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06/04/1994 | FRANCE | N°92BX00777

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1e chambre, 06 avril 1994, 92BX00777


Vu la requête, enregistrée le 13 août 1992 au greffe de la cour, présentée pour M. Paul X..., demeurant ... (Deux-Sèvres) ;
M. X... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 27 mai 1992 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande en décharge de la taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes qui lui ont été assignées au titre de la période du 1er janvier 1979 au 31 décembre 1982, par avis de mise en recouvrement du 7 juin 1985 ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;
3°) à titre subsidiaire, de pronon

cer, au besoin après expertise, la réduction de ces impositions, la décharge des p...

Vu la requête, enregistrée le 13 août 1992 au greffe de la cour, présentée pour M. Paul X..., demeurant ... (Deux-Sèvres) ;
M. X... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 27 mai 1992 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande en décharge de la taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes qui lui ont été assignées au titre de la période du 1er janvier 1979 au 31 décembre 1982, par avis de mise en recouvrement du 7 juin 1985 ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;
3°) à titre subsidiaire, de prononcer, au besoin après expertise, la réduction de ces impositions, la décharge des pénalités ainsi que la réduction de la taxe professionnelle et la décharge de la taxe sur les salaires ; enfin, d'ordonner le remboursement de l'indû ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le décret n° 72-670 du 13 juillet 1972 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 mars 1994 :
- le rapport de M. BOUSQUET, conseiller ;
- et les conclusions de M. CATUS, commissaire du gouvernement ;

Sur l'étendue du litige :
Considérant que, par une décision du 9 juillet 1993, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux des Deux-Sèvres a accordé à M. X... un dégrèvement de droits et intérêts de retard d'un montant total de 26 583 F au titre de la taxe sur la valeur ajoutée dont il était redevable pour la période du 1er janvier 1979 au 31 décembre 1982 ; que les conclusions de la requête de M. X... sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que, dans son jugement avant dire-droit du 18 avril 1990, devenu définitif par épuisement des voies de recours, le tribunal administratif de Poitiers, après avoir relevé que l'administration avait mis en oeuvre la procédure de taxation d'office, a écarté les moyens tirés de l'irrégularité de cette procédure ; que, ce faisant, les premiers juges ont suffisamment répondu au moyen tiré par M. X... de ce que l'administration ayant formellement agi par voie de procédure contradictoire, ne pouvait prétendre avoir opté pour la taxation d'office ; que, si dans des mémoires postérieurs au 18 avril 1990, le requérant a réitéré ce moyen, le tribunal a estimé à bon droit que, par son précédent jugement, il avait épuisé sa compétence sur cette question ; que, par suite, M. X... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'omission à statuer ;
Sur l'assujettissement de M. X... à la taxe sur la valeur ajoutée :
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 256 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à compter du 1er janvier 1979, que sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les prestations de service effectuées à titre onéreux, habituellement ou occasionnellement, par les personnes agissant d'une manière indépendante ; que toutefois, aux termes de l'article 261, dans sa rédaction en vigueur du 1er janvier 1979 au 31 décembre 1982 : "Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée ... 4. (Professions libérales et activités diverses) 7° Les prestations effectuées par ... les conseils juridiques et fiscaux inscrits sur la liste établie par le procureur de la République ... Lorsqu'elles relèvent de leur activité spécifique telle qu'elle est définie par la règlementation applicable à leur profession" ; qu'aux termes de l'article 47 du décret susvisé du 13 juillet 1972 : "La personne physique ou morale inscrite sur une liste des conseils juridiques peut, dans l'exercice de sa profession, donner toutes consultations, rédiger tous actes sous-seing privé pour le compte d'autrui, procéder à toutes formalités qui sont la conséquence ou l'accessoire de ces actes et apporter son concours à ses clients pour la rédaction des déclarations, mémoires, réponses et documents divers adressés aux administrations ou à tous organismes publics ou privés, assister ou représenter les parties devant les administrations et organismes publics et privés" ;

Considérant qu'il résulte de l'énoncé des faits retenus par le tribunal de grande instance de Niort et la cour d'appel de Poitiers dans les motifs de leurs décisions des 14 mars et 13 septembre 1985 rendues en matière correctionnelle, énonciations qui sont le support nécessaire du dispositif de ces décisions et sont ainsi revêtues de l'autorité absolue de la chose jugée, que M. X..., conseil juridique et fiscal à Niort (Deux-Sèvres), établissait pour certains de ses clients des bilans, des comptes d'exploitation générale, des comptes de pertes et profits, qu'il effectuait lui-même ou supervisait les écritures de fin d'exercice ; que, pour d'autres clients, il remplissait lui-même ou vérifiait des bordereaux de saisie de données comptables à partir desquels une société d'informatique tirait des documents comptables ; que M. X... ne conteste du reste pas avoir apporté son concours à ses clients pour l'établissement, non seulement de leurs déclarations fiscales, mais aussi des documents exigés à l'appui de ces déclarations et qui, pour la plupart, présentent un caractère comptable ; qu'ainsi, M. X... effectuait de manière habituelle et à titre onéreux des travaux comptables étrangers à l'activité d'un conseil juridique et fiscal, telle que définie à l'article 47 du décret précité du 13 juillet 1972 ; que ces prestations de service n'entrent pas dans le champ d'application de l'exonération édictée par le 4-7° précité de l'article 261 du code général des impôts ; qu'ainsi, M. X... était imposable à la taxe sur la valeur ajoutée pour son activité comptable au titre de la période du 1er janvier 1979 au 31 décembre 1982 ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant, d'une part, que M. X... n'ayant pas déposé dans le délai légal les déclarations prévues par l'article 287 du code général des impôts en ce qui concerne les recettes afférentes à son activité comptable, l'administration lui a notifié des redressements de taxe sur la valeur ajoutée en mentionnant que cette notification était effectuée par voie de taxation d'office ; que cette procédure était légalement applicable en vertu de l'article L. 66-3° du livre des procédures fiscales ; que la circonstance que l'administration ait suivi, en fait, la procédure contradictoire et permis ainsi au contribuable de bénéficier de garanties auxquelles il n'avait pas droit ne saurait avoir d'incidence, ni sur la régularité de la procédure d'imposition, ni sur la charge de la preuve qui incombe au requérant, en ce qui concerne le montant des impositions, conformément aux dispositions de l'article L.193 du livre des procédures fiscales ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable en l'espèce : "Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses : ... c. Ou qui permettent d'éviter, en totalité ou en partie, le paiement des taxes sur le chiffre d'affaires correspondant aux opérations effectuées en exécution d'un contrat ou d'une convention. L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. Si elle s'est abstenue de prendre l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit ou ne s'est pas rangée à l'avis de ce comité, il lui appartient d'apporter la preuve du bien-fondé du redressement" ;
Considérant qu'en estimant que les prestations effectuées par M. X... pour le compte de ses clients caractérisaient une activité comptable, l'administration n'a écarté aucun acte dissimulant la véritable portée d'un contrat, mais s'est bornée à donner aux travaux litigieux une qualification correspondant à leur véritable nature ; que M. X... ne saurait, dès lors, soutenir que la charge de la preuve incombe à l'administration, à défaut pour celle-ci d'avoir consulté le comité pour la répression des abus de droit ;
Sur le montant des impositions :
Considérant, d'une part, qu'il est constant que l'activité comptable donnant lieu à taxation d'office et l'activité de conseil juridique et fiscal exonérée qu'exerçait simultanément M. X... ne faisaient pas l'objet de comptabilités séparées, en méconnaissance de l'article 286-3° du code général des impôts ; que ces deux activités n'étaient ni exercées ni rémunérées de manière distincte ; que, dans ces conditions, quelle qu'ait été leur importance respective, c'est à bon droit que M. X... a été assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée sur l'ensemble des recettes professionnelles perçues de ses clients au cours de la période du 1er janvier 1979 au 31 décembre 1982 ;
Considérant, d'autre part, qu'au vu des factures d'achats produites par M. X... au cours de l'instance d'appel, l'administration a admis en déduction la taxe ayant grevé les éléments du prix des opérations imposables et prononcé le dégrèvement correspondant ; que M. X... n'apporte aucun élément de nature à établir l'insuffisance du montant de la taxe admise en déduction ;
Sur les pénalités :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, conformément aux dispositions de l'article 1733-I du code général des impôts, applicables en cas de taxation d'office pour défaut de déclaration, les droits mis à la charge de M. X... ont été majorés de l'intérêt de retard prévu à l'article 1728 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur ; que cet intérêt n'ayant pas le caractère d'une sanction, il ne peut être atteint par la prescription dès lors que les droits auxquels il s'applique ne sont pas prescrits au moment de leur mise en recouvrement ; que, par suite, M. X... n'est pas fondé à soutenir que l'intérêt de retard qui lui a été appliqué serait atteint par la prescription, laquelle aurait, en tout état de cause, été interrompue par l'envoi, le 2 décembre 1983, d'une lettre de motivation des pénalités dont le requérant a accusé réception le 5 du même mois ;
Sur la taxe professionnelle et la taxe sur les salaires :
Considérant que M. X... demande à titre subsidiaire, en conséquence de son assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée, la réduction de la taxe professionnelle et la décharge de la taxe sur les salaires qu'il a acquittées ;
Considérant que les conclusions relatives à ces impositions sont présentées pour la première fois en appel ; qu'au surplus, en méconnaissance des articles R. 190-I et L. 199 du livre des procédures fiscales, elles n'ont pas fait l'objet d'une réclamation à l'administration, préalable à la saisine du juge ; que, par suite, elles ne sont pas recevables ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande en décharge des impositions restant en litige ;
Article 1er : A concurrence de la somme de 26 583 F de droits et pénalités, en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée mise à la charge de M. X... au titre de la période du 1er janvier 1979 au 31 décembre 1982, il n'y a pas lieu de statuer sur la requête de M. X....
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 92BX00777
Date de la décision : 06/04/1994
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - ABUS DE DROIT.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - AMENDES - PENALITES - MAJORATIONS.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - DEMANDES ET OPPOSITIONS DEVANT LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF - FORMES ET CONTENU DE LA DEMANDE.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - TAXES SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES ET ASSIMILEES - TAXE SUR LA VALEUR AJOUTEE - PERSONNES ET OPERATIONS TAXABLES - OPERATIONS TAXABLES.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - TAXES SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES ET ASSIMILEES - TAXE SUR LA VALEUR AJOUTEE - PROCEDURE DE TAXATION - TAXATION - EVALUATION OU RECTIFICATION D'OFFICE.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - TAXES SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES ET ASSIMILEES - TAXE SUR LA VALEUR AJOUTEE - LIQUIDATION DE LA TAXE - BASE D'IMPOSITION.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - TAXES SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES ET ASSIMILEES - TAXE SUR LA VALEUR AJOUTEE - LIQUIDATION DE LA TAXE - DEDUCTIONS.

PROCEDURE - JUGEMENTS - REDACTION DES JUGEMENTS - MOTIFS.

PROCEDURE - VOIES DE RECOURS - APPEL - CONCLUSIONS RECEVABLES EN APPEL - CONCLUSIONS NOUVELLES.


Références :

CGI 256, 261, 287, 286, 1733, 1728
CGI Livre des procédures fiscales L66, L193, L64, R190-1, L199
Décret 72-670 du 13 juillet 1972 art. 47


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. BOUSQUET
Rapporteur public ?: M. CATUS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;1994-04-06;92bx00777 ?
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