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27/06/1994 | FRANCE | N°92BX01046

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3e chambre, 27 juin 1994, 92BX01046


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 4 novembre 1992 et complétée le 8 janvier 1993, présentée pour Mme Martine X... domiciliée ... ;
Mme X... demande à la cour :
- d'annuler le jugement du 9 juillet 1992 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1983, 1984, 1985 et 1986, et a substitué pour l'année 1983 les intérêts de retard aux pénalités de mauvaise foi initi

alement appliquées ;
- de lui accorder la décharge de ces impositions et des p...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 4 novembre 1992 et complétée le 8 janvier 1993, présentée pour Mme Martine X... domiciliée ... ;
Mme X... demande à la cour :
- d'annuler le jugement du 9 juillet 1992 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1983, 1984, 1985 et 1986, et a substitué pour l'année 1983 les intérêts de retard aux pénalités de mauvaise foi initialement appliquées ;
- de lui accorder la décharge de ces impositions et des pénalités et intérêts de retard correspondants ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 mai 1994 :
- le rapport de Melle ROCA, conseiller ;
- les observations de Me FLEURENTDIDIER, avocat de Mme X... ;
- et les conclusions de M. CIPRIANI, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme X... qui exploitait un établissement de restauration à La Rochelle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 20 décembre 1982 au 5 janvier 1987, date de sa cessation d'activité ; que le vérificateur a estimé que pour l'ensemble de cette période la comptabilité n'était pas probante et a reconstitué, dans le cadre de la procédure contradictoire, le montant du chiffre d'affaires et des bénéfices effectivement réalisés ; que le service a saisi la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires du désaccord persistant ; que Mme X... demande la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes qui lui ont été assignées au titre des années 1983, 1984, 1985 et 1986 ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a substitué, pour l'année 1983, les intérêts de retard aux pénalités de mauvaise foi initialement appliquées, et a rejeté le surplus de la demande ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant, en premier lieu, que l'administration était en droit, pour contrôler la sincérité de la comptabilité de Mme X... de demander des informations à des tiers non soumis au droit de communication, sous réserve de ne pas leur imposer l'obligation de répondre à ses demandes ; qu'il ne ressort pas des procès-verbaux d'audition de M. Z... et de Mme Y... que ceux-ci n'auraient pas été informés de la possibilité dont ils disposaient de s'abstenir de répondre ; que la requérante n'établit pas, par ses affirmations et par le témoignage qu'elle produit, que Mme Y... aurait été soumise à des pressions de nature à entacher d'irrégularité la procédure ;
Considérant, en second lieu, que les procès-verbaux d'audition des deux personnes précitées ont été communiqués à Mme X... le 3 mai 1988, avant que la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires se réunisse ; qu'ainsi l'intéressée, contrairement à ses affirmations, a été mise à même de discuter de la portée de ces documents en présence de l'administration ; qu'elle ne fournit aucun élément tendant à prouver qu'elle aurait demandé au vérificateur de lui communiquer les tableaux des notes et factures dépouillées et qu'elle aurait essuyé un refus ; que, toutefois, la requérante était en mesure de vérifier les résultats afférents aux dépouillements effectués dès lors que les trois notifications de redressement qui lui ont été adressées précisaient les périodes concernées, le nombre global de factures présentées et les conclusions chiffrées résultant des investigations réalisées ; qu'enfin le vérificateur n'a effectué aucun relevé de prix ; que le moyen tiré de la non-communication de ce relevé manque donc en fait ;
Sur l'avis de la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires :

Considérant que, contrairement à ce qu'ont déclaré les premiers juges, en proposant de diminuer le chiffre d'affaires total de 20.000 F par année en cause, et les bénéfices en conséquence, pour tenir compte des prélèvements de vins fins et de champagne, et en rejetant les autres prétentions de Mme X... concernant la diminution de son chiffre d'affaires et les prélèvements en nature de 1987, la Commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires a suffisamment motivé l'avis qu'elle a émis ;
Sur le caractère probant de la comptabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que pour rejeter la comptabilité de Mme X... au titre de l'année 1983 l'administration s'est fondée sur l'absence de livre d'inventaire, l'absence de livre d'achats pour la période allant jusqu'au 31 août, le caractère incomplet du grand livre et la non-comptabilisation de quatorze chèques pour un montant global de 4.829 F ; que ces irrégularités étaient de nature à priver la comptabilité de son caractère probant ;
Considérant qu'en ce qui concerne les années 1984, 1985 et 1986 le service a relevé en premier lieu que les notes délivrées aux clients étaient insuffisantes au regard des exigences de l'article 1649 ter A du code général des impôts relatif aux bons de remis, en deuxième lieu qu'une partie des achats effectués par M. Z... et Mme Y... pour le compte de Mme X... d'un montant total de 4.259,58 F en 1984 et 1.441,70 F en 1985 n'avaient pas été comptabilisée, en troisième lieu, que l'inventaire physique des marchandises détenues au 31 décembre 1986 a fait l'objet de rectifications postérieures à cette date, en dernier lieu, que la marge brute est faible eu égard à la catégorie de l'établissement et présente d'importantes variations ;

Considérant que les dispositions de l'article 1649 ter A précité visent notamment les opérations portant sur les animaux de boucherie et de charcuterie, les fruits et légumes et les farines panifiables ; que l'administration, en se bornant à faire valoir que l'examen du double des notes-clients révèle l'inexistence d'une comptabilité matière dont la tenue pouvait être exigée en vertu des dispositions de l'article 1649 ter A précité, ne démontre pas que la comptabilité de la requérante était entachée de graves irrégularités ; qu'en effet l'administration ne soutient pas que Mme X... devait présenter les bons de remis des viandes, farines, fruits et légumes achetés, ni qu'eu égard aux conditions d'exercice de sa profession de restaurateur, elle avait l'obligation de conserver de tels documents ; que les montants des achats de vins non comptabilisés ne peuvent être regardés comme suffisamment importants pour priver la comptabilité des années correspondantes de caractère probant ; que si l'inventaire des marchandises au 31 décembre 1986 a été rectifié postérieurement à la clôture, le service ne précise ni la nature de cette rectification ni les raisons pour lesquelles elle serait susceptible d'entacher de suspicion l'ensemble des écritures comptables ; qu'enfin la circonstance que le taux de marge brute ressortant de la comptabilité soit inférieur pour ces trois années au taux moyen de la profession et présente des variations, ne suffit pas à démontrer que cette comptabilité n'est pas probante ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne l'année 1983 :
Considérant qu'il appartient à Mme X... en application des dispositions de l'article L.192 du livre des procédures fiscales, de prouver l'exagération des bases d'imposition retenues par l'administration, sa comptabilité étant entachée de graves irrégularités et l'imposition litigieuse ayant été établie conformément à l'avis, régulièrement émis, de la Commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que pour procéder à la reconstitution du chiffre d'affaires et du bénéfice imposable réalisés par Mme X... du fait de l'activité de son commerce, le vérificateur a établi, à partir de plusieurs échantillons des factures d'achat et des doubles des notes de restaurant ainsi que des prix de vente résultant des tarifs présentés, des coefficients de marge ; qu'il a pondéré les résultats pour tenir compte de la consommation de l'exploitant, des offerts et des vins destinés à la préparation des repas ; qu'au vu de l'avis émis par la Commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires, il a en outre pratiqué un abattement supplémentaire pour tenir compte des prélèvements en vins fins et champagnes ; que cette méthode n'est ni viciée dans son principe ni excessivement sommaire ; que la requérante ne peut utilement se prévaloir de la note administrative du 6 mai 1988 sur les méthodes de reconstitution dès lors que cette note énonce des recommandations et ne constitue pas une interprétation formelle de la loi fiscale au sens de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales ; que si Mme X... critique de façon générale l'échantillon choisi et affirme que le pourcentage d'abattement ne tient pas suffisamment compte des variations de prix, des pertes et des boissons offertes, elle ne fournit pas de justifications permettant de vérifier le bien-fondé de ses affirmations ; que l'exemple théorique de la reconstitution des recettes réalisées à l'occasion de la vente d'un tournedos de 250 g est dépourvu de tout élément de preuve sérieux et ne saurait servir de base à la reconstitution de l'ensemble des recettes de restauration ; qu'ainsi l'intéressée, qui ne saurait utilement se prévaloir de sa comptabilité, ne démontre pas que les bases d'imposition retenues par l'administration pour l'année 1983 seraient excessives ;
En ce qui concerne les années 1984, 1985 et 1986 :
Considérant que Mme X... se borne à contester le seul chef de redressement lié à une minoration de recettes ; que sa comptabilité étant probante, la reconstitution opérée par l'administration est viciée dans son principe ; que, par suite, l'intéressée est fondée à demander la décharge des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes qui lui ont été assignées au titre de ces trois années correspondant à une minoration de recettes de 172.479 F en 1984, 387.946 F en 1985 et 287.252 F en 1986 ;
Sur les pénalités afférentes à l'année 1983 :
Considérant qu'il n'est pas contesté que c'est à bon droit que le tribunal administratif de Bordeaux a substitué, pour cette année, les intérêts de retard aux pénalités de mauvaise foi initialement appliquées ;
Article 1er : Les bases de l'impôt sur le revenu assignées à Mme X... au titre des années 1984, 1985 et 1986 sont réduites respectivement des sommes de 172.479 F, 387.946 F et 287.252 F.
Article 2 : Mme X... est déchargée des droits et pénalités correspondant aux réductions des bases d'imposition définies à l'article 1er.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 9 juillet 1992 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus de la requête de Mme X... est rejeté.


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