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27/06/1996 | FRANCE | N°95BX01613

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1e chambre, 27 juin 1996, 95BX01613


Vu les requêtes, enregistrées au greffe de la cour les 3 et 6 novembre 1995, présentées pour M. X... demeurant ... (Haute-Garonne) ;
M. X... demande à la cour :
1 ) d'ordonner qu'il sera sursis à l'exécution du jugement en date du 24 juillet 1995 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a, d'une part, rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 novembre 1993 du maire de Toulouse le mettant en demeure de démolir le mur de soutènement de sa propriété et de le remplacer par la structure la mieux adaptée, et l'a, d'autre part, condamné à démolir da

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Vu les requêtes, enregistrées au greffe de la cour les 3 et 6 novembre 1995, présentées pour M. X... demeurant ... (Haute-Garonne) ;
M. X... demande à la cour :
1 ) d'ordonner qu'il sera sursis à l'exécution du jugement en date du 24 juillet 1995 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a, d'une part, rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 novembre 1993 du maire de Toulouse le mettant en demeure de démolir le mur de soutènement de sa propriété et de le remplacer par la structure la mieux adaptée, et l'a, d'autre part, condamné à démolir dans un délai de six mois ledit mur et à construire un ouvrage propre à contenir les glissements de terrain, faute de quoi le maire de Toulouse sera autorisé à faire exécuter d'office lesdits travaux ;
2 ) d'annuler le jugement précité et l'arrêté de péril pris par le maire de Toulouse le 22 novembre 1993 ;
3 ) de surseoir à statuer et d'ordonner la production des documents d'alignement relatifs au chemin départemental n 4 à hauteur de sa propriété ;
4 ) subsidiairement de dire qu'il n'y a pas lieu d'ordonner la construction d'un nouvel ouvrage destiné à contenir les glissements de terrain ;
5 ) très subsidiairement de substituer à l'arrêté de péril des travaux confortatifs du mur ou d'ordonner un talutage du terrain selon une pente de 30 % ;
6 ) de condamner la commune de Toulouse à lui payer la somme de 15.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des communes ;
Vu le code de la construction et de l'habitation ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 mai 1996 :
- le rapport de M. CATUS, conseiller ;
- les observations de Maître CELICE, avocat de M. Jean-Claude X...

- les observations de Maître BOUYSSOU, avocat de la commune de Toulouse ;
- et les conclusions de M. BRENIER, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par arrêté du 24 juillet 1995, le maire de Toulouse a mis M. X... en demeure de faire cesser le péril résultant de l'état du mur bordant sa propriété le long du chemin départemental n 4 ; que M. X... fait appel du jugement en date du 24 juillet 1995 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation dudit arrêté ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que le jugement attaqué vise le jugement en date du 18 octobre 1994 par lequel le tribunal administratif, avant de statuer sur la demande de M. X..., a décidé qu'il serait procédé à une expertise ; que ce jugement avant dire droit visait et analysait la demande et les différents mémoires présentés par le requérant ; que par suite ce dernier n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier pour n'avoir ni viser ni analyser sa demande et ses mémoires en réplique ;
Sur la domanialité publique du mur litigieux :
Considérant qu'il appartient au juge administratif de se prononcer sur l'existence, l'étendue et les limites du domaine public, même en l'absence d'acte administratif délimitant ledit domaine, sauf à renvoyer à l'autorité judiciaire la solution d'une question préjudicielle de propriété lorsque, à l'appui de la contestation, sont invoqués des titres privés dont l'examen soulève une difficulté sérieuse ; qu'il suit de là que si, au cours d'une procédure engagée contre un arrêté municipal pris en application des dispositions des articles L.511-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, le propriétaire présumé de l'ouvrage menaçant ruine à qui est notifié l'arrêté de péril se prévaut à l'encontre dudit arrêté de la domanialité publique de l'ouvrage dont s'agit, le juge administratif est compétent pour examiner le bien-fondé de cette prétention sans avoir, sous la réserve ci-dessus indiquée, à surseoir à statuer sur le litige jusqu'à ce que les tribunaux de l'ordre judiciaire se soient prononcés sur une question préjudicielle de propriété ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et qu'il n'est pas contesté, que le mur bordant la propriété de M. X... le long du chemin départemental n 4 a été édifié au début du siècle par les anciens propriétaires de ladite propriété ; que M. X..., qui ne produit aucun titre relatif au transfert de sa propriété, ne saurait utilement contester en être le propriétaire en se bornant à solliciter la production par la commune de Toulouse de l'acte administratif délimitant l'assiette du chemin départemental n 4 dont elle n'est pas propriétaire et dès lors qu'il n'établit pas qu'un tel acte existerait ; qu'ainsi, et quelle que soit la destination du mur litigieux, le moyen tiré de son appartenance au domaine public départemental ne peut être accueilli ;
Sur les causes du péril :
Considérant que les dispositions des articles L.511-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, qui prévoient, notamment, de mettre à la charge du propriétaire les mesures destinées à remédier à l'état de péril de son immeuble ne sont pas applicables au cas où la ruine dont est menacé cet immeuble est la conséquence d'accidents naturels tels que ceux qu'énumère l'article L.131-2-8 du code des communes ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné par le tribunal administratif dans son jugement avant dire droit du 18 octobre 1994, que le mur bordant la propriété de M. X... présente des crevasses et d'importantes fissures ; que si l'état de ruine qui est le sien a été provoqué par des glissements de terrain, cet état a été rendu possible par l'insuffisance d'armature des arches et de la dalle du couronnement, et par l'oxydation des aciers armant les arches, et résulte, ainsi, d'un défaut de construction ; que dans ces conditions les risques de destruction de l'immeuble ne peuvent pas être regardés comme provenant d'une cause extérieure à celui-ci ; que dès lors, et contrairement à ce que soutient le requérant, le maire de Toulouse a pu légalement se fonder sur les dispositions de l'article L.511-1 du code de la construction et de l'habitation pour ordonner la démolition du mur litigieux ;
Sur l'étendue des travaux à exécuter :
Considérant qu'aux termes de l'article L.511-1 du code de la construction et de l'habitation : "Le maire peut prescrire la réparation ou la démolition des murs, bâtiments ou édifices quelconques lorsqu'ils menacent ruine et qu'ils pourraient, par leur effondrement, compromettre la sécurité ou lorsque, d'une façon générale, ils n'offrent pas les garanties de solidité nécessaires au maintien de la sécurité publique ..." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et qu'il n'est pas contesté, que le mur de soutènement de la propriété de M. X... est susceptible, en raison de son état de ruine de s'effondrer ; qu'il constitue donc un danger pour la sécurité publique ; qu'il n'est pas possible de faire cesser ce péril par la réparation dudit immeuble ; que par suite le maire de Toulouse et le tribunal administratif ont à bon droit ordonné sa démolition ;
Considérant cependant qu'il résulte des termes mêmes de l'article L.511-1 précité que le maire, et par suite le juge administratif, ne peuvent que prescrire la démolition ou la réparation des immeubles menaçant ruine et susceptibles de compromettre la sécurité publique ; qu'ainsi c'est à tort que le maire de Toulouse et les premiers juges ont en outre ordonné à M. X... de construire un ouvrage destiné à remplacer l'ouvrage précité et propre à contenir des glissements de terrain lui appartenant ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... est seulement fondé à demander que l'arrêté de péril litigieux soit annulé en tant qu'il lui ordonne de remplacer le mur de soutènement de sa propriété après sa démolition par une structure mieux adaptée à la nature particulière du site, et à demander que le jugement attaqué soit réformé par la suppression de l'obligation qui lui est faite de construire, après démolition du mur de soutènement de sa propriété, un ouvrage propre à contenir les glissements de terrain ;
Sur les autres conclusions de la requête :

Considérant que comme il a été dit précédemment il n'appartient au juge administratif que d'ordonner la démolition ou la réparation des immeubles qui, menaçant ruine, compromettent la sécurité publique ; qu'il suit de là que les conclusions de M. X... tendant à ce que la cour, ordonne, outre la démolition du mur litigieux, le "talutage" de son terrain ne peuvent qu'être écartées ; que toutefois et dans la mesure où le talutage du terrain serait indispensable, il appartiendrait au requérant d'y procéder de sa propre initiative ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'aux termes de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de condamner M. X... à payer à la commune de Toulouse la somme de 6.000 F qu'elle demande au titre des dispositions précitées de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et de condamner la commune de Toulouse à payer à M. X... la somme de 15.000 F qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1ER : M. X..., propriétaire de l'immeuble sis ..., devra dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt procéder à la démolition totale du mur de soutènement de sa propriété construit le long du chemin départemental n 4.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 24 juillet 1995 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Toulouse tendant à la condamnation de M. X..., sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, à lui payer la somme de 6.000 F sont rejetées.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 95BX01613
Date de la décision : 27/06/1996
Type d'affaire : Administrative

Analyses

POLICE ADMINISTRATIVE - POLICE GENERALE - SECURITE PUBLIQUE - IMMEUBLES MENACANT RUINE.

POLICE ADMINISTRATIVE - POLICE GENERALE - SECURITE PUBLIQUE - IMMEUBLES MENACANT RUINE - CHARGE DES TRAVAUX ET RESPONSABILITE.


Références :

Code de la construction et de l'habitation L511-1
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. CATUS
Rapporteur public ?: M. BRENIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;1996-06-27;95bx01613 ?
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