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14/02/2000 | FRANCE | N°96BX00786

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2e chambre, 14 février 2000, 96BX00786


Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 2 mai 1996, présentée pour la COMMUNE DE BOURGANEUF, représentée par son maire en exercice, par la S.C.P. d'avocats Haie-Pasquet-Veyrier ;
La COMMUNE DE BOURGANEUF demande à la cour :
1?) d'annuler le jugement en date du 21 mars 1996 par lequel le tribunal administratif de Limoges l'a condamnée à verser à M. X... la somme de 151 043,51 F avec les intérêts au taux légal à compter du 3 juillet 1992 en réparation des conséquences d'inondations qui se sont produites dans l'immeuble dont il est propriétaire, a mis à la char

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Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 2 mai 1996, présentée pour la COMMUNE DE BOURGANEUF, représentée par son maire en exercice, par la S.C.P. d'avocats Haie-Pasquet-Veyrier ;
La COMMUNE DE BOURGANEUF demande à la cour :
1?) d'annuler le jugement en date du 21 mars 1996 par lequel le tribunal administratif de Limoges l'a condamnée à verser à M. X... la somme de 151 043,51 F avec les intérêts au taux légal à compter du 3 juillet 1992 en réparation des conséquences d'inondations qui se sont produites dans l'immeuble dont il est propriétaire, a mis à la charge de la commune les frais d'expertise d'un montant de 18 119,23 F et l'a condamnée à lui verser une somme de 4 000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
2?) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Limoges et laisser à sa charge les frais d'expertise, subsidiairement réformer le jugement attaqué en ce qui concerne l'évaluation du préjudice en réduisant notablement le montant de la condamnation prononcée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 28 Pluviôse an VIII ;
Vu la loi n? 68-1250 du 31 décembre 1968 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n? 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 janvier 2000 :
- le rapport de M. CHEMIN, rapporteur ;
- les observations de Maître VEYRIER, avocat de la COMMUNE DE BOURGANEUF ;
- les observations de Maître DHAEZE-LABOUDIE, avocat de M. Jean-Baptiste X... ;
- et les conclusions de M. REY, commissaire du gouvernement ;

Sur l'exception de prescription quadriennale :
Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la loi du 31 décembre 1968 susvisée : "La prescription est interrompue par : ( ...) toute communication écrite d'une administration intéressée, même si cette communication n'a pas été faite directement au créancier qui s'en prévaut, dès lors que cette communication a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance ( ...). Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l'interruption". ( ...) ;
Considérant que les lettres du 13 avril 1988 par lesquelles le maire de Bourganeuf a, d'une part, transmis à l'assureur de la commune une copie de la demande de M. X... concernant les dommages occasionnés à son immeuble le 29 mars 1986 et, d'autre part, transmis copie de ce courrier à M. X... en lui indiquant qu'il ne manquerait pas de le tenir informé dès qu'une réponse lui sera parvenue au sujet de cette affaire, constituent des communications écrites d'une administration relatives au fait générateur de la créance au sens des dispositions de l'article 2 de la loi du 31 décembre 1968 précitée, et ce alors même que ces communications ne comportaient aucune reconnaissance de responsabilité de la part de la commune ou une éventuelle proposition d'indemnisation ; qu'ainsi, la prescription quadriennale a été interrompue et a recommencé à courir pour un nouveau délai de quatre ans à compter du 1er janvier 1989 ; que, dès lors, c'est à bon droit que le tribunal administratif a estimé que la créance éventuelle de M. X... n'était pas prescrite le 3 juillet 1992, date de l'enregistrement de la demande de M. X... devant ce tribunal ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné par le juge des référés, que l'inondation qui s'est produite le 29 mars 1986 dans la cave et la maison d'habitation de M. X... a pour origine des remontées d'eau en provenance de l'égout communal à la suite d'un violent orage ; que l'inondation qui s'est produite en octobre 1987 dans la cave de l'immeuble a été provoquée par des infiltrations d'eau dans une excavation réalisée dans le cadre de travaux de voirie de la commune ; qu'enfin, l'inondation survenue en février 1991 dans la même cave résulte de la rupture, sous l'effet du gel, d'une canalisation d'alimentation en eau potable ; que ces inondations, qui sont ainsi imputables à l'existence et au fonctionnement d'ouvrages publics communaux ou à la réalisation de travaux publics à l'égard desquels M. X... a la qualité de tiers, engagent la responsabilité de la commune ;

Considérant qu'il n'est pas établi que les précipitations qui se sont abattues sur Bourganeuf le 29 mars 1986 présentaient un caractère de violence imprévisible constituant un cas de force majeure ; que la COMMUNE DE BOURGANEUF n'apporte pas la preuve que l'insuffisance alléguée du propre système d'évacuation des eaux usés de M. X... aurait eu pour effet d'aggraver les dommages ; que le défaut d'aération de l'immeuble reproché également au propriétaire n'est pas davantage établi ; que, par suite, la COMMUNE DE BOURGANEUF n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges l'a condamnée à réparer la totalité des conséquences dommageables des inondations qui se sont produites dans l'immeuble de M. X... ;
Sur le préjudice :
Considérant que le coût non contesté des dommages occasionnés à l'immeuble s'élève, selon l'estimation de l'expert, à 49 721 F correspondant à la réfection des plâtres, menuiserie intérieure, peintures et papier peints de la maison d'habitation ; qu'eu égard à l'usage que M. X... faisait de son bien, les sommes retenues à ce titre n'appelaient pas un abattement de vétusté ; qu'il n'y a pas lieu non plus d'appliquer un abattement de vétusté sur la somme destinée seulement à remettre en état des panneaux de boiseries sculptées et le remplacement de deux congélateurs dont l'un était neuf et l'autre, ancien, a été évalué par l'expert à 800 F ; que la COMMUNE DE BOURGANEUF n'établit pas que les frais de nettoyage et de sauvetage des biens sinistrés, évalués par l'expert à 2 800 F, feraient double emploi avec le coût des travaux de réfection et que le coût de 389 bouteilles de vins fins jugées irrécupérables et estimé à 81 072 F serait exagéré ; que la réalité du préjudice subi du fait de l'occupation d'un logement humide avec émanation de mauvaises odeurs pendant plusieurs semaines n'est pas sérieusement contesté ; que l'évaluation à 4 500 F du préjudice moral subi par M. X... du fait des trois inondations n'apparaît pas excessive ; qu'ainsi, la commune requérante n'est pas fondée à demander la réduction du montant de l'indemnité qu'elle a été condamnée à verser à M. X... ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit plus haut que c'est à bon droit que les premiers juges ont mis les frais de l'expertise à la charge de la COMMUNE DE BOURGANEUF ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE BOURGANEUF n'est pas fondée à demander l'annulation ou la réformation du jugement attaqué ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions susmentionnées, de condamner la COMMUNE DE BOURGANEUF à verser à M. X... une somme de 5 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens à l'occasion de la présente instance ;
Article 1er : La requête de la COMMUNE DE BOURGANEUF est rejetée.
Article 2 : La COMMUNE DE BOURGANEUF versera à M. Jean-Baptiste X... la somme de 5 000 F en application des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 96BX00786
Date de la décision : 14/02/2000
Type d'affaire : Administrative

Analyses

COMPTABILITE PUBLIQUE - DETTES DES COLLECTIVITES PUBLIQUES - PRESCRIPTION QUADRIENNALE - REGIME DE LA LOI DU 31 DECEMBRE 1968 - INTERRUPTION DU COURS DU DELAI.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - FONDEMENT DE LA RESPONSABILITE - RESPONSABILITE SANS FAUTE - RESPONSABILITE ENCOURUE DU FAIT DE L'EXECUTION - DE L'EXISTENCE OU DU FONCTIONNEMENT DE TRAVAUX OU D'OUVRAGES PUBLICS - VICTIMES AUTRES QUE LES USAGERS DE L'OUVRAGE PUBLIC - TIERS.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - CAUSES EXONERATOIRES DE RESPONSABILITE.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - EVALUATION DU PREJUDICE.

TRAVAUX PUBLICS - REGLES COMMUNES A L'ENSEMBLE DES DOMMAGES DE TRAVAUX PUBLICS - REGIME DE LA RESPONSABILITE - QUALITE DE TIERS.

TRAVAUX PUBLICS - REGLES COMMUNES A L'ENSEMBLE DES DOMMAGES DE TRAVAUX PUBLICS - CAUSES D'EXONERATION - FAUTE DE LA VICTIME - ABSENCE DE FAUTE.

TRAVAUX PUBLICS - REGLES COMMUNES A L'ENSEMBLE DES DOMMAGES DE TRAVAUX PUBLICS - CAUSES D'EXONERATION - FORCE MAJEURE - ABSENCE.


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Loi 68-1250 du 31 décembre 1968 art. 2


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. CHEMIN
Rapporteur public ?: M. REY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2000-02-14;96bx00786 ?
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