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18/11/2003 | FRANCE | N°99BX00359

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3eme chambre (formation a 3), 18 novembre 2003, 99BX00359


Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 17 février 1999, présentée pour Mme Jacqueline X, demeurant ... ;

Mme X demande à la Cour :

- d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 10 décembre 1998, en tant qu'il ne fait pas droit intégralement à sa demande ;

- de lui accorder la décharge totale des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités correspondantes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1985, 1986 et 1987 ainsi que des impositions supplémentaires à la taxe sur la valeur a

joutée et des pénalités correspondantes auxquelles elle a été assujettie pour la pér...

Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 17 février 1999, présentée pour Mme Jacqueline X, demeurant ... ;

Mme X demande à la Cour :

- d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 10 décembre 1998, en tant qu'il ne fait pas droit intégralement à sa demande ;

- de lui accorder la décharge totale des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités correspondantes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1985, 1986 et 1987 ainsi que des impositions supplémentaires à la taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes auxquelles elle a été assujettie pour la période du 15 janvier 1985 au 31 décembre 1987 ;

.....................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Classement CNIJ : 19-02-01-02-03 C+

19-02-03-06

19-04-02-01-06-01-04

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 octobre 2003 :

- le rapport de Mme Texier, président-assesseur,

- les observations de Me Cazcarra, avocat pour Mme Jacqueline X ;

- et les conclusions de Mme Boulard, commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme X, qui exploitait à Agen un commerce de vêtements pour enfants, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui a porté, en matière d'impôt sur le revenu, sur les années 1985, 1986 et 1987 et, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, sur la période du 15 janvier 1985 au 31 décembre 1987 ; que l'intéressée ayant saisi le tribunal administratif de Bordeaux de demandes tendant à obtenir la décharge des impositions supplémentaires auxquelles elle a été assujettie à la suite de ce contrôle, le tribunal a, par un premier jugement en date du 3 juin 1993, joint les deux demandes, et, après avoir écarté les moyens soulevés par Mme X et tirés de l'irrégularité de la procédure d'imposition, a ordonné une expertise contradictoire aux fins d'examiner l'ensemble des documents, comptables ou autres, produits par Mme X et de nature à justifier du détail des recettes journalières des années en cause, et de fournir au tribunal tous les éléments lui permettant de déterminer, pour les trois années considérées, les chiffres d'affaires et les bénéfices réalisés par l'intéressée ; qu'au vu du rapport de l'expertise ainsi ordonnée, le tribunal administratif de Bordeaux a décidé que les bases d'imposition à l'impôt sur le revenu de Mme X devaient être réduites d'un montant de 9 236 F au titre de l'année 1986 et d'un montant de 5 926 F au titre de l'année 1987 ; qu'il a accordé à la requérante la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu correspondantes et a rejeté le surplus de ses demandes ; que Mme X fait appel de ce jugement en tant qu'il n'a fait droit que partiellement à ses demandes ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 166 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, alors en vigueur, dont les dispositions ont été reprises à l'article R. 621-9 du code de justice administrative : Le rapport est déposé au greffe. Il est accompagné d'un nombre de copies égal à celui des parties en litige ayant un intérêt distinct, augmenté de deux. - Le rapport est notifié, en copie, aux parties intéressées. Elles sont invitées à fournir leurs observations dans le délai d'un mois ; une prorogation de délai peut être accordée ;

Considérant que si, à la suite de l'expertise ordonnée par le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 3 juin 1993, l'expert a déposé son rapport au greffe du tribunal le 29 juin 1994, il ne résulte pas de l'instruction qu'il ait été procédé à la notification de ce rapport à Mme X ; que, dès lors, celle-ci est fondée à soutenir que le jugement attaqué a été rendu sur une procédure irrégulière et à en demander l'annulation en tant qu'il n'a fait droit que partiellement à ses demandes ;

Considérant que l'affaire est en état et qu'il y a lieu de l'évoquer pour y être statué immédiatement ;

Sur le fond :

Considérant qu'au soutien de ses demandes, tendant à obtenir la décharge des impositions litigieuses, Mme X conteste la régularité de la procédure d'imposition ainsi que le bien-fondé desdites impositions ;

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition ;

Considérant que, par un arrêt rendu le 17 juillet 1997 et devenu définitif, la cour de céans a statué sur la requête par laquelle Mme X a fait appel du jugement susmentionné du tribunal administratif de Bordeaux en date du 3 juin 1993 et a jugé que la procédure d'imposition était en l'espèce régulière, nonobstant l'irrégularité de l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires résultant de l'insuffisance de sa motivation ; que l'autorité qui s'attache à la chose jugée par l'arrêt du 17 juillet 1997 fait obstacle à ce que la cour examine à nouveau les moyens fondés sur l'irrégularité de la procédure d'imposition soulevés par Mme X dans les demandes adressées au tribunal administratif ainsi d'ailleurs que les moyens nouveaux fondés sur la même cause juridique soulevés devant la cour ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'un redressement, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. - Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière, lorsque le litige ou le redressement est soumis au juge ; que, d'autre part, en vertu de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition ;

Considérant que si les impositions supplémentaires auxquelles Mme X a été assujettie au titre de la taxe sur la valeur ajoutée et de l'impôt sur le revenu ont été établies conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, il résulte de l'arrêt susvisé du 17 juillet 1997 que cet avis était insuffisamment motivé ; que cette irrégularité a pour effet de mettre la preuve du bien-fondé de ces redressements à la charge de l'administration ; que toutefois, s'agissant des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de l'année 1987, il résulte du même arrêt que Mme X se trouvait en situation de taxation d'office ; que, par suite, en vertu des dispositions précitées de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, il lui incombe, dans cette mesure, d'apporter la preuve de l'exagération du chiffre d'affaires retenu par l'administration au titre de l'exercice 1987 ;

Considérant que pour reconstituer le chiffre d'affaires et les recettes réalisées par Mme X pour les exercices clos en 1985, 1986 et 1987, le vérificateur s'est fondé sur des constatations effectuées dans l'entreprise en 1988 et notamment sur des relevés de prix pratiqués par l'intéressée ; que cependant, alors que Mme X soutient qu'elle a travaillé dans des conditions différentes en 1988, qu'elle a dû procéder à des soldes plus importants dans le cadre du groupement Client-Roi , et qu'il résulte d'ailleurs des déclarations faites par l'intéressée que le chiffre d'affaires réalisé en 1988 était supérieur à celui des années antérieures et avait généré un coefficient de bénéfice supérieur, le service se prévaut de ce que la comptabilité comportait des anomalies lui ôtant toute valeur probante et justifiant sa mise à l'écart ; que cependant, la requérante a produit les pièces justificatives du détail de ses recettes ; que s'il résulte du rapport de l'expertise ordonnée par le tribunal administratif que les livres comptables produits enregistrent les recettes par journée de vente de manière globale, en ventilant les recettes normales et les soldes, et que, pour les mois de janvier, février et août 1985, les bandes enregistreuses enregistrent de manière presque systématique les ventes en solde à la suite des ventes effectuées à un prix normal, ce qui , selon l'expert, ne permet pas de donner une force probante à la totalité des informations extra comptables examinées , les irrégularités ainsi constatées ne sont pas telles qu'elles aient pu autoriser le service à écarter la comptabilité et à procéder à une reconstitution du chiffre d'affaires et des recettes ; que, dans ces conditions, l'administration n'établit pas que le chiffre d'affaires réalisé par Mme X pour la période correspondant aux exercices clos en 1985 et 1986 et les recettes déclarées par elle pour les exercices clos en 1985, 1986 et 1987, seraient supérieurs au chiffre d'affaires et aux recettes réalisées ;

Considérant en revanche que, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, Mme X n'établit pas, par les documents qu'elle produit, que la méthode de reconstitution suivie par le vérificateur pour la période correspondant à l'exercice clos en 1987 serait viciée dans son principe ; que, dans ces conditions, elle n'établit pas l'exagération du chiffre d'affaires reconstitué par le service ;

Considérant, enfin, que le tribunal administratif a jugé que les frais financiers exposés par Mme X devaient être déduits de ses bases d'imposition à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux à concurrence de 9 236 F au titre de l'année 1986 et de 5 926 F au titre de l'année 1987 ; que, pour le surplus, la requérante, à laquelle incombe, indépendamment de la procédure d'imposition suivie, d'établir la nature et le montant des charges qu'elle prétend déduire de ses bénéfices professionnels, n'établit pas, ni même d'ailleurs n'allègue, que les dégrèvements résultant de ces réductions de ses bases d'imposition, et non remises en cause par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, seraient insuffisants ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X est seulement fondée à solliciter la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1985 et 1986 ainsi que la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels elle a été assujettie au titre des années 1985, 1986 et 1987 à raison du rehaussement du bénéfice réalisé ;

Sur les frais d'expertise :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 207-1 du livre des procédures fiscales : Les frais d'expertise sont supportés par la partie qui n'obtient pas satisfaction. Le contribuable qui obtient partiellement gain de cause participe aux frais en proportion de la part de sa demande qui a été rejetée et compte tenu de l'état du litige au début de l'expertise ;

Considérant que dans les circonstances de l'espèce, les frais et honoraires des opérations de l'expertise, liquidés et taxés à la somme de 28 414 F, sont mis à la charge de Mme X à hauteur de 20%, soit 5 683 F (866 euros), et de l'Etat pour les 80% restants, soit 22 731 F (3 466 euros) ;

D E C I D E :

Article 1er : Les articles 3 et 4 du jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 10 décembre 1998 sont annulés.

Article 2 : Il est accordé à Mme X décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1985 et 1986 ainsi que la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels elle a été assujettie au titre des années 1985, 1986 et 1987 à raison du rehaussement du bénéfice procédant des minorations de recettes.

Article 3 : Le surplus des conclusions des demandes de Mme X devant le tribunal administratif de Bordeaux est rejeté.

Article 4 : Les frais et honoraires des opérations de l'expertise sont mis à la charge de Mme X à concurrence de 5 683 F (866 euros), et à la charge de l'Etat à concurrence de 22 731 F (3 466 euros).

5

99BX00359


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3eme chambre (formation a 3)
Numéro d'arrêt : 99BX00359
Date de la décision : 18/11/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. MADEC
Rapporteur ?: Mme TEXIER
Rapporteur public ?: Mme BOULARD
Avocat(s) : SCP MONOD-COLIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2003-11-18;99bx00359 ?
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