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01/04/1999 | FRANCE | N°97BX00111

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1e chambre, 01 avril 1999, 97BX00111


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 18 janvier 1997, présentée par le MINISTRE DE LA DEFENSE ;
Le MINISTRE DE LA DEFENSE demande à la cour :
- d'annuler le jugement en date du 5 décembre 1996 par lequel le magistrat délégué du tribunal administratif de Toulouse a annulé sa décision du 15 juillet 1992 par laquelle il a rejeté la demande de Mme X... tendant au versement de l'indemnité pour charges militaires au taux "chef de famille" ;
- de rejeter la requête de Mme X... devant le tribunal administratif de Toulouse ;
- de prononcer le sursis à exécu

tion du jugement dont il fait appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
V...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 18 janvier 1997, présentée par le MINISTRE DE LA DEFENSE ;
Le MINISTRE DE LA DEFENSE demande à la cour :
- d'annuler le jugement en date du 5 décembre 1996 par lequel le magistrat délégué du tribunal administratif de Toulouse a annulé sa décision du 15 juillet 1992 par laquelle il a rejeté la demande de Mme X... tendant au versement de l'indemnité pour charges militaires au taux "chef de famille" ;
- de rejeter la requête de Mme X... devant le tribunal administratif de Toulouse ;
- de prononcer le sursis à exécution du jugement dont il fait appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le préambule de la constitution du 27 octobre 1946 ;
Vu la loi n 70-459 du 4 juin 1970 sur l'autorité parentale ;
Vu la loi n 94-1163 du 29 décembre 1994 ;
Vu le décret n 59-1193 du 13 octobre 1959 modifié fixant le régime de l'indemnité pour charges militaires ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 mars 1999 :
- le rapport de A. BEC, rapporteur ;
- et les conclusions de J-F. DESRAME, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 47-II de la loi du 29 décembre 1994 : "Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les attributions individuelles de l'indemnité pour charges militaires en tant qu'elles sont contestées par le moyen tiré des conséquences entraînées par l'intervention de la loi n 70-459 du 4 juin 1970 relative à l'autorité parentale à l'égard des dispositions du décret n 59-1193 du 13 octobre 1959 fixant le régime de l'indemnité pour charges militaires sont validées" ;
Considérant que l'article 2 du décret du 13 octobre 1959 prévoit, pour l'indemnité pour charges militaires, un taux "célibataire" et deux taux "chef de famille" selon le nombre d'enfants du militaire concerné ; que l'article 47 II précité de la loi du 29 décembre 1994 a pour objet de permettre à l'administration d'attribuer le taux dit "chef de famille" à l'un des conjoints d'un couple de militaires, celui n'en bénéficiant pas relevant alors du taux dit "célibataire" ; que la loi a ainsi, entendu instituer le principe de non cumul d'un même avantage au sein d'un couple de militaires, et conférer ainsi à l'administration, pour l'attribution de l'indemnité en cause, le pouvoir de regarder comme militaire un agent marié ; que ces dispositions ne sauraient être regardées comme portant atteinte au principe du droit à un procès équitable énoncé par les stipulations de l'article 6 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'elles ont été édictées dans un but d'intérêt général, en vue d'éviter que, pendant une période transitoire précédant la publication du décret du 14 octobre 1994, les deux membres de certains couples de militaires ne se trouvent en situation de pouvoir obtenir cumulativement le bénéfice des avantages familiaux attachés à l'indemnité pour charges militaires ; qu'en invoquant la violation, par l'article 47-II de la loi du 29 décembre 1994, précitée, des engagements internationaux de la France, Mme X... n'assortit par le moyen de précisions permettant d'en apprécier la portée ; qu'enfin, il n'appartient au juge administratif d'apprécier la conformité des lois avec des dispositions d'ordre constitutionnel ;
Considérant toutefois que, pour refuser à Mme X... le bénéfice du taux "chef de famille", le ministre s'est également fondé sur le principe du versement de ce taux à l'époux, lorsque celui-ci est également militaire ; que si ce motif est contraire au principe d'égalité des rémunérations entre sexes, il n'apparaît pas que l'administration aurait pris une décision différente si elle s'était fondée uniquement sur les autres motifs ; qu'il suit de là que le MINISTRE DE LA DEFENSE est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler la décision litigieuse, le tribunal administratif de Toulouse a retenu un motif tiré de l'absence de texte lui conférant le pouvoir d'attribuer le taux dit "célibataire" à un agent marié, du défaut de base légale du principe de non cumul et de l'illégalité de l'attribution de principe du taux "chef de famille" à l'époux ;
Considérant qu'il appartient à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens présentés par Mme X... à l'appui de sa demande devant le tribunal administratif de Toulouse ;

Considérant, en premier lieu, que l'article 47-II de la loi du 29 décembre 1994 précité, a eu pour effet de valider les attributions individuelles de l'indemnité pour charges militaires, en tant qu'elles sont contestées par le moyen tiré des conséquences entraînées par l'intervention de la loi n 70-459 du 4 juin 1970 relative à l'autorité parentale, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée ; qu'à la date de publication de la loi du 29 décembre 1994, précitée, la décision en date du 15 juillet 1992 par laquelle le MINISTRE DE LA DEFENSE a refusé à Mme X... le bénéfice du taux "chef de famille" n'avait fait l'objet d'aucune décision de justice passée en force de chose jugée ; que, par suite, le moyen tiré par Mme X... des effets de la loi du 4 juin 1970, est inopérant et doit être rejeté ;
Considérant, en second lieu, qu'en admettant même que le refus de cumul du taux "chef de famille" au sein d'un couple de militaires méconnaisse la nature juridique réelle de l'indemnité pour charges militaires, la prohibition de ce cumul résulte des dispositions de l'article 47-II de la loi du 29 décembre 1994, précité ; que, par suite, Mme X... n'est pas fondée à soutenir que le refus du cumul du taux "chef de famille" serait illégal pour méconnaître la nature de l'indemnité en cause ;
Considérant ensuite que les couples de militaires, qui perçoivent par suite tous deux l'indemnité pour charges militaires, se trouvent, au regard des textes relatifs à la fonction publique, dans une situation différente des militaires qui, conjoints d'un civil, sont de ce fait seuls à percevoir l'indemnité pour charges militaires ; que l'équivalence, entre conjoints militaires, des obligations de service, et leurs effets cumulés sur un couple de militaires, sont sans influence sur leur droit à bénéficier du taux "chef de famille" lequel est lié non à la nature ou aux conséquences des obligations de service, mais à la situation de famille des militaires concernés ; que le refus de faire bénéficier Mme X... du taux chef de famille est fondé non sur sa qualité d'épouse, mais sur la circonstance que son mari bénéficiait déjà de ce taux ; que, par suite, le moyen tiré d'une inégalité de traitement entre agents publics, fondée sur le sexe, doit être rejeté ;
Considérant enfin que si l'article 3 du décret du 13 octobre 1959, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée, qualifie de chef de famille, pour l'attribution du taux "chef de famille", tout militaire marié, les dispositions de l'article 47-II de la loi du 27 décembre 1994 ont eu pour effet de prohiber de manière rétroactive le cumul du taux "chef de famille" par les conjoints d'un couple de militaires ; que, par suite, Mme X... n'est pas fondée à soutenir qu'en tant que militaire marié, elle avait droit à percevoir l'indemnité pour charges militaires au taux "chef de famille" en même temps que son mari ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE LA DEFENSE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé sa décision en date du 15 juillet 1992 ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 5 décembre 1996 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Toulouse est rejetée.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 97BX00111
Date de la décision : 01/04/1999
Type d'affaire : Administrative

Analyses

08-01-01-06 ARMEES - PERSONNELS DES ARMEES - QUESTIONS COMMUNES A L'ENSEMBLE DES PERSONNELS MILITAIRES - SOLDES ET AVANTAGES DIVERS


Références :

Décret 59-1193 du 13 octobre 1959 art. 2, art. 3
Loi 70-459 du 04 juin 1970
Loi 94-1163 du 29 décembre 1994 art. 47


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: A. BEC
Rapporteur public ?: J-F. DESRAME

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;1999-04-01;97bx00111 ?
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