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30/12/1997 | FRANCE | N°95BX01712

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2e chambre, 30 décembre 1997, 95BX01712


Vu la requête enregistrée le 13 décembre 1995 au greffe de la cour, présentée pour la SOCIETE ANONYME (S.A.) ROTRACO, dont le siège social est situé ... (Charente-Maritime), représentée par son président-directeur général en exercice, par Me X..., avocat ;
La S.A. ROTRACO demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 28 juin 1995 par lequel le tribunal administratif de Poitiers l'a condamnée à payer à la commune de Pisany une somme de 281 065,40 F en réparation des désordres affectant le court de tennis, a mis à sa charge les frais d'expertise d'un montan

t de 20 909,42 F ainsi qu'une somme de 3 000 F au titre de l'article L.8-...

Vu la requête enregistrée le 13 décembre 1995 au greffe de la cour, présentée pour la SOCIETE ANONYME (S.A.) ROTRACO, dont le siège social est situé ... (Charente-Maritime), représentée par son président-directeur général en exercice, par Me X..., avocat ;
La S.A. ROTRACO demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 28 juin 1995 par lequel le tribunal administratif de Poitiers l'a condamnée à payer à la commune de Pisany une somme de 281 065,40 F en réparation des désordres affectant le court de tennis, a mis à sa charge les frais d'expertise d'un montant de 20 909,42 F ainsi qu'une somme de 3 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratif et des cours administratives d'appel ;
2°) de rejeter la demande présentée par la commune de Pisany devant le tribunal administratif de Poitiers ;
3 ) à titre subsidiaire, d'ordonner une nouvelle expertise ;
4 ) de mettre l'ensemble des frais d'expertise à la charge de la commune de Pisany et condamner ladite commune à lui verser une somme de 20 000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;
Vu le code civil ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 décembre 1997 :
- le rapport de M. CHEMIN, rapporteur ;
- les observations de Me GAGNERE, avocat de la S.A. ROTRACO et de Me LACAZE, avocat de la commune de Pisany ;
- et les conclusions de M. VIVENS, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'en 1988, la commune de Pisany a confié à la société ROTRACO la construction d'un court de tennis ; que la réception des travaux, prononcée à compter du 7 décembre 1988 a été assortie de réserves portant notamment sur l'enrobé du terrain décrit comme étant "soufflé et fissuré par endroits" ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que les fissures apparues postérieurement à la réception constitueraient des désordres d'une nature différente de ceux qui avaient donné lieu aux réserves mentionnées dans le procès-verbal de réception ; qu'ainsi l'existence de ces réserves auxquelles l'entreprise n'a pas remédié faisait obstacle à ce que la responsabilité de cette entreprise pût être recherchée sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ; que seule la responsabilité contractuelle du constructeur pouvait être mise en jeu par le maître de l'ouvrage à raison des malfaçons constatées ; qu'il suit de là que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a retenu la responsabilité décennale de la société ROTRACO ;
Considérant qu'il y a lieu pour la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur la responsabilité contractuelle de ladite société, laquelle a été invoquée par la commune de Pisany dans sa demande introductive d'instance ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné en référé par le premier juge, et dont les conclusions permettent à la cour de statuer en toute connaissance de cause, que les désordres ont pour origine le fait que le court de tennis a été réalisé sur un terrain non stabilisé composé d'alluvions argileuses et d'un remblai hétérogène qui aurait dû être compacté avant la mise en place du revêtement ; qu'ils sont imputables à une faute de la société ROTRACO, entreprise spécialisée seule intervenante dans la construction, qui a réalisé la plate-forme sans s'assurer de la stabilité du support sur lequel elle avait accepté de construire et qui n'a formulé aucune réserve ni attiré l'attention du maître de l'ouvrage ; que si la société requérante soutient que la commune était tenue, en application du cahier des charges "court de tennis" établi par la fédération nationale des constructeurs d'équipement des sports et loisirs et de la fédération française de tennis, de lui fournir un support présentant les qualités nécessaires et indispensables à la réalisation de l'ouvrage, il est constant qu'un tel document n'était pas contractuel ; qu'il n'est pas établi que la commune aurait en toute connaissance de cause pris le risque de faire construire le court de tennis sur un terrain non stabilisé, ni qu'en s'abstenant, pour des raisons d'économie, de recourir à un maître d'oeuvre ou de demander l'avis des services de la direction départementale de l'équipement, elle aurait commis une faute de nature à exonérer même partiellement la société ROTRACO de sa responsabilité ;

Considérant que les travaux de réfection du court de tennis préconisés par l'expert s'élèvent à la somme de 294 082,94 F, comprenant la pose de bordures périphériques indispensables à la bonne tenue de l'enrobé ; que ces travaux étant strictement nécessaires pour remédier aux désordres, il n'y a lieu de prendre en compte aucune plus-value ; qu'ainsi, la société ROTRACO n'est pas fondée à soutenir que les travaux de réfection constituerait un "enrichissement sans cause" au profit de la commune de Pisany, et cette dernière est fondée à demander, par la voie de l'appel incident, que l'intégralité des travaux de réfection soit mise à la charge de la société requérante ; qu'en revanche, le court de tennis ayant continué à être utilisé, la commune n'établit pas le préjudice de jouissance qu'elle invoque ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise, que la S.A. ROTRACO n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers l'a condamnée à verser à la commune de Pisany une somme de 281 065,40 F et a mis à sa charge les frais d'expertise ; qu'en revanche, la commune de Pisany est fondée à demander que la somme de 281 065,40 F que la S.A. ROTRACO a été condamnée à lui verser par le jugement attaqué soit portée à 294 082,94 F ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant, d'une part, que les dispositions précitées font obstacle à ce que la commune de Pisany, qui n'est pas tenue aux dépens, soit condamnée à payer à la S.A. ROTRACO la somme de 20 000 F qu'elle demande au titre de frais exposés par elle et non compris dans les dépens tant en première instance qu'en appel ;
Considérant, d'autre part, qu'en allouant à la commune de Pisany une somme de 3 000 F au titre des frais qu'elle a exposés en première instance, les premiers juges n'ont pas fait une inexacte appréciation des circonstances de l'espèce ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la S.A. ROTRACO à verser à la commune de Pisany une somme de 5 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens dans la présente instance ;
Article 1er : La requête de la S.A. ROTRACO est rejetée.
Article 2 : La somme de 281 065,40 F que la S.A. ROTRACO a été condamnée à verser à la commune de Pisany par le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 28 juin 1995 est portée à 294 082,94 F (deux cent quatre-vingt quatorze mille quatre-vingt deux francs et quatre-vingt quatorze centimes).
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 28 juin 1995 est réformé en ce qu'il a de contraire avec le présent arrêt.
Article 4 : La S.A. ROTRACO versera à la commune de Pisany une somme de 5 000 F (cinq mille francs) au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 5 : Le surplus de l'appel incident de la commune de Pisany est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 95BX01712
Date de la décision : 30/12/1997
Type d'affaire : Administrative

Analyses

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - CHAMP D'APPLICATION.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - FAITS DE NATURE A ENTRAINER LA RESPONSABILITE DE L'ENTREPRENEUR.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DECENNALE - CHAMP D'APPLICATION.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - REPARATION - PREJUDICE INDEMNISABLE - EVALUATION - PLUS-VALUES APPORTEES AUX OUVRAGES PAR LA REPARATION DES DESORDRES.


Références :

Code civil 1792, 2270
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. CHEMIN
Rapporteur public ?: M. VIVENS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;1997-12-30;95bx01712 ?
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