Vu 1 ) enregistrés les 6 février et 5 mai 1995, 20 janvier 1997, 20 février et 9 mars 1998, sous le n 95BX00169, la requête et les mémoires complémentaires présentés pour M. Jean X... demeurant Les Chassors à Chateauneuf-sur-Charente (Charente), par Me Hontas, avocat ;
M. X... demande à la Cour :
1) de réformer le jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 26 octobre 1994 en ce qu'il a rejeté ses conclusions tendant, d'une part à la restitution des sommes versées par lui, au cours des campagnes 1975/1976, 1976/1977, 1977/1978, 1978/1979 et 1979/1980, pour l'achat de droits de commercialisation et de stockage ou à titre de cotisation professionnelle et, d'autre part, à la condamnation du bureau national interprofessionnel du Cognac ou de l'Etat à lui verser une indemnité et à lui rembourser les frais exposés ;
2) d'annuler les règlements sur le fondement desquels ces droits de commercialisation et de stockage et cette cotisation professionnelle ont été perçus ;
3) de condamner le bureau national interprofessionnel du Cognac ou l'Etat, d'une part à lui restituer les sommes versées à ce bureau, d'un montant total de 168.302 F, d'autre part à lui verser en sus une indemnité de 361.608 F, enfin à lui payer une somme de 15.000 F en application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu 2 ) enregistrés les 9 février 1995 et 6 mars 1998 sous le n 95BX00177, la requête et le mémoire complémentaire présentés pour le BUREAU NATIONAL INTERPROFESSIONNEL DU COGNAC, ayant son siège 23, allées du Champ de Mars à Cognac (Charente), par Me Kappelhoff-Lançon, avocat ;
Le BUREAU NATIONAL INTERPROFESSIONNEL DU COGNAC demande à la Cour :
1) de réformer le jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 26 octobre 1994 en ce qu'il l'a condamné à verser à M. X..., d'une part une somme de 50.917 F en répétition de sommes indûment perçues au titre de la campagne 1976/1977 et, d'autre part, une somme de 5.000 F au titre des frais irrépétibles ;
2) de rejeter les conclusions de M. X... tendant à sa condamnation à lui verser ces sommes ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu l'arrêté du ministre de l'agriculture portant organisation interprofessionnelle du marché des vins et des eaux-de-vie de Cognac en date du 9 juillet 1946 ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience et informées que la décision était susceptible d'être fondée sur l'incompétence de la juridiction administrative pour statuer sur les conclusions de M. X... à fins de restitution et d'indemnité ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 juin 1998 :
- le rapport de M. HEINIS ;
- les observations de Me Moreau, substituant Me Hontas, avocat de M. X... ;
- les observations de Me Kappelhoff-Lançon, avocat du BUREAU NATIONAL INTERPROFESSIONNEL DU COGNAC ;
- et les conclusions de D. PEANO, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes susvisées concernent le même jugement et présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Considérant que le commissaire du gouvernement auprès du bureau national interprofessionnel du Cognac a, par des décisions en dates des 25 septembre 1975, 2 juillet 1976, 22 juillet 1977 et 8 décembre 1978, imposé aux viticulteurs des quotas de production en organisant toutefois l'achat et la vente entre viticulteurs, sous le contrôle du bureau, de droits de commercialisation et de stockage ; qu'il a, par une décision en date du 29 octobre 1979, maintenu des quotas de production et institué une "cotisation professionnelle destinée à contribuer au financement des mesures d'organisation du marché des vins et eaux-de-vie de Cognac" ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
Considérant qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. X... tendant à l'annulation de la décision susmentionnée du 2 juillet 1976, dès lors que celle-ci a été annulée par le Conseil d'Etat le 19 juin 1981 ; que les conclusions de M. X... à fin d'annulation des décisions précitées des 25 septembre 1975, 22 juillet 1977, 8 décembre 1978 et 29 octobre 1979 sont présentées pour la première fois en appel et, par suite, irrecevables ;
Sur les conclusions à fins de restitution et d'indemnité :
Considérant, en premier lieu, que M. X... a, au cours des campagnes 1975/1976, 1976/1977, 1977/1978 et 1978/1979, acheté des droits de commercialisation et de stockage au bureau national interprofessionnel du Cognac, en lui versant une somme totale de 168.302 F qui a ensuite été reversée aux viticulteurs ayant vendu ces droits ; que la somme versée par M. X..., qui lui a été réclamée en sa qualité d'usager du service d'échange de droits de commercialisation et de stockage géré par ce bureau, en contrepartie directe et proportionnelle du service rendu et aux fins de couvrir les charges correspondantes, a le caractère d'une redevance pour service rendu ; que l'activité de vente de tels droits à laquelle ledit bureau s'est livré, qui a eu pour effet la réalisation ultérieure de ventes de Cognac dans des conditions de droit commun par les viticulteurs ayant acheté ces droits et le reversement du produit de leur vente aux viticulteurs vendeurs, apparaît comme la réalisation d'opérations de nature privée ; que si M. X... demande la restitution de la somme de 168.302 F qu'il a versée au bureau à ce titre, un tel litige, portant sur le bien-fondé de redevances qui constituent la rémunération des prestations d'un service public à caractère industriel et commercial, relève des tribunaux judiciaires ;
Considérant, en deuxième lieu, que M. X... a versé une cotisation de 12.192 F au bureau national interprofessionnel du Cognac en application de la décision susmentionnée du 29 octobre 1979 ; que cette cotisation était perçue à raison de 300 F par hectolitre d'alcool pur pour toute commercialisation excédant 4,5 hectolitres d'alcool pur par hectare, dans la limite d'un plafond de 8 hectolitres pour l'ensemble de la région ou de 8,5 hectolitres pour la Grande Champagne ; que ce prélèvement obligatoire au profit d'un établissement public, qui se rattache à la circulation des produits et dont l'assiette est exprimée en hectolitres d'alcool pur commercialisé au delà du plafond, présente le caractère d'une contribution indirecte ; que si M. X... demande la restitution de cette imposition, il résulte des dispositions de l'article L. 199 du livre des procédures fiscales que le tribunal compétent en matière de contributions indirectes est le tribunal de grande instance ;
Considérant, en troisième lieu, que si M. X... demande la condamnation du bureau national interprofessionnel du Cognac et de l'Etat à lui verser, pour réparer le préjudice financier qu'il a subi du fait des versements litigieux, une indemnité calculée en appliquant à ces versements le taux d'intérêt du Crédit agricole, ces conclusions ne sont pas détachables de la contestation portant sur le bien-fondé des mêmes versements dont le contentieux ressortit à l'autorité judiciaire ; que M. X... n'invoque aucun autre chef de préjudice ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif ne s'est pas déclaré incompétent pour connaître des conclusions de M. X... à fin de restitution des sommes versées au bureau national interprofessionnel du Cognac et à fin d'indemnité ;
Sur les frais irrépétibles :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées pour M. X... et pour le bureau national interprofessionnel du Cognac au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 26 octobre 1994 est annulé.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. X... à fin d'annulation de la décision du commissaire du gouvernement auprès du bureau national interprofessionnel du Cognac en date du 2 juillet 1976.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
Article 4 : Les conclusions présentées pour le bureau national interprofessionnel du Cognac au titre des frais irrépétibles sont rejetées.