Vu la requête, enregistrée le 1er octobre 1992, présentée pour les héritiers de M. Jack X... par Me Y..., avocat au barreau de Montpellier ;
Les héritiers de M. Jack X... demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 26 juin 1992 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. Jack X... tendant à l'annulation de l'état exécutoire émis à son encontre le 11 juin 1990 par le directeur de l'office des migrations internationales ;
2°) de le décharger du paiement de la contribution de 273.420 F qui lui a été infligée au titre de l'emploi de travailleurs étrangers en situation irrégulière ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le décret n° 90-1008 du 8 novembre 1990 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 octobre 1993 :
- le rapport de M. DESRAME conseiller ;
- et les conclusions de M. LABORDE, commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par l'office des migrations internationales :
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 341-6 du code du travail : "Nul ne peut, directement ou par personne interposée, engager, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France" ; que selon l'article L. 341-7 du même code : "Sans préjudice des poursuites judiciaires qui pourront être intentées à son encontre, l'employeur qui aura occupé un travailleur étranger en violation des dispositions de l'article L. 341-6, premier alinéa, sera tenu d'acquitter une contribution spéciale au bénéfice de l'office des migrations internationales. Le montant de cette contribution ne saurait être inférieur à 500 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l'article L. 141-8" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction et en particulier du procès verbal établi le 4 avril 1989 que M. X..., exploitant agricole sur le territoire de la commune de Marsillargues (Hérault) employait 9 étrangers, de nationalité portugaise démunis de titre de travail ; que M. X... pour apporter la preuve contraire aux énonciations de ce procès verbal ne saurait valablement soutenir pour sa défense que les ouvriers qui travaillaient dans ses champs, qui étaient pour cela munis de tout le matériel nécessaire, et déclinèrent sans difficulté leur identité au contrôleur venus les interroger, étaient en réalité des voleurs d'asperges ; qu'il ne saurait pas davantage contester l'infraction aux dispositions de l'article L. 341-6 précité en produisant des attestations émanant de personnes liées avec lui par un contrat de travail et embauchées postérieurement au contrôle ;
Considérant qu'aux termes de l'article 215 de l'acte d'adhésion de la République Portugaise à la communauté économique européenne : "l'article 48 du traité C.E.E. n'est applicable, en ce qui concerne la libre circulation des travailleurs entre le Portugal et les autres Etats membres, que sous réserve des dispositions transitoires prévues aux articles 216 à 219 du présent acte" et qu'aux termes de l'article 216 : "les articles 1er à 6 du règlement (C.E.E.) n° 1612-68 relatif à la libre circulation des travailleurs à l'intérieur de la Communauté ne sont applicables au Portugal à l'égard des ressortissants des autres Etats membres et dans les autres Etats membres à l'égard des ressortissants portugais qu'à partir du 1er janvier 1993" ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les salariés de nationalité portugaise devaient à l'époque des faits disposer d'un titre de travail ; que si les requérants soutiennent que le contrôleur du travail aurait à tort exigé la production de contrats de l'office des migrations internationales, ce moyen est inopérant dans la mesure où en tout état de cause les salariés concernés n'avaient pas de titre les habilitant à travailler en France ;
Considérant que la violation des dispositions de l'article L. 341-6 est ainsi établie et justifiait l'assujettissement de M. X... à la contribution spéciale visée à l'article L. 341-7, dont le montant a été ultérieurement réduit de moitié par décision du directeur de l'office des migrations internationales en date du 25 novembre 1992, par application des dispositions de l'article 1er du décret 90-1008 du 8 novembre 1990 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les héritiers de M. Jack X... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande dirigée contre l'Etat exécutoire du 11 juin 1990 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit alloué une somme à ce titre aux héritiers de M. X... ; qui succombent à la présente instance ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner les héritiers de M. X... à payer à l'office des migrations internationales la somme de 4.000 F ;
Article 1er : La requête des héritiers de M. Jack X... est rejetée.
Article 2 : Les héritiers de M. X... sont condamnés à payer à l'office des migrations internationales la somme de 4.000 F au titre des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.