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06/12/1990 | FRANCE | N°89BX00618

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 06 décembre 1990, 89BX00618


Vu la décision en date du 2 janvier 1989, enregistrée au greffe de la cour le 19 janvier 1989, par laquelle le président de la 8ème sous-section de la Section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée par M. Jean-Marc BENEIX contre le jugement du tribunal administratif de Limoges du 1er avril 1987 ;
Vu la requête et le mémoire ampliatif, enregistrés respectivement les 15 juin et 14 octobre 1987 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. X... deme

urant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
- annule le ju...

Vu la décision en date du 2 janvier 1989, enregistrée au greffe de la cour le 19 janvier 1989, par laquelle le président de la 8ème sous-section de la Section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée par M. Jean-Marc BENEIX contre le jugement du tribunal administratif de Limoges du 1er avril 1987 ;
Vu la requête et le mémoire ampliatif, enregistrés respectivement les 15 juin et 14 octobre 1987 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. X... demeurant ..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement du 1er avril 1987 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu ainsi que des pénalités y afférentes auxquelles il a été assujetti au titre des années 1977 à 1980 ;
- lui accorde la décharge sollicitée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 novembre 1990 :
- le rapport de M. BAIXAS, conseiller ; - les observations de M. BENEIX ; - et les conclusions de M. de MALAFOSSE, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'il résulte de l'examen du jugement attaqué que le tribunal en indiquant que "l'administration ... n'était pas tenue d'établir une balance de trésorerie" a répondu au moyen tiré par le requérant de l'absence de balance ; que, par suite, M. BENEIX n'est pas fondé à soutenir que le tribunal administratif aurait entaché son jugement d'une omission à statuer
Sur la régularité de la procédure de vérification :
Considérant, en premier lieu, que M. BENEIX n'établit pas ainsi qu'il l'affirme que les résultats de la vérification approfondie de sa situation fiscale d'ensemble reposent sur les résultats de la vérification de comptabilité dont il a fait l'objet ; qu'il résulte, au contraire, de l'instruction qu'aucun redressement n'a été effectué à la suite de la vérification de sa comptabilité et que les seuls redressements notifiés l'ont été à la suite de la vérification approfondie de sa situation fiscale d'ensemble et correspondent à des sommes dont l'origine est demeurée indéterminée ; que, si la méthode utilisée pour déterminer le montant des revenus dont l'origine demeure indéterminée prend en considération les recettes et les charges déclarées, elle n'a pas pour objet de contrôler l'exactitude desdites recettes et charges ; que dans ces conditions et contrairement à ce que soutient M. BENEIX les redressements effectués ne peuvent être considérés comme procédant directement et nécessairement de l'examen de la comptabilité ; que, dès lors, le moyen, à le supposer fondé, tiré de l'irrégularité de la procédure de vérification de comptabilité est inopérant en l'espèce ;
Considérant, en second lieu, qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne conditionne la réalisation d'une vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble à l'intervention d'un agent ayant au moins le grade d'inspecteur principal ; que, dès lors, la circonstance, à la supposer établie, qu'aucun agent ayant au moins ce grade ne serait intervenu dans la réalisation de la vérification litigieuse est sans influence sur la régularité de la procédure de contrôle ;
Considérant, enfin, qu'il résulte de l'instruction que conformément aux dispositions de l'article L 47 du livre des procédures fiscales l'administration a, par un avis du 14 octobre 1981, averti le contribuable de la faculté qu'il avait de se faire assister du conseil de son choix au cours de la vérification de sa situation fiscale d'ensemble ; que contrairement à ce que soutient M. BENEIX le vérificateur n'était nullement tenu d'effectuer la totalité des opérations de contrôle soit en sa présence soit en celle de son conseil ; qu'ainsi le moyen tiré par le requérant de ce que la vérification aurait été partiellement exécutée en son absence ou celle de son conseil ne peut être accueilli ;
Sur le bien-fondé des impositions établies au titre des années 1977 et 1978 :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. BENEIX a régulièrement souscrit la déclaration de son revenu global des années 1977 et 1978 et n'a pas accepté les redressements qui lui ont été notifiés à ce titre selon la procédure de redressement contradictoire ;

Considérant que, si l'administration relève que le vérificateur aurait pu faire connaître à M. BENEIX pour ces deux années, les nouvelles bases imposables par voie de taxation d'office, elle ne saurait par cette simple mention être regardée comme ayant entendu se prévaloir devant le juge de l'impôt des dispositions de l'article 179 du code général des impôts reprises à l'article L 69 du livre des procédures fiscales dont elle n'a pas fait application ; que, dès lors, et, dans le cadre de cette procédure contradictoire c'est à elle qu'il appartient d'établir que les sommes qu'elle entend imposer à l'impôt sur le revenu en sus des revenus déclarés ont le caractère de revenus imposables dans une catégorie déterminée ; que, si elle soutient que tel est le cas pour un investissement de 200.000 F que le requérant a fait en 1977 ainsi que pour les sommes de 54.320 F et de 31.600 F qui correspondaient à des moyens de financement dont M. BENEIX a disposé au cours des années 1977 et 1978, l'absence de précisions fournies au service par le contribuable sur l'origine de ces sommes ne suffit pas à elle seule à établir qu'il s'agirait de revenus imposables rattachables à une catégorie précise qu'il suit de là que M. BENEIX est fondé à soutenir que le tribunal administratif a, à tort, rejeté sa demande en décharge des compléments d'impositions pour les années 1977 et 1978 ;
Sur la régularité et le bien-fondé des impositions établies au titre des années 1979 et 1980 :
Considérant, que selon les dispositions combinées des articles 176 et 179 du code général des impôts reprises aux articles L 16 et L 69 du livre des procédures fiscales, est taxé d'office à l'impôt sur le revenu tout contribuable qui s'est abstenu de répondre dans le délai de trente jours aux demandes d'éclaircissements ou de justifications que l'administration peut lui adresser lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés ; qu'il résulte de l'instruction que M. BENEIX s'est borné à répondre à la demande de justifications qui lui a été adressée au titre des années 1979 et 1980 en indiquant qu'un délai supplémentaire d'un mois lui était nécessaire pour satisfaire à cette demande sans fournir aucune explication précise ni joindre aucun document ; qu'à l'expiration de ce délai, aucune explication ou justification complémentaire n'ayant été fournie par M. BENEIX, l'administration a pu, à bon droit, estimer que l'intéressé n'avait pas satisfait aux prescriptions de l'article L 16 du livre des procédures fiscales et dès lors le taxer d'office en application des dispositions susmentionnées de l'article L 69 du même livre ; que, par suite, en application des dispositions de l'article 181 B du code général des impôts repris à l'article L 193 du livre des procédures fiscales il appartient à M. BENEIX d'apporter la preuve de leur exagération ;

Considérant que le dépouillement des comptes bancaires de M. BENEIX effectué par le service a fait apparaître, d'une part, que certaines années l'intéressé avait effectué des remises de chèques et d'espèces pour un montant supérieur aux recettes déclarées, d'autre part, qu'une partie des dépenses professionnelles avait été payées en espèces dès lors que le montant retenu de ces dépenses pour la fixation du bénéfice professionnel était supérieur à celui des mêmes dépenses payées par chèques et, enfin, que les liquidités dont M. BENEIX avait disposé, compte tenu des constatations qui précèdent et des retraits en espèces effectués sur les comptes bancaires, étaient insuffisantes pour financer ses dépenses courantes de train de vie ; que par ces constatations qui ne sont pas contestées l'administration établit que M. BENEIX a disposé de moyens de financement dont l'origine demeure inexpliquée ; que, dès lors, il appartient à M. BENEIX de justifier l'origine des fonds ainsi utilisés qui s'élèvent à 15.100 F en 1979 et 40.900 F en 1980 ;
Considérant, en premier lieu, qu'il est constant qu'aucun redressement n' a été effectué au titre des revenus professionnels ; que, dès lors, M. BENEIX n'est pas fondé à soutenir qu'à la suite d'une confusion entre les revenus catégoriels et non catégoriels des sommes déposées en liquide sur un livret de caisse d'épargne ont été indûment incorporées aux revenus catégoriels ; que le fait que le service lui ait demandé de justifier l'origine des dépôts effectués n'établit pas que les sommes en cause ont fait l'objet d'une double imposition ;
Considérant, en second lieu, que, si M. BENEIX soutient que le vérificateur a fait une évaluation excessive de ses dépenses courantes de "train de vie" en les fixant respectivement à 31.000 F en 1979 et 35.000 F en 1980, il n'apporte aucune justification à l'appui de cette allégation ;
Considérant, en troisième lieu, que M. BENEIX n'établit pas qu'il avait encore la disposition au début des années vérifiées du retrait de 63.907 F qu'il a effectué en espèces en mars 1976 sur un compte d'épargne ouvert auprès du crédit agricole ; qu'il en est de même de la somme de 20.000 F qui correspondrait au solde d'un retrait de 220.000 F effectué le 18 août 1976 ; qu'il n'établit pas plus qu'il aurait conservé la disposition des sommes de 105.000 F provenant de la vente d'un terrain à Brive effectuée le 14 juin 1974 et de 30.000 F provenant de la vente d'un terrain à St Viance effectuée le 30 juin 1976 ; que, dès lors, M. BENEIX n'est pas fondé à justifier par ces sommes l'insuffisance de moyens de financement relevée par l'administration ;
Considérant, en quatrième lieu, que les intérêts de 6.074 F qui ont été versés sur le comte de M. BENEIX par la banque Tarneaud en 1977 et qu'il a déclarés au titre des revenus de capitaux mobiliers afférents à cette même année, ne peuvent être pris en considération parmi les disponibilités dont il a disposé dès lors que le requérant ne produit aucun document établissant qu'il aurait retiré en espèces lesdits intérêts et ne conteste pas l'affirmation de l'administration selon laquelle aucun retrait en espèces n'a été effectué en 1977 ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'il résulte de l'instruction que le service, pour déterminer les montants contestés des revenus d'origine indéterminée, a pris en considération les loyers perçus par M. BENEIX au cours des années vérifiées ; que, dès lors, M. BENEIX n'est pas fondé à se prévaloir de ces loyers pour justifier les disponibilités dont il a disposé et dont l'origine demeure inexpliquée ;
Considérant, enfin, que M. BENEIX n'est pas fondé à soutenir que les discordances relevées au cours des quatre années vérifiées en ce qui concerne les excédents de recettes et le financement des dépenses font apparaître une insuffisance de moyens de financement qui n'est globalement pas significative ; qu'en effet, une telle globalisation qui aboutit à justifier des revenus dont l'origine est demeurée inexpliquée au titre d'une année donnée par des excédents de recettes qui sont apparus au cours des années postérieures, ne peut être admise ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. BENEIX n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort pour les années 1979 et 1980, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande ;
Article 1er : M. BENEIX est déchargé des compléments d'impôt sur le revenu ainsi que des pénalités y afférentes auxquels il a été assujetti au titre des années 1977 et 1978.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Limoges en date du 1er avril 1987 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. BENEIX est rejeté.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - CONTROLE FISCAL - VERIFICATION APPROFONDIE DE SITUATION FISCALE D'ENSEMBLE.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - PROCEDURE CONTENTIEUSE - DEMANDES ET OPPOSITIONS DEVANT LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF - REGULARITE DE LA PROCEDURE - DIVERS.

PROCEDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - QUESTIONS GENERALES - SUBSTITUTION DE BASE LEGALE.


Références :

CGI 179, 176, 181 B
CGI Livre des procédures fiscales L47, L69, L16, L193


Publications
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: BAIXAS
Rapporteur public ?: de MALAFOSSE

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Date de la décision : 06/12/1990
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 89BX00618
Numéro NOR : CETATEXT000007474571 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;1990-12-06;89bx00618 ?
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