La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/06/1997 | FRANCE | N°96BX00024

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3e chambre, 24 juin 1997, 96BX00024


Vu le recours, enregistré au greffe de la cour le 15 janvier, et le mémoire complémentaire enregistré le 16 avril 1996, présenté par le ministre du travail et des affaires sociales ;
Le MINISTRE DU TRAVAIL ET DES AFFAIRES SOCIALES demande à la cour :
1 ) de réformer le jugement en date du 9 novembre 1995 par lequel le tribunal administratif de Limoges a condamné l'Etat à réparer les conséquences dommageables, pour la SNC X...
Y..., de l'ouverture dans des conditions irrégulières d'une officine de pharmacie par Mlle Z... ;
2 ) de ramener le montant de l'indemnité a

ccordée par ce jugement à la somme de 108.518 F ;
Vu les autres pièces du...

Vu le recours, enregistré au greffe de la cour le 15 janvier, et le mémoire complémentaire enregistré le 16 avril 1996, présenté par le ministre du travail et des affaires sociales ;
Le MINISTRE DU TRAVAIL ET DES AFFAIRES SOCIALES demande à la cour :
1 ) de réformer le jugement en date du 9 novembre 1995 par lequel le tribunal administratif de Limoges a condamné l'Etat à réparer les conséquences dommageables, pour la SNC X...
Y..., de l'ouverture dans des conditions irrégulières d'une officine de pharmacie par Mlle Z... ;
2 ) de ramener le montant de l'indemnité accordée par ce jugement à la somme de 108.518 F ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 juin 1997: - le rapport de M. BICHET, conseiller ;
- les observations de M. X... ;
- et les conclusions de M. PEANO, commissaire du gouvernement ; sur les conclusions du recours du ministre En ce qui concerne la régularité du jugement :

Considérant que la circonstance que le jugement attaqué ne comporte aucune mention de l'ordonnance en date du 1er juillet 1994 par laquelle le président du tribunal administratif de Limoges, statuant en référé, a condamné l'Etat à verser à la SNC X...
Y... une indemnité de 225.000 F à titre de provision, n'est pas, eu égard au caractère provisionnel de la somme allouée qui s'impute nécessairement sur la condamnation prononcée par l'article 1er dudit jugement, de nature à entacher celui-ci d'une irrégularité susceptible d'entraîner son annulation ;
En ce qui concerne les conclusions tendant à la minoration de l'indemnité accordée à la SNC X...
Y... :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que par une décision en date du 23 octobre 1989, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêté du préfet de la Corrèze du 28 mars 1986, autorisant, à titre dérogatoire, Mlle Z... à ouvrir une officine de pharmacie au motif que le quartier de la ville de Brive susceptible d'être spécifiquement desservi par cette officine, compte tenu des pharmacies préexistantes, ne présentait pas de caractère attractif et abritait une population dont, ni le chiffre, ni l'évolution connue n'engendrent des besoins exigeant l'adjonction d'un pharmacie supplémentaire ; que la SNC X...
Y... qui exploite une officine voisine de celle illégalement ouverte par Mlle Z..., est en droit, ce qui n'est pas contesté par le ministre, d'obtenir la réparation du préjudice direct et certain qu'elle a subi du fait de cette illégalité fautive, entre le mois d'août 1986, ouverture effective de la pharmacie de Mlle Z... et le 20 décembre 1989 date à laquelle celle-ci a remis sa licence à l'administration ;
Considérant que pour contester l'évaluation du préjudice faite par le jugement attaqué, le ministre propose un mode de calcul fondé sur l'évolution du chiffre d'affaires réalisé par l'officine de la SNC X...
Y... en 1985 selon le taux moyen de progression des recettes des officines pharmaceutiques enregistré de 1985 à 1989 ; que cette méthode est inadaptée en l'espèce dés lors qu'elle ne repose pas sur les données propres de l'exploitation laquelle est assurée par les requérants depuis le milieu de l'année 1986, date d'acquisition de l'officine par la SNC X...
Y... qui y a ensuite apporté d'importants aménagements; que le ministre ne conteste pas la méthode retenue par le jugement attaqué, fondée sur une perte de clientèle estimée à 661 habitants, laquelle prend nécessairement en compte, par l'intermédiaire du montant annuel moyen par habitant des dépenses réalisées dans les officines pharmaceutiques, les incidences des mesures d'économie en matière de dépenses de santé intervenues au cours de la période concernée ; qu'il résulte de ce qui précède que le recours du ministre tendant à la minoration de l'indemnité allouée par le jugement attaqué doit être rejeté ;
SUR LE RECOURS INCIDENT DE M. X... ET DE LA SNC X... LARCHER En ce qui concerne les pertes de bénéfices :

Considérant, d'une part, que M. X... et la SNC X...
Y... demandent de porter l'évaluation du préjudice subi par la SNC X...
Y..., du chef de la perte de bénéfices, de 666.736 F à 766.200 F, à raison de l'application de taux d'excédent brut corrigés pour tenir compte du caractère non variable d'un certain nombre de charges ; que cette modification apportée à la méthode initiale qui n'est contestée ni dans son principe ni dans ses modalités de calcul, est assortie de justifications suffisantes; qu'il y a lieu de faire droit aux conclusions susmentionnées au profit de la SNC Floirat Y..., M. X... ne justifiant pas avoir subi un préjudice distinct au titre des pertes de bénéfices ;
En ce qui concerne le préjudice moral :
Considérant que si M. X..., à titre personnel, et la SNC Floirat-Larcher, allèguent avoir fait l'objet, du fait de leur contestation de l'autorisation délivrée en 1986 à Mlle Z..., de critiques locales, notamment par voie de presse, de manifestation et de tracts, ils se bornent à produire une lettre du préfet faisant état d'un bulletin diffusé gratuitement dans le quartier de leur officine en mars 1990 ; qu'ils ne justifient, ni ainsi, ni par la circonstance qu'ils ont dû engager des instances contentieuses pour faire valoir leurs droits, de l'atteinte alléguée ; que leurs conclusions tendant à l'indemnisation du préjudice moral qu'ils auraient subi doivent être rejetées ;
En ce qui concerne les intérêts et la capitalisation des intérêts :
Considérant, d'une part, qu'en application de l'article 1153 du code civil la somme de 766.200 F portera intérêts à compter du 15 novembre 1990, date de présentation de la demande de M. X... et de la SNC X...
Y... au tribunal administratif de Limoges ;
Considérant d'autre part, que la capitalisation des intérêts a été demandée le 15 novembre 1994 ; qu'à cette date il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dés lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, les intérêts échus à cette date seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts ;
En ce qui concerne les frais irrépétibles exposés en première instance :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;

Considérant que si M. X... et la SNC X...
Y... soutiennent qu'ils ont dû exposer des frais en première instance qu'ils estiment à 80.000 F et que les travaux réalisés par M. X... sont assimilables à une expertise, il ne résulte pas de l'instruction que les premiers juges aient fait une inexacte appréciation des circonstances de l'espèce en fixant à 4.000 F l'indemnité due à la SNC X...
Y... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
En ce qui concerne l'application des intérêts moratoires :
Considérant que même en l'absence de demande en ce sens, tout jugement prononçant une condamnation à une indemnité fait courir les intérêts du jour de son prononcé jusqu'à son exécution au taux légal puis, en application des dispositions de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1975, au taux majoré s'il n'est pas exécuté dans les deux mois de sa notification ; que, par suite, les conclusions des intimés tendant d'une part, à ce que l'indemnité accordée par les premiers juges au titre des frais irrépétibles soit assortie des intérêts au taux légal à compter de la notification du jugement, d'autre part, à ce que les sommes qui ont été allouées par ledit jugement portent majoration d'intérêts à compter du 15 janvier 1996 sont dépourvues de tout objet et doivent être rejetées ;
En ce qui concerne les frais irrépétibles exposés dans la présente instance :
Considérant que l'Etat n'est pas la partie perdante dans la présente instance au regard des conclusions présentées à titre personnel par M. X... ; que les conclusions présentées par M. X... et la SNC X...
Y... tendant à l'allocation d'une somme de 12.000 F au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens doivent être rejetées en tant qu'elles émanent de M. X... ; qu'il y a lieu, par contre, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à payer à la SNC X...
Y... une somme de 3.000 F au titre desdits frais ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SNC X...
Y... est fondée à demander la réformation du jugement en date du 9 novembre 1995 du tribunal administratif de Limoges ;
Article 1 ER : La somme de six cent soixante six mille sept cent trente six francs (666.736 F) que l'Etat a été condamné à verser à la SNC X...
Y... par l'article 1er du jugement en date du 9 novembre 1995 du tribunal administratif de Limoges est portée à sept cent soixante six mille deux cents francs (766.200 F).
Article 2 : Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 15 novembre 1990. Les intérêts échus à la date du 15 novembre 1994 seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : Le jugement en date du 9 novembre 1995 du tribunal administratif de Limoges est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : L'Etat est condamné à verser la somme de 3.000 F à la SNC X...
Y... au titre de l'article l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 5 : Les conclusions du recours du MINISTRE DU TRAVAIL ET DES AFFAIRES SOCIALES et le surplus des conclusions du recours incident de M. X... et de la SNC X...
Y... sont rejetés.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 96BX00024
Date de la décision : 24/06/1997
Type d'affaire : Administrative

Analyses

60-04-03-02-01 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - EVALUATION DU PREJUDICE - PREJUDICE MATERIEL - PERTE DE REVENUS


Références :

Code civil 1153, 1154
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Loi 75-619 du 11 juillet 1975 art. 3


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. BICHET
Rapporteur public ?: M. PEANO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;1997-06-24;96bx00024 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award