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23/02/1993 | FRANCE | N°91BX00562

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1e chambre, 23 février 1993, 91BX00562


Vu la requête enregistrée le 30 juillet 1991 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, présentée pour le DEPARTEMENT DE L'INDRE, dûment représenté par le président du conseil général ; le DEPARTEMENT DE L'INDRE demande à la cour :
1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement en date du 13 juin 1991 par lequel le tribunal administratif de Limoges l'a condamné à verser la somme de 57.500 F à Mme Dominique X..., architecte, en remboursement des frais exposés lors des travaux et études qu'elle avait effectués pour la réalisation de la base nautique d''Eg

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2°) d'annuler le jugement susvisé ;
3°) de condamner Mme X... ...

Vu la requête enregistrée le 30 juillet 1991 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, présentée pour le DEPARTEMENT DE L'INDRE, dûment représenté par le président du conseil général ; le DEPARTEMENT DE L'INDRE demande à la cour :
1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement en date du 13 juin 1991 par lequel le tribunal administratif de Limoges l'a condamné à verser la somme de 57.500 F à Mme Dominique X..., architecte, en remboursement des frais exposés lors des travaux et études qu'elle avait effectués pour la réalisation de la base nautique d''Eguzon ;
2°) d'annuler le jugement susvisé ;
3°) de condamner Mme X... à lui verser 2.000 F au titre des frais irrépétibles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n° 65.29 du 11 janvier 1965 ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 janvier 1993 :
- le rapport de Mme PERROT , conseiller ; - et les conclusions de M. CATUS, commissaire du gouvernement ;

Sur les fins de non recevoir opposées à la demande :
Considérant d'une part qu'aux termes de l'article 1er du décret susvisé du 11 janvier 1965 et applicable à l'espèce : "Sauf en matière de travaux publics, le tribunal administratif ne peut être saisi que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification de la publication de la décision attaquée" ; que, dès lors que le litige qui oppose les parties en l'espèce est relatif à un marché des travaux publics, le DEPARTEMENT DE L'INDRE n'est pas fondé à soutenir que ce délai, qui ne lui est pas opposable, n'aurait pas été respecté par Mme X... ;
Considérant d'autre part qu'il résulte de l'instruction que Mme X... était habilitée à présenter une demande indemnitaire au nom du cabinet Bernard-Ollitraut, qui constituait une société de fait ; que, par suite, c'est à tort que les premiers juges n'ont pas regardé ses conclusions recevables dans leur totalité ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'annuler le jugement du tribunal administratif de Limoges en date du 13 juin 1991 et de statuer sur la demande de Mme X... par la voie de l'évocation ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite de la délibération des 17 et 18 décembre 1984 par laquelle le DEPARTEMENT DE L'INDRE a décidé le principe et fixé le coût de l'aménagement d'une base nautique à Eguzon, le président du conseil général a, par une lettre en date du 11 janvier 1985, confié au cabinet d'architecte Bernard-Ollitraut, qui avait déjà commencé à réaliser des études et des plans sur le projet, la mission de maître d'oeuvre de l'opération ; que pour la réalisation de cette opération, Mme X... a présenté le 16 janvier 1985 une demande de permis de construire qui a fait l'objet d'un accord le 21 octobre 1985 et engagé des négociations avec les entreprises qui avaient soumissionné ; qu'il résulte des dispositions du code des marchés publics applicables à l'espèce que le marché se rapportant au projet litigieux ne pouvait être conclu sans que fussent respectées les formalités prévues aux articles 279 à 312 ; qu'il suit de là qu'en demandant à Mme X..., en l'absence de tout contrat régulièrement établi, de poursuivre activement l'étude de ce projet auquel il a ensuite renoncé, le DEPARTEMENT DE L'INDRE a commis une faute de nature à engager sa responsabilité extra-contractuelle à l'égard des architectes ;
Considérant, toutefois, que Mme X... a elle même, en l'absence de contrat, commis une imprudence en acceptant d'exécuter les études qui lui étaient demandées ; qu'il sera fait une juste appréciation de l'incidence de ce comportement fautif en estimant que, dans les circonstances de l'espèce, il doit atténuer d'un quart la responsabilité du département et, en conséquence, en laissant à la charge de ce dernier les trois quarts du préjudice indemnisable ;

Considérant qu'il résulte des développements précédents que Mme X... n'est pas fondée, en l'absence de toute relation contractuelle entre les parties, à demander que l'indemnité à laquelle elle a droit soit calculée sur la base du barème forfaitaire correspondant à la mission qui lui avait été confiée et augmentée de l'indemnité de rupture prévue à l'article 12 du cahier des clauses administratives générales des marchés d'architecture et d'ingénierie ; qu'elle n'est pas davantage fondée à réclamer le versement de la totalité des honoraires facturés par son cabinet par application du principe, subsidiaire, de l'enrichissement sans cause du département ;
Sur le préjudice :
Considérant que le DEPARTEMENT DE L'INDRE se borne à invoquer le caractère excessif des sommes demandées par Mme X... sans apporter de précision de nature à établir le bien-fondé de cette allégation ; que, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation du préjudice subi par le cabinet Bernard-Ollitraut en l'évaluant à 115.049 F ; que, compte tenu du partage de responsabilité sus-défini, il y a lieu de condamner le DEPARTEMENT DE L'INDRE à verser au cabinet d'architectes la somme de 86.286,75 F ;
Sur les intérêts :
Considérant que Mme X... a droit au versement des intérêts se rapportant à la somme de 86.286,75 F que le DEPARTEMENT DE L'INDRE est condamné à lui payer ; que ces intérêts doivent être calculés à partir du 23 octobre 1985, date à laquelle elle a présenté sa première demande valant sommation de payer au conseil général ;
Sur l'application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ; que ces dispositions font obstacles à ce que Mme X... soit condamnée à payer au DEPARTEMENT DE L'INDRE la somme de 2.000 F qu'il demande au titre des frais irrépétibles ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Limoges du 13 juin 1991 est annulé.
Article 2 : Le DEPARTEMENT DE L'INDRE est condamné à payer au cabinet Bernard-Ollitraut la somme de 86.286,75 F ; cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 23 octobre 1985.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Limoges, les conclusions de la requête du DEPARTEMENT DE L'INDRE et le surplus des conclusions présentées en appel par Mme X... sont rejetés.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 91BX00562
Date de la décision : 23/02/1993
Type d'affaire : Administrative

Analyses

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - FORMATION DES CONTRATS ET MARCHES - MODE DE PASSATION DES CONTRATS.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - FIN DES CONTRATS - NULLITE.

PROCEDURE - INTRODUCTION DE L'INSTANCE - DELAIS - ABSENCE DE DELAIS - DEMANDES PRESENTEES EN MATIERE DE TRAVAUX PUBLICS (ART - 1 DU DECRET DU 11 JANVIER 1965).

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - FONDEMENT DE LA RESPONSABILITE - RESPONSABILITE SANS FAUTE - ENRICHISSEMENT SANS CAUSE - ABSENCE.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - AGISSEMENTS ADMINISTRATIFS SUSCEPTIBLES D'ENGAGER LA RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - PROMESSES.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - PREJUDICE - - CARACTERE INDEMNISABLE DU PREJUDICE - AUTRES CONDITIONS - LIEN DE DROIT.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - CAUSES EXONERATOIRES DE RESPONSABILITE - FAUTE DE LA VICTIME.


Références :

Code des marchés publics 279 à 312
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Décret 65-29 du 11 janvier 1965 art. 1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme PERROT
Rapporteur public ?: M. CATUS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;1993-02-23;91bx00562 ?
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