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29/03/2005 | FRANCE | N°01BX01333

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5eme chambre (formation a 3), 29 mars 2005, 01BX01333


Vu la requête enregistrée le 23 mai 2001, présentée pour la SA LA REVERIE, dont le siège est à Château Garnier (86310) ; La SA LA REVERIE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 1er mars 2001 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1993 au 31 décembre 1995 et des pénalités y afférentes, et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 10 000 F au titre de l'article L. 8-1 du co

de des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

2°) ...

Vu la requête enregistrée le 23 mai 2001, présentée pour la SA LA REVERIE, dont le siège est à Château Garnier (86310) ; La SA LA REVERIE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 1er mars 2001 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1993 au 31 décembre 1995 et des pénalités y afférentes, et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 10 000 F au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

2°) de lui accorder la décharge des impositions et pénalités contestées ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 10 000 F au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

…………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la sixième directive n° 77/388/CEE du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de l'action sociale et de la famille ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu la loi n° 87-1060 du 30 décembre 1987 ;

Vu la loi n° 75 ;535 du 30 juin 1975 relative aux institutions sociales et médico ;sociales, modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 février 2005 :

- le rapport de M. Le Gars, rapporteur ;

- les observations de Me Jacques Duval, avocat de la SA LA REVERIE ;

- les conclusions de M. Valeins, commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'aux termes du A de l'article 13 de la sixième directive nº 77-388 du Conseil des communautés européennes du 17 mai 1977, relatif aux exonérations de taxe sur la valeur ajoutée en faveur de certaines activités d'intérêt général : 1. Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les Etats membres exonèrent, dans les conditions qu'ils fixent en vue d'assurer l'application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels : (...) b) l'hospitalisation et les soins médicaux ainsi que les opérations qui leur sont étroitement liées, assurés par des organismes de droit public ou, dans des conditions sociales comparables à celles qui valent pour ces derniers, par des établissements hospitaliers, des centres de soins médicaux et de diagnostic et d'autres établissements de même nature dûment reconnus » ; qu'aux termes du a) du 2 du même article : Les Etats membres peuvent subordonner, cas par cas, l'octroi, à des organismes autres que ceux de droit public, de chacune des exonérations prévues au 1 sous b), g), h), i), l), m) et n) au respect de l'une ou plusieurs des conditions suivantes : - les organismes en question ne doivent pas avoir pour but la recherche systématique du profit, les bénéfices éventuels ne devant jamais être distribués mais devant être affectés au maintien ou à l'amélioration des prestations fournies, - ils doivent être gérés et administrés à titre essentiellement bénévole par des personnes n'ayant, par elles-mêmes ou par personnes interposées, aucun intérêt direct ou indirect dans les résultats de l'exploitation,

- ils doivent pratiquer des prix homologués ou, pour les opérations non susceptibles d'homologation des prix, des prix inférieurs à ceux exigés pour des opérations analogues par des entreprises commerciales soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, - les exonérations ne doivent pas être susceptibles de provoquer des distorsions de concurrence au détriment des entreprises commerciales assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée » ;

Considérant qu'aux termes du 1° bis du 4 de l'article 261 du code général des impôts dans sa rédaction applicable en l'espèce, issue de la loi n° 87-1060 du 30 décembre 1987 modifiée par la loi n° 93-1353 du 30 décembre 1993, sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : Les frais d'hospitalisation et de traitement dans les établissements de santé privés titulaires de l'autorisation mentionnée à l'article L. 712-8 du code de la santé publique » ; que, par ces dispositions, le législateur français, usant de la faculté qui lui est ouverte par les dispositions précitées de l'article 13 de la sixième directive, a étendu aux établissements de soins de droit privé exerçant leur activité dans un but lucratif le régime d'exonération prévu par l'article 13-A-1-b de ladite directive, en subordonnant toutefois cette exonération à la condition que ces établissements soient titulaires de l'autorisation mentionnée à l'article L. 712-8 du code de la santé publique, lequel est issu de l'article 31 de la loi du 30 décembre 1970 portant réforme hospitalière ;

Considérant que les dispositions précitées du 1° bis du 4 de l'article 261 du code général des impôts ne peuvent toutefois, sans qu'il en résulte une différence de traitement incompatible avec les objectifs de la sixième directive, justifier le refus d'étendre le régime d'exonération prévu par l'article 13-A-1-b de ladite directive à un établissement de droit privé à but lucratif qui, bien que n'étant pas titulaire de l'autorisation mentionnée à l'article L. 712-8 du code de la santé publique, assure des prestations de soins médicaux dans des conditions sociales comparables à celles des établissements de santé privés titulaires de cette autorisation, eux-mêmes dûment reconnus par l'Etat français, conformément aux dispositions précitées de l'article 13 de la sixième directive, comme assurant des prestations de soins médicaux dans des conditions comparables à celles qui valent pour les organismes de droit public ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SA LA REVERIE gère un établissement d'hébergement pour personnes âgées, lequel est autorisé au titre des dispositions du code de l'action sociale et de la famille issues de la loi du 30 juin 1975 relative aux institutions sociales et médico-sociales, et non pas au titre des dispositions du code de la santé publique issues de la loi du 31 décembre 1970 portant réforme hospitalière ; que ladite société a créé, au sein de cet établissement, en vertu de l'article 5 de la loi du 30 juin 1975, une section de cure médicale dont l'objet, conformément au décret pris pour l'application de cet article 5, est d'assurer l'hébergement et la surveillance médicale que nécessite l'état des pensionnaires ayant perdu la capacité d'effectuer seuls les actes ordinaires de la vie ou atteints d'une affection somatique ou psychique stabilisée qui nécessite un traitement d'entretien et une surveillance médicale, ainsi que des soins para-médicaux ; que les dépenses de cette section de cure médicale liées à la rémunération des médecins chargés de la surveillance médicale, aux soins prodigués par les auxiliaires médicaux et les aides-soignants, aux consommations de produits pharmaceutiques, de petit matériel et de fournitures à usage médical, ainsi qu'aux investigations biologiques courantes, sont couvertes par une somme forfaitaire, appelée forfait annuel global de soins, dont le montant est arrêté chaque année par le préfet et qui est versée par les organismes de sécurité sociale avec lesquels la SA LA REVERIE a passé une convention ; qu'eu égard à la nécessité de la prise en charge médicale des personnes âgées qui sont accueillies dans cette section de cure médicale, au fait que, si cette prise en charge n'était pas assurée dans cette section, elle le serait dans les établissements de santé publics ou privés où les mêmes prestations seraient alors fournies, ainsi qu'au fait que le coût de cette section est pris en charge par les organismes de sécurité sociale sous le contrôle des pouvoirs publics, les soins qui sont fournis dans cette section de cure médicale doivent être regardés comme étant assurés dans des conditions sociales comparables à celles qui valent pour les établissements de santé privés à but lucratif titulaires de l'autorisation mentionnée à l'article L. 712-8 du code de la santé publique, eux-mêmes dûment reconnus par l'Etat français comme assurant des prestations de soins médicaux dans des conditions sociales comparables à celles qui valent pour les organismes de droit public ; que la SA LA REVERIE est, par suite, fondée à soutenir que l'administration ne peut valablement, pour refuser de lui accorder le bénéfice de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée à raison des forfaits annuels globaux de soins qu'elle a perçus des organismes de sécurité sociale au cours des années litigieuses, lui opposer le fait qu'elle n'est pas dépourvue de but lucratif et qu'elle n'est pas titulaire de l'autorisation mentionnée à l'article L. 712-8 du code de la santé publique ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que la SA LA REVERIE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande en décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1993 au 31 décembre 1995 ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Poitiers en date du 1er mars 2001 est annulé.

Article 2 : Il est accordé décharge à la SA LA REVERIE des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1993 au 31 décembre 1995.

Article 3 : L'Etat versera à la SA LA REVERIE la somme de 1 300 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2

No 01BX01333


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5eme chambre (formation a 3)
Numéro d'arrêt : 01BX01333
Date de la décision : 29/03/2005
Sens de l'arrêt : Décharge de l'imposition
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Analyses

15-05-11-0119-06-02-02 COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES ET UNION EUROPÉENNE. - RÈGLES APPLICABLES. - FISCALITÉ. - SIXIÈME DIRECTIVE (ART. 13 A 1 B) - EXONÉRATION DES PRESTATIONS D'HOSPITALISATION ET DE SOINS MÉDICAUX (ART. 261-4-1 DU CGI DANS SA RÉDACTION APPLICABLE ENTRE LE 1/1/88 ET LE 31/12/95) - ETABLISSEMENTS PRIVÉS D'HÉBERGEMENT POUR PERSONNES ÂGÉES À BUT LUCRATIF - NÉCESSITÉ D'UNE AUTORISATION (ART. L. 712-8 DU CODE DE LA SANTÉ PUBLIQUE) - VIOLATION DU PRINCIPE D'ÉGALITÉ DE TRAITEMENT [RJ1].

z15-05-11-01z19-06-02-02z La loi n° 87-1060 du 30 décembre 1987 modifiée par la loi n° 93-1353 du 30 décembre 1993, de laquelle est issue le 1° bis de l'article 261-4 du code général des impôts a étendu aux établissements de soins de droit privé exerçant leur activité dans un but lucratif le régime d'exonération prévu par l'article 13-A-1-b de ladite directive, en subordonnant toutefois cette exonération à la condition que ces établissements soient titulaires de l'autorisation mentionnée à l'article L. 712-8 du code de la santé publique, lequel est issu de l'article 31 de la loi du 30 décembre 1970 portant réforme hospitalière. Les dispositions du 1° bis du 4 de l'article 261 du code général des impôts ne peuvent toutefois, sans qu'il en résulte une différence de traitement incompatible avec les objectifs de la sixième directive, justifier le refus d'étendre le régime d'exonération prévu par l'article 13-A-1-b de la sixième directive à un établissement de droit privé à but lucratif qui, bien que n'étant pas titulaire de l'autorisation mentionnée à l'article L. 712-8 du code de la santé publique, assure des prestations de soins médicaux dans des conditions sociales comparables à celles des établissements de santé privés titulaires de cette autorisation, eux-mêmes dûment reconnus par l'Etat français, conformément aux dispositions précitées de l'article 13 de la sixième directive, comme assurant des prestations de soins médicaux dans des conditions comparables à celles qui valent pour les organismes de droit public.


Références :

[RJ1]

Comp., 30 décembre 2002, Société Clinique Armand Brillard, p. 497.


Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: M. Julien LE GARS
Rapporteur public ?: M. VALEINS
Avocat(s) : DUVAL

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2005-03-29;01bx01333 ?
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