Vu la requête, enregistrée le 18 janvier 1992 au greffe de la cour, présentée par le ministre de l'intérieur ;
Le ministre de l'intérieur demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 9 novembre 1991 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a condamné l'Etat à verser à M. X... la somme de 75.000 F ;
2°) de rejeter la demande de dommages-intérêts de M. X... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la route ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 octobre 1993 ;
- Le rapport de M. BRENIER, conseiller ;
- et les conclusions de M. LABORDE, commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. X... a procédé à l'achat le 28 septembre 1987 à Montpellier, pour un prix de 150.000 F, d'un véhicule de marque "Mercédès-Benz", immatriculé à Paris, auprès d'un particulier qui s'en disait propriétaire ; que le même jour, M. X... a demandé un nouveau certificat d'immatriculation qui lui a été délivré le 2 octobre ; qu'en avril 1988, à la suite de l'interpellation d'une bande de voleurs de voitures, le véhicule a été reconnu comme volé dans la région parisienne et, en conséquence, saisi ; que M. X... a obtenu du tribunal administratif de Montpellier la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 75.000 F, inférieure à celle qu'il demandait, au motif de l'imprudence dont il avait fait preuve ; que l'Etat par la voie du recours direct et M. Molines par la voie du recours incident ont formé appel de cette décision ;
Considérant que si, en vertu des dispositions de l'article R.119 du code de la route, les services de l'Etat chargés de délivrer les certificats d'immatriculation d'un véhicule qui change de propriétaire ne sont pas en principe tenus de vérifier les indications figurant sur l'ancienne "carte grise" et sur le certificat de non gage, obligatoire en cas de changement de département, leur responsabilité peut toutefois être engagée, en particulier au cas où les documents qui leur sont fournis à cette occasion présentant des incohérences ou des signes évidents d'une falsification ; que, dans les circonstances de l'espèce, plusieurs indices devaient amener le service compétent à procéder à une vérification plus approfondie ; qu'ainsi l'Etat a commis une faute qui engage sa responsabilité ;
Considérant néanmoins que M. X... a acheté un véhicule récent et d'un prix élevé sans procéder à la moindre vérification quant à l'exactitude des indications figurant sur le faux certificat d'immatriculation qui lui était présenté et leur conformité avec le véhicule acheté ; qu'il a ainsi commis une imprudence qui exonère l'Etat de la moitié de sa responsabilité ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, d'une part, que le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a condamné l'Etat à verser à M. X... la somme de 75.000 F, d'autre part, que ce dernier n'est pas fondé à demander, par la voie du recours incident, que cette somme soit portée à 150.000 F ;
Article 1er : La requête du ministre de l'intérieur et le recours incident de M. X... sont rejetés.