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24/06/1996 | FRANCE | N°94BX00771

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2e chambre, 24 juin 1996, 94BX00771


Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 13 mai 1994, présentée pour M. et Mme Y...
X..., domiciliés ... (Gard) ;
M. et Mme Y...
X... demandent à la cour :
- d'annuler le jugement du 8 mars 1994 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à ce que la Poste, direction régionale du Languedoc-Roussillon, soit condamnée à leur verser la somme de 47.895,37 F avec intérêts de droit à compter du 15 mai 1990 ainsi qu'une somme de 15.000 F à titre de dommages et intérêts à raison de l'émission frauduleuse par un tiers de ch

èques tirés sur leur compte courant postal ;
- de faire droit à leur demande ...

Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 13 mai 1994, présentée pour M. et Mme Y...
X..., domiciliés ... (Gard) ;
M. et Mme Y...
X... demandent à la cour :
- d'annuler le jugement du 8 mars 1994 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à ce que la Poste, direction régionale du Languedoc-Roussillon, soit condamnée à leur verser la somme de 47.895,37 F avec intérêts de droit à compter du 15 mai 1990 ainsi qu'une somme de 15.000 F à titre de dommages et intérêts à raison de l'émission frauduleuse par un tiers de chèques tirés sur leur compte courant postal ;
- de faire droit à leur demande ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des postes et télécommunications ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 mai 1996 :
- le rapport de Melle ROCA, conseiller ; - et les conclusions de M. CIPRIANI, commissaire du gouvernement ;

Sur la responsabilité :
Considérant que si aux termes de l'article L.108 du code des postes et télécommunications dans sa rédaction en vigueur à l'époque des faits : "Le titulaire d'un compte courant postal est seul responsable des conséquences résultant de l'emploi abusif, de la perte ou de la disparition des formules de chèques qui lui ont été remises par l'administration des postes et télécommunications", ces dispositions ne font pas obstacle à ce que la responsabilité de l'exploitant public la Poste qui, en vertu de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990, gère le service des chèques postaux, soit engagée à l'égard du titulaire d'un compte courant postal dans le cas ou ce service a commis une faute lourde ; qu'en vertu de l'article 47 de la loi précitée, la responsabilité de la Poste est engagée même lorsque la faute lourde a été commise avant le 1er janvier 1991, date à laquelle la Poste s'est substituée à l'Etat pour assurer la gestion du service des chèques postaux ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le compte courant postal dont M. et Mme X... sont titulaires au centre de Montpellier a été débité les 11 décembre 1989, 4 et 11 janvier 1990 du montant de trois chèques émis frauduleusement pour les sommes respectives de 6.586,44 F, 44.438,26 F et 44.766,04 F ; que ces opérations ont été effectuées à la suite de la disparition des formules de chèques correspondantes dans les carnets remis aux époux X... ; que de la comparaison entre les signatures apposées par M. et Mme X... sur le spécimen détenu par le centre de chèques postaux et les signatures figurant sur les trois chèques dont s'agit, il résulte que ces dernières présentent des différences manifestes et apparentes avec les premières, tant au niveau de l'importance que de la forme des caractères et des traits ; qu'ainsi la vérification qui a été opérée par le centre des chèques postaux a été insuffisante ; que, dès lors, le service des chèques postaux doit être regardé comme ayant, en payant lesdits chèques, commis une faute lourde de nature à engager la responsabilité de la Poste ; que, toutefois, les époux X... ont fait preuve d'une grave négligence dans le contrôle de leurs documents bancaires ; qu'en effet, s'ils font valoir que le vol des formules litigieuses aurait eu lieu lors de la remise de leurs carnets de chèques du fait du mauvais fonctionnement du service postal qui n'aurait pas respecté les formes exigées, la numérotation de ces formules, éclairée par les explications de la Poste, fait ressortir que celles-ci se rattachaient à deux carnets qui leur ont été adressés pendant la période comprise entre le 4 novembre 1988 et la fin du mois de septembre 1989 ; or il résulte de l'instruction que les requérants n'ont fait état pour la première fois auprès des services de la Poste de la perte de formules de chèques que le 26 février 1990 ; que, par ailleurs, ils n'ont pas procédé à une vérification régulière des opérations réalisées sur leur compte, alors que la Poste envoie au titulaire du com un relevé après chaque opération effectuée, la première opposition à paiement ayant été formulée par leurs soins deux mois et demi après le débit du premier chèque ; qu'ils ont, de ce fait, permis au fraudeur de poursuivre ses agissements après l'émission de ce premier chèque ; que s'ils allèguent des perturbations dans la distribution du courrier les ayant empêchés de procéder au contrôle des opérations réalisées sur leur compte, les documents qu'ils fournissent pour justifier de la réalité de ces perturbations concernant la période postérieure au 10 février 1990 et la Poste soutient, sans être contredite, qu'aucun préavis de grève n'a été enregistré par ses services pour la période litigieuse s'étendant du 11 décembre 1989 au 25 janvier 1990 ; que M. et Mme X... ne sauraient tirer argument du fait qu'ils n'habitaient pas à leur domicile principal pendant cette période dès lors qu'il leur appartenait, dans cette hypothèse, soit de faire suivre leur courrier, soit d'aviser les services de la Poste de leur changement provisoire d'adresse ; que, dans ces conditions, les premiers juges ont fait une juste appréciation de la responsabilité encourue par la Poste en ne mettant à sa charge que la moitié de la réparation du préjudice subi par les époux X... ;
Sur le préjudice :

Considérant, en premier lieu, que le préjudice financier subi par M. et Mme X... s'élève à 95.790,74 F ; que, compte tenu du partage de responsabilité retenu, la Poste est redevable à leur égard de la somme de 47.895,37 F ; qu'il résulte de l'instruction que les époux X... ont déjà perçu cette somme que la Poste a accepté de prendre en charge avant que le tribunal administratif ne soit saisi ; qu'il n'y a pas lieu, dès lors, de prononcer une condamnation à l'encontre de la Poste du chef de ce préjudice ;
Considérant, en second lieu, que si les requérants sollicitent la somme de 15.000 F à titre de dommages et intérêts, ils n'apportent à l'appui de cette demande aucune justification ; que celle-ci doit donc être rejetée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme X... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à ce que la Poste soit déclarée entièrement responsable du préjudice qu'ils ont subi et condamnée à leur verser la somme de 47.895,37 F avec intérêts de droit à compter du 15 mai 1990, augmentée d'une somme de 15.000 F à titre de dommages et intérêts ;
Sur les conclusions incidentes de la Poste :
Considérant que les conclusions incidentes de la Poste tendant à la réformation de la motivation du jugement attaqué sont, en tout état de cause, irrecevables ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant qu'aux termes de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. et Mme X... à payer à la Poste la somme que celle-ci réclame au titre des frais engagés non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. et Mme X... et les conclusions incidentes de la Poste sont rejetées.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

POSTES ET TELECOMMUNICATIONS - POSTES - ACHEMINEMENT DU COURRIER - RESPONSABILITE DE LA POSTE.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICES DES POSTES ET TELECOMMUNICATIONS - SERVICES FINANCIERS.


Références :

Code des postes et télécommunications L108
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Loi 90-568 du 02 juillet 1990 art. 47


Publications
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Melle ROCA
Rapporteur public ?: M. CIPRIANI

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2e chambre
Date de la décision : 24/06/1996
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 94BX00771
Numéro NOR : CETATEXT000007486860 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;1996-06-24;94bx00771 ?
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