Vu la décision en date du 2 février 1989, enregistrée au greffe de la cour le 3 mars 1989, par laquelle le président de la 6ème sous-section de la Section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée le 8 février 1988 pour M. et Mme Roger Y... ;
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 8 février 1988 et 2 juin 1988 présentés pour les époux Y... demeurant ... et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°) réforme le jugement du 10 décembre 1987 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a limité à 10.000 F, avec intérêts au taux légal à compter du 6 mai 1986, la somme que la commune de Gujan-Mestras (Gironde) est condamnée à leur verser en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité de la décision du maire mettant à leur charge une partie des travaux d'aménagement de la chaussée de l'avenue Sainte-Marie ;
2°) condamne la commune de Gujan-Mestras à leur verser la somme de 120.000 F avec intérêts de droit à compter du 6 mai 1986 et capitalisation desdits intérêts à compter du dépôt de la présente requête ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 mars 1991 :
- le rapport de M. PIOT, conseiller,
- et les conclusions de M. CATUS, commissaire du gouvernement ;
Sur la fin de non-recevoir invoquée par la commune de Gujan-Mestras tirée de l'irrecevabilité de la requête d'appel :
Considérant que si, dans leur mémoire ampliatif, les époux Y... ont demandé qu'une somme de 12.000 F soit ajoutée à celle de 91.232 F réclamée devant les premiers juges, il résulte de l'instruction que, dans le dernier état de leurs conclusions, ils ne demandent que l'allocation d'une somme de 120.000 F correspondant à celle réclamée dans leur mémoire préalable adressé au maire de la commune de Gujan-Mestras ; que, dès lors, la fin de non-recevoir invoquée par la commune de Gujan-Mestras tirée de l'irrecevabilité de la requête d'appel comme assortie d'une demande nouvelle doit être écartée ;
Au fond :
Considérant que la décision du maire de Gujan-Mestras de mettre en partie à la charge des époux Y... la réalisation des travaux d'aménagement de la chaussée de l'avenue Sainte-Marie qui longe leur lotissement, a été annulée par jugement du tribunal administratif en date du 23 janvier 1986 comme étant contraire aux dispositions des articles L 332-6 et 332-7 du code de l'urbanisme ; que l'illégalité de cette décision constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la commune envers les requérants dans la mesure où ceux-ci justifient d'un préjudice direct et certain ;
Considérant, d'une part, que, contrairement à ce que soutiennent les époux Y..., il ne résulte ni de l'instruction ni même des motifs de l'arrêt de la cour d'appel de Versailles en date du 25 mai 1984, qu'un lien direct de cause à effet ait existé entre la décision jugée illégale du maire de la commune et le préjudice qui résulterait pour les requérants des conséquences dommageables de la procédure judiciaire engagée par eux à l'encontre de M. X... ; qu'ainsi l'indemnisation de ce chef de préjudice ne saurait être accueillie ;
Considérant, d'autre part, qu'il ne résulte pas davantage de l'instruction que les époux Y... aient, à raison de la décision du maire de Gujan-Mestras mettant irrégulièrement à leur charge une partie des travaux d'aménagement de la chaussée de ladite avenue, subis des troubles dans les conditions d'existence de nature à ouvrir droit à réparation ; que dès lors ce chef de préjudice n'est pas de nature à ouvrir droit à indemnité ; que les personnes morales de droit public ne pouvant être condamnées à payer une somme qu'elles ne doivent pas, il appartient à la cour, soulevant d'office ce moyen, d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il indemnise ce chef de préjudice et de rejeter la demande des époux Y... sur ce point ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 10 décembre 1987 est annulé en tant qu'il condamne la commune de Gujan-Mestras à verser à M. et Mme Y... la somme de 10.000 F avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la commune de la demande des requérants en date du 6 mai 1986.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme Y... est rejeté.