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26/05/1992 | FRANCE | N°89BX01993

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 26 mai 1992, 89BX01993


Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour, le 26 décembre 1989, présentée pour M. Y..., architecte, demeurant ... et M. A..., architecte, demeurant ..., par Me X..., avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation ;
MM. Y... et A... demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 25 octobre 1989 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers les a condamnés, solidairement avec l'entreprise Kléber Furet, à verser à l'office public départemental d'habitation à loyer modéré de la Charente Maritime une indemnité de 650.616,24 F, augmentée des intérêts au ta

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Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour, le 26 décembre 1989, présentée pour M. Y..., architecte, demeurant ... et M. A..., architecte, demeurant ..., par Me X..., avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation ;
MM. Y... et A... demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 25 octobre 1989 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers les a condamnés, solidairement avec l'entreprise Kléber Furet, à verser à l'office public départemental d'habitation à loyer modéré de la Charente Maritime une indemnité de 650.616,24 F, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 18 février 1987, en réparation du préjudice résultant de divers désordres constatés dans les immeubles de la résidence Daniel à Jonzac ;
2°) de rejeter la demande de l'office public départemental d'habitation à loyer modéré de Charente Maritime ;
3°) subsidiairement, de condamner l'entreprise Lhote et l'entreprise Furet à les garantir intégralement des condamnations dont ils feraient l'objet ;
Vu les autres pièces du dossier desquelles il résulte que la requête a été communiquée, par ses représentant légaux, à la société Lhote qui, dûment mise en demeure, n'a pas produit de mémoire ;
Vu le code des marchés ;
Vu le code civil ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 avril 1992 :
- le rapport de M. TRIBALLIER, conseiller ; - les observations de Me Z... (SCP Bernard), avocat de l'office public départemental d'habitation à loyer modéré de la Charente Maritime ; - et les conclusions de M. de MALAFOSSE, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions de MM. Y... et A... relatives à la mise en jeu de leur responsabilité décennale :
Considérant qu'à la suite d'infiltrations d'eau dans l'immeuble constituant la seconde tranche de la résidence Daniel à Jonzac, l'office public départemental d'habitation à loyer modéré de la Charente Maritime, maître de l'ouvrage, a, sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil, recherché devant le Tribunal administratif de Poitiers, la responsabilité conjointe et solidaire des architectes, MM. Y... et A..., de l'entreprise Kléber Furet qui avait exécuté les travaux de gros oeuvre et de la société Lhote qui, au cours des travaux de construction avait, par ordre de service, été chargée de procéder à la reprise de fissures ; qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expert nommé par le juge des référés, que les infiltrations constatées et qui étaient de nature à rendre les locaux impropres à leur destination, sont imputables à un défaut de conception du gros oeuvre, à sa mauvaise exécution, ainsi qu'au choix et à la mise en oeuvre d'un procédé de réparation inopérant ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'étendue et les conséquences des désordres, même s'il y avait été remédié superficiellement, aient été connues, lors de la réception définitive prononcée sans réserve ; que dès lors, MM. Y... et A..., architectes d'opération, dont la mission était d'assurer la mise au point des études, plans et projets, l'organisation, la coordination, la surveillance et le contrôle des travaux, ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Poitiers les a condamnés solidairement avec l'entreprise Kléber Furet à verser une indemnité sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ;
Sur les conclusions subsidiaires de MM. Y... et A... :
Considérant que les architectes MM. Y... et A... appellent en garantie, outre la société Furet, la société Lhote qui a réalisé les travaux de reprise avant l'achèvement des travaux ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise susmentionné, que les défauts d'étanchéité et les fissures constatés sont inhérents soit en ce qui concerne les murs-parois au procédé de construction choisi par les architectes, soit en ce qui concerne les liaisons au droit des allèges et la partie enterrée des murs, à un défaut de conception ; que si les architectes ont rappelé à l'entreprise Kléber Furet ses manquements aux règles de l'art, il ne résulte pas de l'instruction que le Tribunal administratif de Poitiers ait fait une inexacte appréciation des responsabilités respectivement encourues par les maîtres d'oeuvre en limitant à 50 % des condamnations mises à leur charge la part incombant à titre définitif à ladite entreprise ;

Considérant qu'il résulte également de l'instruction que si l'entoilage réalisé par la société Lhote adhère au support, il n'a pas résisté aux efforts de cisaillement ; que si la responsabilité du défaut de conception incombe aux architectes, ainsi qu'il a déjà été dit, il demeure que l'entreprise Lhote, qui ne pouvait ignorer l'insuffisance du procédé mis en oeuvre, a manqué aux règles de l'art en exécutant une réparation inappropriée ; que dès lors, et quelles que soient les relations entre le maître d'ouvrage et l'entreprise Lhote, les architectes sont fondés à appeler en garantie cette entreprise sur le fondement de sa responsabilité quasi délictuelle et à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué , le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur demande sur ce point ;
Considérant qu'il sera fait une exacte appréciation des responsabilités respectivement encourues par les architectes, et l'entreprise Lhote en condamnant celle-ci à garantir les maîtres d'oeuvre à concurrence de dix pour cent des condamnations prononcées leur encontre ;
Sur les conclusions de l'office public départemental d'habitation à loyer modéré tendant à ce que la société Lhote soit condamnée sur le fondement de sa responsabilité décennale :
Considérant que l'admission de l'appel formé par MM. Y... et A... contre le jugement du Tribunal administratif de Poitiers n'a pas pour effet d'aggraver la situation de l'office public départemental d'habitation à loyer modéré de Charente maritime ; que dès lors, les conclusions de l'appel provoqué dudit office, dirigées contre la société Lhote, présentées après l'expiration du délai d'appel, ne sont pas recevables ;
Sur la demande de capitalisation des intérêts :
Considérant que l'office public départemental d'habitation à loyer modéré reste fondé à demander la capitalisation des intérêts afférents à la somme de 650.616,24 F que MM. Y... et A..., l'entreprise Kléber Furet et la société Lhote ont été condamnés à verser à l'office public départemental d'habitation à loyer modéré de Charente Maritime ; qu'à la date de la demande de capitalisation, soit le 16 février 1990, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 8.1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que les conclusions de l'office public départemental d'habitation à loyer modéré de Charente Maritime tendant à l'application des dispositions de l'article 1er du décret du 2 septembre 1988 doivent être regardées comme tendant à obtenir le bénéfice des dispositions de l'article L. 8.1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, issu de la loi 91-647 du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu , dans les circonstances de l'espèce, de faire application desdites dispositions et de condamner MM. Y... et A... à payer à l'office public départemental d'habitation à loyer modéré la somme de 3.000 F au titre des sommes exposées par eux et non comprises dans les dépens ;
Article 1er : Les intérêts échus le 16 février 1990, de la somme de 650.616,24 F que MM. Y... et A..., l'entreprise Furet et la société Lhote ont été condamnés à verser à l'office public départemental d'habitation à loyer modéré de Charente maritime, par jugement du Tribunal administratif de Poitiers du 25 octobre 1989, seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 2 : La société Lhote est condamnée à garantir MM. Y... et A... des condamnations prononcées contre eux par le jugement du Tribunal administratif de Poitiers du 25 octobre 1989, à concurrence du dixième de leur montant .
Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Poitiers du 25 octobre 1989 est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles précédents .
Article 4 : MM. Y... et A... verseront à l'office public départemental d'habitation à loyer modéré une somme de 3.000 F au titre de l'article L. 8.1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 5 : Le surplus des conclusions de MM. Y... et A... et de l'office public départemental d'habitation à loyer modéré de Charente maritime est rejeté .


Type d'affaire : Administrative

Analyses

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - CHAMP D'APPLICATION.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DECENNALE - RESPONSABILITE DE L'ARCHITECTE - FAITS DE NATURE A ENGAGER SA RESPONSABILITE.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - ACTIONS EN GARANTIE.


Références :

Code civil 1792, 2270, 1154
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Décret 88-907 du 02 septembre 1988 art. 1
Loi 91-647 du 10 juillet 1991


Publications
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: TRIBALLIER
Rapporteur public ?: de MALAFOSSE

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Date de la décision : 26/05/1992
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 89BX01993
Numéro NOR : CETATEXT000007476766 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;1992-05-26;89bx01993 ?
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