La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/12/1997 | FRANCE | N°95BX00520

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3e chambre, 30 décembre 1997, 95BX00520


Vu, enregistrés les 10 avril 1995, 12 janvier 1996 et 15 janvier 1997, la requête et les mémoires complémentaires présentés par le ministre du budget puis par le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES, qui demande à la Cour :
1 ) de réformer le jugement du tribunal administratif de Pau en date du 15 décembre 1994 en ce qu'il a accordé à la caisse régionale de crédit agricole mutuel des Pyrénées-Atlantiques la réduction des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 1981, 1982, 1983 et 1984 ;
2) de remettre intégraleme

nt les impositions contestées à la charge de la caisse régionale de crédit ag...

Vu, enregistrés les 10 avril 1995, 12 janvier 1996 et 15 janvier 1997, la requête et les mémoires complémentaires présentés par le ministre du budget puis par le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES, qui demande à la Cour :
1 ) de réformer le jugement du tribunal administratif de Pau en date du 15 décembre 1994 en ce qu'il a accordé à la caisse régionale de crédit agricole mutuel des Pyrénées-Atlantiques la réduction des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 1981, 1982, 1983 et 1984 ;
2) de remettre intégralement les impositions contestées à la charge de la caisse régionale de crédit agricole mutuel Pyrénées-Gascogne ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 décembre 1997 :
- le rapport de M. HEINIS, conseiller ;
- les observations de M. Saint Martin de la caisse régionale de crédit agricole mutuel Pyrénées-Gascogne ;
- et les conclusions de D. PEANO, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la caisse régionale de crédit agricole mutuel des Pyrénées-Atlantiques a consenti à la société civile immobilière agricole des Pyrénées-Atlantiques, dont elle détenait 110 parts, des avances sans intérêts s'élevant à 3.600.000 F en 1981, 11.643.642 F en 1982, 44.943.642 F en 1983 et 55.950.000 F en 1984, sans que les caisses locales de Bayonne et de Pau, qui détenaient les 30 parts restantes, s'associent à ce financement ; que le vérificateur a estimé que la caisse régionale avait commis un acte anormal de gestion en se privant d'une trésorerie d'un montant égal au produit de ces avances multiplié par la quote-part des caisses locales dans le capital de la S.C.I.A., que cette trésorerie aurait pu être rémunérée au taux servi par la caisse nationale sur le compte spécial A, 2ème tranche, et qu'il y avait donc lieu de réintégrer dans les bases d'imposition de la C.R.C.A.M. le montant des intérêts ainsi calculés s'élevant à 88.518 F en 1981, 167.052 F en 1982, 674.228 F en 1983 et 1.490.013 F en 1984 ;
Considérant que lorsque l'administration fait état d'un prêt sans intérêt il appartient au contribuable d'établir l'existence de contreparties de nature à justifier le caractère normal de l'absence de perception d'intérêts ; qu'il suit de là que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour accorder la réduction demandée par la C.R.C.A.M. des Pyrénées-Atlantiques des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie, le tribunal administratif de Pau s'est fondé sur ce que l'administration n'apportait pas la preuve qui lui incombe de l'inexistence de toute contrepartie aux avances sans intérêt remises en cause par le vérificateur ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par la C.R.C.A.M. des Pyrénées-Atlantiques, devenue la C.R.C.A.M. Pyrénées-Gascogne, tant devant la cour que devant le tribunal administratif ;
En ce qui concerne la loi fiscale :
Considérant que le fait de consentir des avances sans intérêt à un tiers constitue un acte étranger à une gestion commerciale normale ; que cette règle doit recevoir application même si le bénéficiaire de ces avances est une filiale de la société, hormis le cas où la situation des deux sociétés serait telle que la société-mère puisse être regardée comme ayant agi dans son propre intérêt en venant en aide à une filiale en difficulté ;

Considérant que si la société requérante fait valoir qu'elle a, en consentant les avances sans intérêt en litige à la S.C.I.A. des Pyrénées-Atlantiques, prévenu une augmentation du loyer à verser à cette société au titre de la location de l'immeuble dans lequel elle avait domicilié son siège social et généré des soldes créditeurs sur les comptes ouverts dans ses livres par la S.C.I.A. et par les caisses locales de Bayonne et Pau, lui offrant ainsi la possibilité de placements rémunérateurs et d'un développement de son activité de prêt respectant le ratio de couverture de ses risques par ses fonds propres imposé par la réglementation, ces circonstances ne sont pas de nature à justifier l'avantage anormal ainsi consenti ; que la situation financière de la S.C.I.A., qui n'a cessé de s'améliorer au cours des années en litige, n'était pas non plus susceptible, dans le cas de l'espèce, de justifier un tel avantage ; que le moyen tiré de ce que la perception d'intérêts aurait aggravé les déficits de la S.C.I.A. déductibles des résultats de la C.R.C.A.M. ou diminué les bénéfices tirés par celle-ci de sa participation au capital de la S.C.I.A., dont les résultats étaient imposés entre ses mains dans les conditions prévues par l'article 8 du code général des impôts, ne peut être retenu dès lors que la S.C.I.A. ne peut pas comptabiliser en charges déductibles des intérêts qu'elle n'est juridiquement pas tenue de payer ; que, dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve du caractère anormal de cette absence d'intérêts ;
Considérant que pour évaluer l'importance de l'avantage anormal en cause le vérificateur devait tenir compte de la seule rémunération que la C.R.C.A.M. des Pyrénées-Atlantiques aurait pu obtenir du placement des avances litigieuses, dans des conditions analogues, auprès d'un établissement financier ou d'un organisme assimilé ; que la caisse ne saurait dès lors contester le taux d'intérêt retenu par le vérificateur en se prévalant du prix de revient des ressources utilisées pour ces avances ; qu'elle ne peut pas non plus invoquer le taux de 5 % alors fixé par l'article 618 du code rural pour la rémunération des parts du capital des caisses de crédit agricole mutuel, dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que les avances en cause étaient constitutives d'un prêt à long terme ;
En ce qui concerne la doctrine administrative :
Considérant, d'une part, que si la C.R.C.A.M. se prévaut, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la documentation administrative de la direction générale des impôts 4 A - 2152, n 7 et 8, du 1er septembre 1993, qui assimile la renonciation à recettes à un abandon de créances, il résulte des termes de cette documentation que celle-ci concerne exclusivement la renonciation à recettes consentie par une société mère à sa filiale dans le cadre d'une gestion normale ; qu'elle ne peut, par suite, être utilement invoquée s'agissant des avances sans intérêt dont la S.C.I.A. des Pyrénées-Atlantiques a bénéficié dans les conditions susanalysées ;

Considérant, d'autre part, que si la notification de redressements a identifié un acte anormal de gestion au seul motif qu'un avantage anormal avait été consenti par le contribuable aux autres associés de la S.C.I.A. des Pyrénées-Atlantiques, sans relever qu'il avait bénéficié à la S.C.I.A. elle-même, cette omission ne constitue pas une prise de position formelle sur l'appréciation d'une situation de fait au regard du texte fiscal, dont la caisse régionale puisse se prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les compléments d'impôt sur les sociétés assignés à la C.R.C.A.M. des Pyrénées-Atlantiques au titre des années 1981, 1982, 1983 et 1984, dont le tribunal administratif de Pau a prononcé la décharge, doivent être intégralement remis à sa charge ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Pau en date du 15 décembre 1994 est réformé en ce qu'il a accordé à la caisse régionale de crédit agricole mutuel des Pyrénées-Atlantiques la réduction des compléments d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignés au titre des années 1981, 1982, 1983 et 1984.
Article 2 : Les compléments d'impôt sur les sociétés assignés à la C.R.C.A.M. des Pyrénées-Atlantiques, devenue la caisse régionale de crédit agricole mutuel Pyrénées-Gascogne, au titre des années 1981, 1982, 1983 et 1984, dont le tribunal administratif de Pau a prononcé la décharge, sont intégralement remis à la charge de la C.R.C.A.M. Pyrénées-Gascogne.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-02-01-04-083 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - DETERMINATION DU BENEFICE NET - RELATIONS ENTRE SOCIETES D'UN MEME GROUPE


Références :

CGI 8
CGI Livre des procédures fiscales L80 A, L80 B
Code rural 618


Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. HEINIS
Rapporteur public ?: D. PEANO

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3e chambre
Date de la décision : 30/12/1997
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 95BX00520
Numéro NOR : CETATEXT000007491781 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;1997-12-30;95bx00520 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award