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14/10/2004 | FRANCE | N°01BX00116

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4eme chambre (formation a 3), 14 octobre 2004, 01BX00116


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 17 janvier 2001 et 15 février 2002, présentés par Mme X... Y, élisant domicile ... ; Mme Y demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 99/1174 du 29 juin 2000 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande dirigée contre la décision en date du 10 mars 1999 par laquelle le ministre de la défense a refusé de lui attribuer une pension de réversion à raison du décès de son mari ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;

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Vu les autres pièc...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 17 janvier 2001 et 15 février 2002, présentés par Mme X... Y, élisant domicile ... ; Mme Y demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 99/1174 du 29 juin 2000 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande dirigée contre la décision en date du 10 mars 1999 par laquelle le ministre de la défense a refusé de lui attribuer une pension de réversion à raison du décès de son mari ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 juillet 2004 :

- le rapport de M. Vié, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Chemin, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, : Les Hautes parties contractantes reconnaissent à toute personne relevant de leur juridiction les droits et libertés définis au titre 1 de la présente convention ; que l'article 14 de la même convention stipule que : La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ; qu'en vertu de l'article 1er du 1er protocole additionnel à cette convention : Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer 1'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes ;

Considérant que selon l'article L. 1 du code des pensions civiles et militaires de retraite : La pension est une allocation pécuniaire, personnelle et viagère accordée aux fonctionnaires civils et militaires et, après leur décès, à leurs ayants cause désignés par la loi, en rémunération des services qu'ils ont accomplis jusqu'à la cessation régulière de leurs fonctions. Le montant de la pension, qui tient compte du niveau, de la durée et de la nature des services accomplis, garantit en fin de carrière à son bénéficiaire des conditions matérielles d'existence en rapport avec la dignité de sa fonction ; qu'en vertu des dispositions combinées des articles L. 38 et L. 47 du même code, le conjoint survivant non séparé de corps d'un militaire peut, sous les réserves et les conditions prévues par ces articles, prétendre à la moitié de la pension obtenue par lui ; que, dès lors, les pensions de réversion constituent des créances qui doivent être regardées comme des biens au sens de l'article ler précité du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'une distinction entre des personnes placées dans une situation analogue est discriminatoire, au sens des stipulations précitées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, si elle n'est pas assortie de justifications objectives et raisonnables, c'est-à-dire si elle ne poursuit pas un but d'utilité publique, ou si elle n'est pas fondée sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec les buts de la loi ;

Considérant que les pensions de retraite constituent, pour les agents publics, une rémunération différée destinée à leur assurer, ou à assurer à leurs ayants cause, des conditions matérielles de vie en rapport avec la dignité de leurs fonctions passées ; que, par suite, la perte collective de la nationalité française survenue pour les pensionnés, ou leurs ayants cause, à l'occasion de l'accession à l'indépendance d'Etats antérieurement rattachés à la France ne peut être regardée comme un critère objectif et rationnel en rapport avec les buts du régime des pensions des agents publics, de nature à justifier une différence de traitement ; que les dispositions de l'article L. 58 du code des pensions civiles et militaires de retraite suspendant le droit à l'obtention d'une pension par les circonstances qui font perdre la qualité de Français ne peuvent donc être regardées comme compatibles avec la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en tant qu'elles n'excluent pas le cas d'une perte collective de nationalité à l'occasion d'un transfert de la souveraineté sur un territoire ; que, dès lors, les dispositions de cet article ne pouvaient justifier le refus opposé par le ministre de la défense à la demande de pension de réversion présentée par Mme Y ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme Y est fondée, d'une part, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande et, d'autre part, à demander l'annulation de la décision attaquée du 10 mars 1999 ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement en date du 29 juin 2000 du Tribunal administratif de Poitiers et la décision en date du 10 mars 1999 par laquelle le ministre de la défense a rejeté la demande de pension de réversion présentée par Mme Y sont annulés.

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N° 01BX00116


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4eme chambre (formation a 3)
Numéro d'arrêt : 01BX00116
Date de la décision : 14/10/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Composition du Tribunal
Président : Mme ERSTEIN
Rapporteur ?: M. Jean-Marc VIE
Rapporteur public ?: M. CHEMIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2004-10-14;01bx00116 ?
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