ainsi que des pénalités y afférentes auxquelles il a été assujetti au titre des années 1981 à 1983 dans les rôles de la commune de Castres, département du Tarn ;
- lui accorde la décharge des impositions et pénalités contestées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ; le décret n° 88-707 du 9 mai 1988 et le décret n° 88-906 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 19 octobre 1989 :
- le rapport de M. VINCENT, conseiller ;
- les observations de la S.C.P. WAQUET - FARGE, avocat de M. Y... ;
- et les conclusions de M. LABORDE, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. Y... conteste les cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1981 à 1983 à raison de la réintégration dans les résultats de la S.N.C. "Fondere et Cie", dont il est associé majoritaire, des charges que ladite société avait déduites consécutivement aux travaux effectués sur le barrage dont celle-ci a reçu la concession jusqu'au 31 décembre 2000 ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant, d'une part, que le moyen selon lequel le jugement attaqué serait irrégulier en la forme en tant qu'il n'aurait pas répondu à l'ensemble des moyens soulevés n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ; que, par suite, ce moyen n'est pas recevable ;
Considérant, d'autre part, qu'il ressort dudit jugement que ce dernier a notamment précisé la nature des travaux litigieux et leur coût ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que ledit jugement serait insuffisamment motivé en tant qu'il a regardé les travaux effectués comme ayant seulement pour effet de permettre un fonctionnement normal de l'ouvrage dans sa consistance initiale et ayant pour conséquence de prolonger notablement la durée d'utilisation de l'ouvrage concédé ne saurait être accueilli ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant que le requérant n'apporte aucun élément de preuve à l'appui de ses allégations selon lesquelles les notifications de redressements qui lui ont été adressées ne seraient pas suffisamment motivées ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que lesdites notifications soient insuffisamment motivées ; qu'ainsi, ce moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 38-2 du code général des impôts : "Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt, diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés" ; qu'aux termes de l'article 39-1 du même code : "Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant ...1° Les frais généraux de toute nature ..." ; qu'il découle des dispositions susvisées des articles 38-2 et 39-1 du code général des impôts que, sous réserve de la faculté de pratiquer des amortissements, ne constituent des charges déductibles des résultats, ni les dépenses qui ont, en fait, pour conséquence l'entrée d'un nouvel élément dans l'actif immobilisé d'une entreprise, ni les dépenses qui entraînent normalement une augmentation de la valeur pour laquelle un élément immobilisé figure à son bilan, ni les dépenses qui ont pour effet de prolonger d'une manière notable la durée probable d'utilisation d'un élément de cette nature ; qu'en revanche, constituent des charges déductibles les dépenses qui n'ont d'autre objet que de maintenir un élément de l'actif dans sa consistance initiale sans accroître notablement sa durée probable d'utilisation ;

Considérant que les travaux auxquels la société "Fondere et Cie" a fait procéder pendant les années litigieuses ont consisté, d'une part, en l'installation à l'amont du barrage d'un rideau de palplanches, solidarisé au barrage au moyen d'ancrages en métal et de béton coulé entre les palplanches et le barrage, d'autre part, en l'immersion en aval de blocs d'enrochement reliés au niveau de l'eau par un voile de béton ; que, s'il n'est pas contesté que les travaux effectués en amont ont eu pour origine la découverte d'une fuite sous le barrage, il résulte de l'instruction que ceux-ci, qui ont en définitive porté sur une longueur totale de quatre-vingt-seize mètres, soit près de 90 % de la longueur totale du barrage, ont manifestement excédé, de par leur ampleur, la simple réparation de la fuite décelée ; que les aménagements ainsi effectués ont d'ailleurs été qualifiés de "travaux confortatifs importants" par l'entreprise qui les a réalisés ; que les travaux effectués en aval, décidés en raison des affouillements du mur de parement découverts lors de l'examen du barrage provoqué par la constatation de la fuite, ont eu pour objet de remédier durablement aux désordres créés par l'action des eaux ; que la consolidation d'ensemble dont le barrage a fait l'objet a ainsi constitué des dépenses d'investissement complémentaire ayant abouti à prolonger notablement la durée probable d'utilisation de cet ouvrage ; que ni la circonstance qu'une solution plus complète et plus onéreuse avait été envisagée concernant le renforcement de l'ouvrage en aval, ni celle que la société "Fondere et Cie" était tenue d'entretenir le barrage jusqu'au terme de la concession, ni le fait que les travaux constatés, qui n'ont à aucun moment été présentés comme ayant un caractère précaire ou provisoire, n'auraient pas mis totalement un terme à la fuite constatée, ne sont de nature à faire regarder lesdits travaux comme n'ayant eu d'autre objet que de permettre un fonctionnement normal de l'ouvrage dans sa consistance initiale ; qu'il s'ensuit que c'est à bon droit que l'administration a considéré que lesdits travaux ne pouvaient donner lieu qu'à la constitution d'amortissements ; qu'il résulte de ce qui précède que le requérant ne saurait utilement se prévaloir, sur le fondement de l'article 1649 quinquies E du code général des impôts repris à l'article L 80 A du livre des procédures fiscales, des dispositions d'une réponse du ministre chargé du budget à M. X..., sénateur, publiée au journal officiel des débats du Sénat le 17 juin 1982, aux termes de laquelle les dépenses d'entretien et de réparations, mêmes importantes, peuvent être déduites intégralement du résultat de l'exercice au cours duquel elles ont été exposées ;
Considérant toutefois qu'il n'est pas contesté que les travaux nécessités par le décollement partiel de l'écran de palplanches, effectués en 1983 pour un montant de 35.000 F, présentent le caractère de véritables réparations ; que, dès lors, le requérant est fondé à demander la décharge des suppléments d'imposition auxquels il a été assujetti à raison de la réintégration de cette somme dans les résultats de la société "Fondere et Cie" ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 39 D du code général des impôts : "L'amortissement des constructions et aménagements édifiés sur le sol d'autrui doit être réparti sur la durée normale d'utilisation de chaque élément ... " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'entreprise qui édifie des constructions ou aménagements sur le sol d'autrui doit en porter le prix de revient à l'actif de ses bilans, alors même que ses droits sur ces constructions ou aménagements ne sont pas ceux d'un propriétaire, puis pratiquer sur ces éléments corporels des amortissements dont le taux tienne compte uniquement de leur durée normale d'utilisation ; qu'ainsi M. Y... ne saurait valablement invoquer la circonstance que les ouvrages litigieux doivent faire retour à l'Etat en fin de concession pour prétendre qu'ils n'ont pas accru l'actif de l'entreprise et ne sauraient, par suite, faire l'objet d'amortissements ;
Sur les pénalités :
Considérant que le requérant soutient qu'aucune pénalité ne peut être mise à sa charge, dès lors que les pénalités mentionnées dans les avis d'imposition n'ont été motivées, ni dans lesdits avis d'imposition, ni dans un quelconque document antérieur ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que l'intéressé a effectivement reçu la lettre en date du 9 août 1984 par laquelle l'administration a motivé la mise à sa charge d'intérêts de retard ; qu'ainsi le moyen susvisé manque en fait ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Y... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse ne lui a pas accordé la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1983 à raison de la réintégration dans les résultats de la S.N.C. "Fondere et Cie" d'une somme de 35.000 F correspondant à des travaux de réparation de l'ouvrage par celle-ci ;
Article 1er : Les bases d'imposition de M. Y... à l'impôt sur le revenu sont réduites au titre de l'année 1983 de la fraction de la somme de 35.000 F correspondant au nombre de parts qu'il détient dans la S.N.C. "Fondere et Cie" .
Article 2 : M. Y... est déchargé de la différence entre le montant des droits et pénalités auxquels il a été assujetti et celui résultant des rectifications de base opérées par le présent arrêt.
Article 3 : Le jugement susvisé du tribunal administratif de Toulouse en date du 24 février 1988 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Y... est rejeté.


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