Vu la requête, enregistrée le 11 juillet 1994 au greffe de la cour, et le mémoire complémentaire enregistré le 18 juillet 1994, présentés pour la BANQUE DUPUY DE PARSEVAL dont le siège social se trouve ... (Hérault), agissant en la personne de son représentant légal ; la BANQUE DUPUY DE PARSEVAL demande à la cour :
1°) de réformer le jugement du 19 avril 1994 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a condamné l'office public d'aménagement et de construction de Montpellier à lui verser une indemnité de 19.562,20 F avec intérêts au taux légal à compter du 15 janvier 1989 qu'elle estime insuffisante, en réparation du préjudice lié à une cession de créance ;
2°) de condamner solidairement l'O.P.A.C. de Montpellier et M. X..., architecte, à lui verser la somme de 173.630,40 F avec intérêts au taux légal à compter du 15 janvier 1989, et la somme de 3.000 F au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu la loi n° 81-1 du 2 janvier 1981 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 novembre 1995 :
- le rapport de M. VIVENS, conseiller ; - les observations de Me Z... substituant Me Y..., pour la banque DUPUY de PARSEVAL ; - et les conclusions de M. CIPRIANI, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la société d'Issernia a passé le 28 octobre 1987 un marché avec l'office public d'aménagement et de construction de Montpellier en vue de la réalisation des travaux d'isolation thermique de la Cité les Aiguerelles à Montpellier pour un montant de 1.392.690,15 F ; qu'en application de la loi du 2 janvier 1981 facilitant le crédit aux entreprises, elle a cédé le 10 novembre 1988 à la BANQUE DUPUY DE PARSEVAL une créance de 173.630,40 F à l'échéance du 15 janvier 1989 au regard de la situation récapitulative n° 1 et du certificat pour paiement de premier acompte établis pour cette somme par le maître d'oeuvre le 8 novembre 1988 ; que la cession de créance ayant été notifiée à l'O.P.A.C. le 11 novembre 1988, la banque n'a pu obtenir de l'établissement public le règlement direct qu'elle sollicitait ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a condamné l'O.P.A.C. de Montpellier à verser à la BANQUE DUPUY DE PARSEVAL la somme de 19.562,50 F ;
Considérant que par la voie de l'appel principal, la BANQUE DUPUY DE PARSEVAL demande que cette condamnation soit portée à 173.630,40 F et mise solidairement à la charge du maître de l'ouvrage et du maître d'oeuvre, l'architecte M. X... ; que, par la voie de l'appel incident, l'O.P.A.C. de Montpellier demande à être déchargé de la condamnation prononcée à son encontre par les premiers juges ;
Sur l'appel principal :
Considérant qu'en application des dispositions de l'article 6 de la loi précitée du 2 janvier 1981, en l'absence d'acceptation de la cession de créance par l'O.P.A.C. de Montpellier, débiteur cédé, la BANQUE DUPUY DE PARSEVAL pouvait se voir opposer par le maître de l'ouvrage, les exceptions fondées sur ses rapports avec le cédant ;
Qu'aux termes de l'article 192 du code des marchés publics dans sa rédaction issue du décret du 3 décembre 1985 pris pour l'application de la loi du 2 janvier 1981 : "Le titulaire du marché, les bénéficiaires de nantissement, de cession de créance ou de transmission prévue à l'article 191 peuvent au cours de l'exécution du marché, requérir de l'administration compétente soit un état sommaire des travaux et fournitures effectués, appuyé d'une évaluation qui n'engage pas l'administration, soit le décompte des droits constatés au profit de l'entrepreneur ou du fournisseur ; ils peuvent requérir, en outre, un état des avances et des acomptes mis en paiement. La personne chargée de fournir ces divers renseignements est désignée dans le marché ..." ;
Considérant d'une part, que la BANQUE DUPUY DE PARSEVAL qui ne saurait avoir plus de droits que l'entreprise cédant une créance fondée sur un état d'acompte à caractère provisoire ne pouvait se prévaloir à l'encontre de l'O.P.A.C. de Montpellier d'un droit de créance qui ne pouvait naître que d'un décompte définitif ; qu'il n'est pas contesté par la banque requérante que, compte tenu des déductions pour malfaçons et pénalités de retard, la créance de l'entreprise Issernia sur l'O.P.A.C. de Montpellier était limitée à 19.562,20 F ;
Considérant d'autre part, que pour rechercher la responsabilité du maître de l'ouvrage et du maître d'oeuvre, la requérante se fonde également sur la faute commise à raison des renseignements erronés ou incomplets contenus dans la situation récapitulative n°1 et le certificat pour paiement de premier acompte établis le 8 novembre 1988 par l'architecte ;
Considérant que si la délivrance, dans les conditions prévues par cet article, de décomptes des droits constatés entachés d'inexactitude est de nature, le cas échéant, à engager la responsabilité pécuniaire de l'administration envers la banque cessionnaire de la créance de l'entreprise sur le maître de l'ouvrage, la BANQUE DUPUY DE PARSEVAL a escompté en l'espèce à l'entreprise d'Issernia sa créance de 173.630,40 F au vu des seules attestations délivrées à l'entreprise elle-même par l'architecte, sans que M. X... ait été désigné dans le marché comme la personne qualifiée pour fournir aux bénéficiaires de cession de créance les renseignements prévus à l'article 192 précité ; que, par suite, la responsabilité de l'O.P.A.C. de Montpellier ne saurait être engagée de ce fait ;
Considérant, enfin, que la BANQUE DUPUY DE PARSEVAL, tiers au contrat, ne peut utilement invoquer la méconnaissance éventuelle par l'architecte de ses obligations contractuelles envers le maître de l'ouvrage ; qu'elle n'établit pas que les conditions dans lesquelles M. X... a signé et délivré à l'entreprise un état de décompte erroné constituerait une faute de nature à engager sa responsabilité à son encontre ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la BANQUE DUPUY DE PARSEVAL n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, qui n'est entaché d'aucune omission à statuer, le tribunal administratif de Montpellier n'a condamné l'O.P.A.C. de Montpellier qu'au paiement d'une somme de 19.562,20 F et a rejeté la demande de condamnation de M. X..., architecte ;
Sur l'appel incident :
Considérant que si en application de l'article 5-1 du cahier des clauses administratives particulières applicable au marché, l'entreprise d'Issernia devait constituer un cautionnement de 5 % du montant total du marché, soit 69.635 F, et si l'entreprise n'a pas respecté cette formalité, elle s'exposait de ce fait en application des dispositions combinées des articles 6 et 37 du cahier des clauses administratives générales applicable, à la résiliation du marché à ses torts ; qu'il résulte de l'instruction que le marché litigieux a été résilié à compter du 16 novembre 1988 ; que le défaut de cautionnement n'a pas rendu l'O.P.A.C. de Montpellier créancier d'une somme de 69.635 F envers l'entreprise d'Issernia, ni par suite envers la BANQUE DUPUY DE PARSEVAL ; que l'O.P.A.C. de Montpellier ne saurait, dès lors, prétendre à être déchargé par compensation, de toute condamnation ;
Sur l'application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'O.P.A.C. de Montpellier et M. X..., qui n'ont ni l'un ni l'autre la qualité de partie perdante, soient condamnés à verser à la BANQUE DUPUY DE PARSEVAL la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Considérant, par contre, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce d'accorder à l'O.P.A.C. de Montpellier ainsi qu'à M. X... la somme de 5.000 F à ce titre ;
Article 1er : La requête de la BANQUE DUPUY DE PARSEVAL et l'appel incident de l'O.P.A.C. de Montpellier sont rejetés.
Article 2 : La BANQUE DUPUY DE PARSEVAL versera à l'O.P.A.C. de Montpellier la somme de 5.000 F et à M. X... la même somme au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.