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12/04/1999 | FRANCE | N°96BX01890

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2e chambre, 12 avril 1999, 96BX01890


Vu l'ordonnance en date du 11 janvier 1989, enregistrée au greffe de la cour le 3 mars 1989, par laquelle le président de la 6ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour, en application de l'article 17 du décret n 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée par Maître Ravanel, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation, pour Mme Anne X... LE BAIL, contre un jugement du tribunal administratif de Poitiers du 8 juin 1988 ;
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 août et 8 décembre 1988, au sec

rétariat du contentieux du Conseil d'Etat présentés pour Mme X... ...

Vu l'ordonnance en date du 11 janvier 1989, enregistrée au greffe de la cour le 3 mars 1989, par laquelle le président de la 6ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour, en application de l'article 17 du décret n 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée par Maître Ravanel, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation, pour Mme Anne X... LE BAIL, contre un jugement du tribunal administratif de Poitiers du 8 juin 1988 ;
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 août et 8 décembre 1988, au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat présentés pour Mme X... LE BAIL, demeurant au lieu-dit "Les Risque-tout" à Smarves (Vienne) ;
Mme X... LE BAIL demande au Conseil d'Etat :
1 ) de réformer le jugement du 8 juin 1988 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a condamné le syndicat intercommunal mixte d'équipement rural pour l'eau et l'assainissement du département de la Vienne (SIVEER), à lui verser une indemnité de 92 960,62 F, qu'elle estime insuffisante, en réparation du préjudice subi dans son élevage de truites de 1984 à 1987 ;
2 ) de condamner le syndicat intercommunal mixte d'équipement rural pour l'eau et l'assainissement du département de la Vienne, et en tant que de besoin le S.I.V.O.M. de la région de Couhé, la société à responsabilité limitée Marteau et l'Etat à lui verser la somme de 740 606 F ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code rural ;
Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 mars 1999 :
- le rapport de M. REY, rapporteur ;
- les observations de Maître MADY, avocat de Mme X... LE BAIL ;
- et les conclusions de M. VIVENS, commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme X... LE BAIL possède dans la commune de Payré (Vienne), une pisciculture alimentée notamment par les eaux de la rivière Fontaine de la Roche ; qu'elle a demandé réparation du préjudice subi au titre de cette activité piscicole au cours des années 1984 à 1987 du fait de la réduction du débit de ce cours d'eau, par suite des pompages effectués en amont de son installation par le SIVEER ; que, dans le dernier état de ses écritures, elle ne recherche que la responsabilité dudit syndicat ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert désigné par le tribunal administratif, qu'au cours des années en litige de nombreuses réductions d'arrivée d'eau ont causé des pertes ponctuelles de truite et ont amené la requérante à fermer entièrement un des quatre bassins d'élevage de sa pisciculture ; que la réduction du débit de la rivière Fontaine de la Roche résulte de prélèvements par le SIVEER, concessionnaire de la station de pompage installée sur la source alimentant ladite rivière, de quantités d'eau excédant celles auxquelles il était autorisé en vertu de l'arrêté préfectoral du 27 novembre 1984 ;
Considérant que si l'arrêté du préfet de la Vienne en date du 20 juin 1983, autorisant Mme X... LE BAIL à établir un enclos destiné à la pisciculture, dispose dans son article 9 que le permissionnaire ne pourra prétendre à aucune indemnité, ni dédommagement quelconque si l'administration reconnaît nécessaire de prendre, dans l'intérêt de la salubrité publique, de la police et de la répartition des eaux des mesures qui le privent, d'une manière temporaire ou définitive, de tout ou partie des avantages résultant du présent règlement, le SIVEER ne peut utilement, pour refuser de réparer les dommages résultant de ses prélèvements excessifs sur la source de Fontaine de la Roche, se prévaloir de ces dispositions de l'arrêté du préfet qui a été pris, par ce dernier, dans le cadre des pouvoirs de police des eaux et de la pêche qu'il exerce en qualité de représentant de l'Etat ; qu'ainsi, comme l'a estimé à bon droit le tribunal administratif, la responsabilité du SIVEER se trouve engagée, en raison des conséquences dommageables du fonctionnement d'un ouvrage public à l'égard duquel la requérante est tiers ;
Sur le préjudice :
Considérant, en premier lieu, qu'en fixant à 92 960,62 F le montant de l'indemnité due par le SIVEER à Mme X... LE BAIL au titre de la mortalité des truites et des frais de constat et de sommation qu'elle a dû engager pour établir la réalité de son préjudice, le tribunal administratif a fait une juste appréciation du préjudice dont s'agit ;
Considérant, en second lieu, que la requérante a droit, en outre, à l'indemnisation du préjudice financier et commercial qu'elle a subi du fait de l'obligation dans laquelle elle s'est trouvée de fermer un des bassins et qu'elle n'a pu développer normalement son exploitation ; que, alors qu'il n'y a pas lieu de le limiter à la valeur des installations et compte tenu des indications fournies par l'expert qui ne sont pas sérieusement contestées, il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à 510 606 F ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la somme que le SIVEER a été condamné à verser à Mme X... LE BAIL par le jugement attaqué doit être portée de 92 960,22 F à 603 566,22 F ;
Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :
Considérant que la requérante a droit aux intérêts de cette somme à compter du 21 octobre 1987, date d'enregistrement de sa demande devant le tribunal administratif ;
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée, la première fois, le 8 août 1988, qu'à cette date, il n'était pas dû une année d'intérêts, que dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de rejeter cette demande ; qu'en revanche la capitalisation demandée les 8 décembre 1988, 24 août 1990, 27 décembre 1991 et 9 avril 1998 doit être admise en vertu de ces mêmes dispositions ;
Sur les frais de l'expertise de première instance :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de maintenir les frais de l'expertise à la charge du SIVEER ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande de la S.A.R.L. Marteau tendant à l'allocation d'une somme au titre des frais qu'elle a exposés ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner le SIVEER à verser à Mme X... LE BAIL une somme de 6 000 F sur le fondement des dispositions susvisées ;
Article 1er : La somme que le SIVEER a été condamné à verser à Mme X... LE BAIL par le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 8 juin 1988 est portée à 603 566,22 F.
Article 2 : Cette somme portera intérêt au taux légal à compter du 21 octobre 1987. Les intérêts échus les 8 décembre 1988, 24 août 1990, 27 décembre 1991 et 9 avril 1998 seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêt.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 8 juin 1988 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : Le SIVEER est condamné à verser à Mme X... LE BAIL la somme de 6 000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 5 : Les conclusions de la S.A.R.L. Marteau tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.
Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X... LE BAIL et le recours incident du SIVEER sont rejetés.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 96BX01890
Date de la décision : 12/04/1999
Type d'affaire : Administrative

Analyses

AGRICULTURE - CHASSE ET PECHE - PECHE EN EAU DOUCE - DOMMAGES CAUSES AUX PECHEURS ET EXPLOITANTS PISCICOLES.

EAUX - TRAVAUX - PRELEVEMENTS D'EAU SUR LES COURS D'EAU ET ETANGS.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - EVALUATION DU PREJUDICE - PREJUDICE MATERIEL.

TRAVAUX PUBLICS - REGLES COMMUNES A L'ENSEMBLE DES DOMMAGES DE TRAVAUX PUBLICS - REGIME DE LA RESPONSABILITE - QUALITE DE TIERS.


Références :

Arrêté du 20 juin 1983 art. 9
Arrêté du 27 novembre 1984
Code civil 1154
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. REY
Rapporteur public ?: M. VIVENS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;1999-04-12;96bx01890 ?
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