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21/06/1999 | FRANCE | N°97BX01498

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2e chambre, 21 juin 1999, 97BX01498


Vu le recours enregistré au greffe de la cour le 17 septembre 1997, présenté par le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE ;
Le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement en date du 20 mai 1997 du tribunal administratif de Toulouse en tant qu'il a annulé, à la demande de M. Albert X..., la décision du 5 septembre 1994 par laquelle le greffier-comptable du centre de détention de Muret a opéré une retenue de 20% sur la totalité de la pension de retraite du mois d'août 1994 de M. X..., alors détenu audit centre ;
2 ) de rejete

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Vu le recours enregistré au greffe de la cour le 17 septembre 1997, présenté par le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE ;
Le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement en date du 20 mai 1997 du tribunal administratif de Toulouse en tant qu'il a annulé, à la demande de M. Albert X..., la décision du 5 septembre 1994 par laquelle le greffier-comptable du centre de détention de Muret a opéré une retenue de 20% sur la totalité de la pension de retraite du mois d'août 1994 de M. X..., alors détenu audit centre ;
2 ) de rejeter la demande présentée par M. Albert X... devant le tribunal administratif de Toulouse ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de procédure pénale ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 mai 1999 :
- le rapport de M. CHEMIN, rapporteur ;
- et les conclusions de M. VIVENS, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'à la suite du transfert de M. X... au centre détention de Muret (Haute-Garonne) le 16 juin 1994, le service comptable de cet établissement, par une décision en date du 5 septembre 1994 prise sur le fondement des dispositions de l'article D.113 du code de procédure pénale, a opéré, sur les mensualités de juillet et août 1994 de la pension de retraite versée à M. X... par la caisse régionale d'assurance maladie de Toulouse, un prélèvement de 20% ; que le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE fait appel du jugement du 20 mai 1997 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé cette décision ;
Sur la légalité de la décision attaquée :
Considérant qu'aux termes de l'article 728-1 du code de procédure pénale : "Les valeurs pécuniaires des détenus, inscrites à un compte nominatif ouvert à l'établissement pénitentiaire, sont divisées en trois parts ; la première sur laquelle seules les parties civiles et les créanciers d'aliments peuvent faire valoir leurs droits ; la deuxième, affectée au pécule de libération, qui ne peut faire l'objet d'aucune voie d'exécution ; la troisième, laissée à la libre disposition des détenus. Les sommes destinées à l'indemnisation des parties civiles leur sont versées directement, sous réserve des droits des créanciers d'aliments, à la demande du procureur de la République, par l'établissement pénitentiaire. La consistance des valeurs pécuniaires, le montant respectif des parts et les modalités de gestion du compte nominatif sont fixés par décret." ; qu'en vertu de l'article D.111 du code de procédure pénale : "La rémunération du travail est répartie conformément aux dispositions des articles D.112 et suivants, après qu'aient été précomptées les cotisations à caractère social mises à la charge des détenus" et selon l'article D.113 du même code :'"Une part égale à 20 p. 100 de la rémunération telle qu'elle résulte de l'article D.111 est affectée à la constitution d'un pécule de libération ainsi qu'à l'indemnisation des parties civiles. Les prélèvements relatifs à l'indemnisation des parties civiles sont limités à la moitié de cette part" ; qu'enfin, aux termes de l'article D.329 du code de procédure pénale : "Les sommes qui échoient aux détenus sont considérées comme ayant un caractère alimentaire, dans la mesure où elles n'excèdent pas chaque mois la somme fixée par arrêté du ministre de la justice. Elles sont dès lors entièrement versées à la part disponible jusqu'à concurrence de cette somme et pour le surplus elles sont soumises au prélèvement prévu à l'article D.113 sous réserve des dispositions particulières concernant les rentes, les pensions et les indemnités. ( ...)" ;
Considérant que les pensions de retraite dont les détenus sont titulaires à raison de leur activité salariée antérieure à leur détention ne constituent pas une rémunération du travail des détenus au sens de l'article D.111 précité ; que les sommes qu'ils perçoivent à ce titre entrent dès lors dans le champ d'application des dispositions de l'article D.329 en vertu desquelles elles sont considérées comme ayant un caractère alimentaire à concurrence de la somme de 1 200 F fixée par l'article A.42 du code de procédure pénale ; que le prélèvement de 20% prévu par l'article D.113 ne peut donc être opéré qu'après déduction de la provision alimentaire ainsi définie à l'article D.329, sous réserve des dispositions particulières concernant lesdites pensions ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L.355-2 du code de la sécurité sociale, les pensions de retraite prévues par le présent code sont saisissables dans les mêmes conditions et limites que les salaires ; qu'ainsi la fraction saisissable desdites pensions est déterminée par les dispositions des articles R.145-2 et R.145-3 du code du travail ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le prélèvement de 20% effectué conformément à l'article D.329 du code de procédure pénale sur la pension de retraite de M. X... excéderait la part saisissable de ladite pension définie par les dispositions particulières précitées ; que, par suite, en effectuant ce prélèvement sur la totalité des deux mensualités de la pension de retraite litigieuse sans déduire au préalable la provision alimentaire définie à l'article D.329 précité, l'administration pénitentiaire a entaché sa décision d'illégalité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cette décision ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-2 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'aux termes de l'article L.8-2 susmentionné : "Lorsqu'un jugement ou un arrêt implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ... prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, le tribunal administratif ou la cours administrative d'appel, saisi de conclusions en ce sens, prescrit cette mesure, assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution, par le même jugement ou le même arrêt" ;
Considérant qu'aux termes de l'article D.323 du code de procédure pénale : "La part disponible du compte nominatif peut être utilisée par le détenu, conformément aux règlements, pour effectuer des achats à l'intérieur de l'établissement pénitentiaire, ou même, sur autorisation spéciale, pour procéder à des versements au dehors. En cas d'évasion du titulaire du compte, cette part est appliquée d'office à l'indemnisation des parties civiles. Le reliquat est acquis à l'Etat, sauf décision du ministre de la justice ordonnant qu'il soit rétabli en tout ou partie au profit du détenu lorsque ce dernier a été repris." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X... s'est évadé à la suite d'une permission de sortir le 8 avril 1997; que, dans ces conditions, l'exécution du présent arrêt n'implique pas nécessairement que les sommes indûment prélevées sur sa pension de retraite lui soit restituées sur la part disponible de son compte nominatif ; que, par suite, ses conclusions tendant à la restitution desdites sommes, sur le fondement de l'article L.8-2 précité, doivent être rejetées ;
Article 1er : Le recours du GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE et les conclusions de M. Albert X... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 8-2 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetés.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 97BX01498
Date de la décision : 21/06/1999
Type d'affaire : Administrative

Analyses

JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES ET JUDICIAIRES - EXECUTION DES JUGEMENTS - EXECUTION DES PEINES - SERVICE PUBLIC PENITENTIAIRE.

PROCEDURE - JUGEMENTS - EXECUTION DES JUGEMENTS.


Références :

Code de la sécurité sociale L355-2
Code de procédure pénale D113, 728-1, D111, D329, A42, L8-2, D323
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-2
Code du travail R145-2, R145-3


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. CHEMIN
Rapporteur public ?: M. VIVENS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;1999-06-21;97bx01498 ?
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