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07/03/1991 | FRANCE | N°89BX01098

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 07 mars 1991, 89BX01098


Vu la décision en date du 19 janvier 1989, enregistrée au greffe de la cour le 3 mars 1989, par laquelle le président de la 7ème sous-section de la Section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée le 1er août 1988 pour la SARL POMPADOUR ;
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat respectivement le 1er août et le 30 novembre 1988 pour la SARL POMPADOUR qui demande que le Conseil d'Etat

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1°) réforme le jugement en date du 1er juin 1988, par lequel le ...

Vu la décision en date du 19 janvier 1989, enregistrée au greffe de la cour le 3 mars 1989, par laquelle le président de la 7ème sous-section de la Section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée le 1er août 1988 pour la SARL POMPADOUR ;
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat respectivement le 1er août et le 30 novembre 1988 pour la SARL POMPADOUR qui demande que le Conseil d'Etat :
1°) réforme le jugement en date du 1er juin 1988, par lequel le tribunal administratif de Poitiers n'a fait droit que partiellement à sa demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires et les droits de TVA à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1979 à 1982 ;
2°) lui accorde la décharge des impositions encore en litige ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 janvier 1991 :
- le rapport de M. ROYANEZ, conseiller ; - les observations de Me MADY, substituant Me MEUNIER avocat de la société POMPADOUR ; - et les conclusions de M. CATUS, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SARL POMPADOUR, qui exploite à Niort un commerce de vêtements, soutient que la procédure de rectification d'office dont elle a fait l'objet au titre de l'impôt sur les bénéfices industriels et commerciaux pour les années 1979 à 1982 est entachée d'irrégularités et conteste le bien-fondé des impositions mises à sa charge au titre de ces années ;
Sur la regularite de la procédure d'imposition et la charge de la preuve :
Considérant que si, comme le soutient la société requérante, le compte-caisse n'a été mis en conformité avec le solde figurant réellement en caisse, en fin d'exercice, par des ajustements ayant pour contre-partie le compte-courant de la gérante, que pour les seules années 1980 à 1982, à l'exclusion de l'année 1979 ; il résulte de l'instruction qu'à cette irrégularité, qui à elle seule, compte-tenu de l'importance des prélèvements est de nature à enlever tout caractère probant à la comptabilité de l'entreprise pour les années considérées, s'ajoutent pour l'ensemble de la période vérifiée, un compte d'exploitation qui n'enregistrait que les seuls encaissements de l'exercice, un brouillard de caisse qui n'enregistrait ni les dépenses sociales payées en espèce, ni les prélèvements effectués par la gérante et dont les recettes n'étaient pas appuyées de pièces justificatives, des créances sur clients qui n'étaient retracées qu'en fin d'année sans qu'il soit possible d'en vérifier l'exactitude ; que le livre de recettes ne permettait pas d'identifier les articles vendus et qu'enfin le livre d'inventaire et le document extra-comptable, tenu par le contribuable à cet effet, ne permettaient pas de déterminer les stocks ; qu'ainsi l'administration était en droit de rejeter la comptabilité de la SARL POMPADOUR comme irrégulière et non probante et de rectifier d'office les résultats de cette société pour l'ensemble des années 1979 à 1982 ; qu'il appartient dès lors au contribuable d'apporter la preuve de l'exagération de l'évaluation de ses bases d'imposition ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant que la SARL POMPADOUR conteste la reconstitution de ses recettes et la réintégration par l'administration dans ses résultats imposables des provisions qu'elle avait déduites, ainsi que la partie de la rémunération perçue par la gérante en 1982 que le vérificateur a estimée exagérée ;
En ce qui concerne l'ensemble de la période d'imposition :
Sur la reconstitution des recettes :

Considérant que le vérificateur a reconstitué les recettes de la société requérante en sélectionnant, lors de la vérification effectuée sur place, un échantillon de 134 articles qui dégageait, entre les achats revendus "HT" et le montant des recettes "TTC", un coefficient moyen de marge brute de 2,322 ; que pour tenir compte des articles soldés dont l'importance a été estimée à 20 % en 1979 et 15 % les années suivantes, le vérificateur a ramené ce coefficient à 2,193 en 1979 et 2,225 pour les années 1980, 1981 et 1982 ; que les premiers juges, ayant estimé qu'il convenait de tenir compte d'une marge différente entre les articles d'été et ceux d'hiver, ainsi que de l'évolution de l'activité de la société requérante, ont ramené ces coefficients à 2,135 pour 1979 et 2,164 pour les autre années ;
Considérant que si le contribuable soutient en premier lieu que la méthode utilisée par le vérificateur est excessivement sommaire, il résulte de l'instruction que les 134 articles composant l'échantillon sont représentatifs de l'activité de l'entreprise, que les erreurs qui affecteraient le prix d'achat ou le prix de vente de quatre articles, à les supposer établies, sont minimes et n'ont qu'une incidence marginale sur les taux des coefficients finalement retenus, qu'il n'y a pas lieu de tenir compte des provisions pour dépréciation comptable de stocks dès lors que la méthode de reconstitution ne prend en compte que les achats effectivement revendus ; qu'enfin si la société requérante allègue, que le vérificateur n'a pas tenu compte dans la reconstitution de ses recettes des périodes de blocage de prix, elle n'établit pas que cela ait conduit à des coefficients de marge brute inférieurs à ceux finalement retenus ;
Considérant que la société requérante soutient en second lieu que cette méthode est également radicalement viciée dans ses résultats, dans la mesure où ces coefficients qui s'appliquent à différentes catégories d'articles n'auraient pas été pondérés ; que toutefois elle n'établit pas que l'échantillon retenu par le vérificateur comportait des catégories d'articles de nature très différente qui auraient rendu nécessaire une pondération des coefficients de marge brute concernant ces catégories ; qu'à l'inverse il résulte de l'instruction que les coefficients de chacun des articles de l'échantillon ne varient que très faiblement d'un article à l'autre et ne rendent pas nécessaire une pondération ;
Sur les provisions pour dépréciation de stocks :
Considérant que l'administration a sur le fondement des articles 39-I 5°) et 38-3 du code général des impôts, rendus applicables aux société par l'article 209 du même code, réintégré à la clôture de chaque exercice en litige les provisions forfaitaires pour dépréciation de stocks que la SARL POMPADOUR n'était pas en mesure de justifier ; que toutefois devant les juges de première instance, cette société a produit un constat d'huissier établissant que 7,5 % des achats de l'année n'étaient toujours pas revendus six ans après et étaient, dans ce genre de commerce, difficilement commercialisables ; qu'ainsi les premiers juges ont admis une dépréciation forfaitaire des stocks qui devait être provisionnée à la hauteur de 7,5 % des achats de chacune des années et des cinq années antérieures à l'exercice 1979 ;

Considérant d'une part que si la requérante soutient que cette méthode remet en cause l'intangibilité du bilan du dernier exercice prescrit, dont les résultats doivent se retrouver à l'ouverture du bilan du premier exercice non prescrit, ce moyen manque en fait dans la mesure où la remise en cause partielle des provisions des années antérieures à 1979 n'a été effectuée qu'à la clôture de l'exercice 1979 ; que si d'autre part, la requérante soutient que le montant des provisions admis par les premiers juges est insuffisant, elle n'apporte à l'appui de ses allégations aucune justification permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
Sur la rémunération de la gérante :
Considérant qu'aux termes de l'article 39-1 du code général des impôts en vigueur pour les exercices litigieux : "Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprennent ... notamment : 1°) les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main d'oeuvre. Toutefois les rémunérations ne sont admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu ..." ;
Considérant que la société requérante qui, comme il a été dit ci-dessus, a la charge de prouver l'exagération de l'évaluation de ses bases d'impositions, soutient que la réintégration de la somme de 40.000 F faisant partie de la rémunération de la gérante, jugée excessive par l'administration dans ses résultats de l'année 1982, n'est pas fondée ; que toutefois, il résulte de l'instruction que la rémunération de la gérante de cette SARL a augmenté de 37 % alors que les salaires des autres employés n'augmentaient que de 13 %, que la société n'est en mesure de justifier cette augmentation de salaire ni par l'accroissement des tâches dévolues à sa dirigeante, ni par un accroissement de ses résultats imposables, que par suite, c'est à bon droit que l'administration a limité l'augmentation de la rémunération de la gérante à 13 % et a réintégré la différence dans les bases d'imposition de la société requérante ;
En ce qui concerne les années 1980 et 1981 :
Considérant qu'il n'est pas contesté que l'insuffisance des recettes de l'exercice 1980 a été déterminée en globalisant les achats des exercices 1980 et 1981 ; que la méthode ainsi utilisée qui ne respecte pas la règle de la spécificité des exercices doit être considérée comme radicalement viciée dans son principe ; que dès lors la SARL POMPADOUR est fondée à demander l'annulation des redressements résultant des minorations des recettes effectuées au titre de l'année 1980 ;
Considérant que le ministre oppose sur le fondement de l'article 1955 du code général des impôts, alors en vigueur, la compensation entre le dégrèvement accordé ci-dessus et les insuffisances de recettes qui résulteraient de l'application aux achats revendus de l'année concernée du coefficient 2,164 fixé par les juges de première instance ; que toutefois par le calcul qu'il avance sans y joindre la moindre pièce justificative et qui se fonde sur des chiffres contestés par le contribuable, le ministre n'établit pas l'existence d'une minoration de recettes au titre de l'année 1980 ; que dès lors sa demande de compensation ne saurait être accueillie ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL POMPADOUR est seulement fondée à demander la décharge de la partie des impositions supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujetti en 1980 correspondant à la réintégration dans ses bases d'impositions des minorations de recettes de l'année 1980 restant en litige après les dégrèvements prononcés tant par les premiers juges que par l'administration, et la réformation en ce sens du jugement attaqué, soit 12.791 F ;
Article 1er : Les bases d'imposition de la SARL POMPADOUR au titre de l'impôt sur les sociétés de l'année 1980 sont réduites de 12.791 F.
Article 2 : La SARL POMPADOUR est déchargée de la différence entre l'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de l'année 1980 et celui résultant de la réduction de ses bases d'imposition indiquées à l'article 1er.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 1er juin 1988 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : Les conclusions du ministre du budget tendant à la compensation des impositions de l'année 1980 dans la limite des droits rappelés sont rejetées.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro d'arrêt : 89BX01098
Date de la décision : 07/03/1991
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - PROCEDURE CONTENTIEUSE - DEMANDES ET OPPOSITIONS DEVANT LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF - DELAIS.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LES BENEFICES DES SOCIETES ET AUTRES PERSONNES MORALES.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - DETERMINATION DU BENEFICE NET - AVANTAGES EN NATURE ALLOUES AU PERSONNEL.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - DETERMINATION DU BENEFICE NET - REMUNERATION DES DIRIGEANTS.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - BENEFICE REEL - RECTIFICATION ET TAXATION D'OFFICE.


Références :

CGI 209, 39 par. 1, 1955


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: ROYANEZ
Rapporteur public ?: CATUS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;1991-03-07;89bx01098 ?
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