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05/04/2005 | FRANCE | N°01BX01972

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3eme chambre (formation a 3), 05 avril 2005, 01BX01972


Vu la requête sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 16 août 2001, 10 octobre 2001 et 11 mars 2002, présentés pour M. Michel X, demeurant chez Mme Olga X ..., par la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement N° 9804194 et 9904442 du 3 mai 2001 par lequel le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté ses demandes tendant :

- à l'annulation des décisions du 23 mars 1998 et du 3 novembre 1998 du trésorier-payeur général de la Martinique portant

refus de le décharger de la responsabilité qui lui incombe en application de l'art...

Vu la requête sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 16 août 2001, 10 octobre 2001 et 11 mars 2002, présentés pour M. Michel X, demeurant chez Mme Olga X ..., par la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement N° 9804194 et 9904442 du 3 mai 2001 par lequel le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté ses demandes tendant :

- à l'annulation des décisions du 23 mars 1998 et du 3 novembre 1998 du trésorier-payeur général de la Martinique portant refus de le décharger de la responsabilité qui lui incombe en application de l'article 1685 du code général des impôts à raison du paiement de l'impôt sur le revenu, de la taxe foncière et de la taxe d'habitation dus par son épouse au titre de l'année 1996,

- à ce qu'il soit enjoint au trésorier-payeur général de la Martinique de saisir le juge judiciaire en vue de l'annulation à tiers détenteur du 11 mars 1998 et de produire des documents et instructions ministérielles ainsi que le rapport public de la Cour des Comptes de janvier 2000,

- à la condamnation de l'Etat au remboursement des sommes prélevées en exécution de cet avis à tiers détenteur,

- à la fixation des taux et quotités de décharge de responsabilité,

- au prononcé d'une astreinte de 1 000 F par jour de retard en cas d'inexécution du jugement ;

2°) de faire droit à ses conclusions de première instance ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 16 000 F au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative ;

---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 mars 2005 :

- le rapport de Mme Jayat

- et les conclusions de Mme Boulard, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'aux termes de l'article 5 du décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 applicable en l'espèce : Les délais opposables à l'auteur d'une demande adressée à l'administration courent de la date de la transmission, à l'auteur de cette demande, d'un accusé de réception mentionnant : 1° Le service chargé du dossier ou l'agent à qui l'instruction du dossier a été confiée ; 2° Le délai à l'expiration duquel, à défaut d'une décision expresse, la demande sera réputée acceptée ou rejetée ; 3° S'il y a lieu, les délais et les voies de recours contre la décision implicite de rejet. Les délais visés au premier alinéa du présent article ne courent pas lorsque les indications que doit contenir l'accusé de réception sont incomplètes ou erronées et que l'intéressé se trouve de ce fait empêché de faire valoir ses droits ... ; que l'article 6 du même décret dispose : L'accusé de réception mentionné à l'article 5 du présent décret doit indiquer le cas échéant les pièces manquantes ... L'administration fixe un délai pour la production de ces pièces ;

Considérant que, le 2 mai 1997, M. X a remis au trésorier-payeur général de la Martinique une demande en décharge gracieuse de la responsabilité solidaire lui incombant en vertu de l'article 1685 du code général des impôts ; qu'il soutient sans être contredit que l'administration ne lui a pas transmis d'accusé de réception de sa demande ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et qu'il n'est d'ailleurs pas allégué que la demande de pièces justificatives que lui a adressée l'administration le 12 mai 1997 aurait comporté les mentions exigées par l'article 5 précité du décret du 28 novembre 1983 ; que, dans ces conditions, la décision implicite de rejet née du défaut de réponse à la demande de M. X après un délai de quatre mois n'a pas fait courir le délai du recours contentieux à l'encontre de l'intéressé ; que, par suite, ce délai n'était pas expiré lorsque le trésorier-payeur général de la Martinique a adressé à M. X une décision en date du 23 mars 1998 rejetant expressément sa demande en décharge gracieuse ; que la notification de cette décision, dont l'annulation a été sollicitée par demande enregistrée le 17 juillet 1998, n'ayant pas été accompagnée de l'indication des voies et délais de recours, le délai du recours contentieux afférent à cette décision n'a pas davantage couru à l'encontre du requérant ; qu'enfin, il n'est pas allégué que la nouvelle décision de rejet en date du 3 novembre 1998 ait été notifiée à M. X plus de deux mois avant l'enregistrement au greffe du tribunal administratif de Fort-de-France, le 13 janvier 1999, de la demande de celui-ci tendant à son annulation ; qu'il suit de là que les décisions du trésorier-payeur général des 23 mars et 3 novembre 1998 ne présentent pas le caractère de décisions confirmatives de décisions antérieures devenues définitives et que les demandes à fin d'annulation de ces décisions présentées par M. X devant le tribunal administratif de Fort-de-France n'étaient pas tardives ; que, dès lors, M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté ses demandes comme irrecevables ;

Considérant qu'il y a lieu pour la cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur les demandes de M. X ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant qu'aux termes de l'article 1685 du code général des impôts : 1. Chacun des époux, lorsqu'ils vivent sous le même toit, est solidairement responsable des impositions assises au nom de son conjoint, au titre de la taxe d'habitation. 2. Chacun des époux est tenu solidairement au paiement de l'impôt sur le revenu ... Chacun des époux peut demander à être déchargé de cette obligation ; que l'article L 247 du livre des procédures fiscales dispose : L'administration peut ... décharger de leur responsabilité les personnes tenues au paiement d'impositions dues par un tiers ; que cette dernière disposition s'applique par extension au cas où l'un des époux demande à être déchargé de son obligation solidaire de payer l'impôt établi au nom des deux conjoints, nonobstant la circonstance que la communauté de vie et d'intérêt continue entre les époux ; qu'enfin, selon l'article R 247-10 du même livre dans sa rédaction applicable à l'espèce : Pour obtenir la dispense du paiement d'impositions dues par d'autres personnes et mises à leur charge, les personnes ainsi mises en cause doivent, en ce qui concerne les impôts recouvrés par les comptables du Trésor, adresser une demande au trésorier-payeur général dont dépend le lieu d'imposition. Après examen de la demande, la décision appartient : a) Au trésorier-payeur général sur avis conforme du directeur des services fiscaux lorsque les sommes n'excèdent pas 2 000 000 F par cote ... ;

En ce qui concerne la décision du 23 mars 1998 :

Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne soumet les demandes en décharge gracieuse de responsabilité solidaire à des conditions de recevabilité tenant à la dissolution effective ou en cours du foyer fiscal ou à la nature des motifs et pièces dont l'intéressé doit assortir sa demande ; qu'ainsi, et alors même que la demande en décharge de M. X a été présentée avant l'engagement d'une procédure de divorce et qu'elle n'était motivée que par la circonstance que le redevable avait rempli une partie de ses obligations de paiement, laquelle ne suffisait pas à justifier qu'il fût déchargé de son obligation de responsabilité, le trésorier-payeur général de la Martinique ne pouvait régulièrement rejeter la demande dont il était saisi comme irrecevable sans consultation préalable du directeur des services fiscaux ; que ce vice de procédure n'a pu être régularisé par la consultation ultérieure de l'autorité visée à l'article R 247-10 du livre des procédures fiscales dont l'avis a précédé la nouvelle décision de rejet opposée à M. X le 3 novembre 1998, laquelle ne porte pas retrait de la décision du 23 mars 1998 ; que, par suite, la décision du 23 mars 1998 est entachée d'irrégularité ; que, dès lors, M. X est fondée à en demander l'annulation ;

En ce qui concerne la décision du 3 novembre 1998 :

Considérant, en premier lieu, que l'annulation de la décision du 23 mars 1998 n'est pas de nature à entraîner, par voie de conséquence, celle de la décision du 3 novembre 1998 ;

Considérant, en deuxième lieu, que les conditions dans lesquelles la décision contestée a été notifiée à M. X sont sans influence sur la légalité de cette décision ;

Considérant, en troisième lieu, que la décision contestée n'ayant pas le caractère d'une sanction disciplinaire prise à l'encontre de M. X, qui a la qualité d'agent du Trésor, le requérant ne peut utilement soutenir qu'elle serait entachée d'incompétence faute d'avoir été prise par l'autorité compétente en matière disciplinaire ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte des écritures en défense de l'administration que, pour prendre la décision contestée qui ne porte pas mention des motifs sur lesquels elle repose, le trésorier-payeur général de la Martinique s'est fondé, d'une part, sur la circonstance que le foyer fiscal de l'intéressé n'était ni dissous ni en cours de dissolution et, d'autre part, sur le motif tiré de ce que M. X n'avait pas invoqué d'éléments de sa situation justifiant une décharge de responsabilité solidaire ; que, si le premier de ces motifs est entaché d'erreur de droit, il ressort des pièces du dossier que, si elle ne s'était fondée que sur le second de ces motifs, lequel est de nature à justifier légalement le refus opposé à l'intéressé, l'administration aurait pris la même décision ; que le détournement de pouvoir allégué, résultant de ce que l'administration aurait entendu, par la décision contestée, prendre une sanction disciplinaire à l'encontre de M. X, n'est pas établi ;

Considérant, enfin, que le requérant fait état de l'instruction n° 83-103-A1 du 31 mai 1983 de la direction de la comptabilité publique et de la réponse ministérielle à M. Bocquet, député, du 15 juillet 1985, relatives à la possibilité d'accorder des décharges gracieuses de responsabilité lorsqu'il apparaît que le conjoint mis en cause a été victime d'un comportement irresponsable de l'autre et n'a pas été complice de ses fraudes éventuelles ; que, si M. X entend se prévaloir de l'article L 80 A du livre des procédures fiscales, ces dispositions ne trouvent pas à s'appliquer s'agissant d'un litige afférent à une demande en décharge de responsabilité solidaire ; que, s'il entend se prévaloir de l'article 1er du décret du 28 novembre 1983, celui-ci, d'une part, ne vise pas les réponses ministérielles et, d'autre part, fait obstacle à l'invocation de l'instruction susmentionnée du 31 mai 1983 laquelle énonce des circonstances qui ne sont pas, par elles-mêmes, de nature à justifier légalement une décharge de responsabilité, et est, par suite, contraire aux lois et règlements ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du 3 novembre 1998 ;

Sur les autres conclusions :

Considérant qu'eu égard aux motifs du présent arrêt, l'exécution de celui-ci n'implique pas nécessairement que l'administration prenne des mesures en vue de l'annulation d'un avis à tiers détenteur émis le 11 mars 1998 ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de prendre de telles mesures ne peuvent être accueillies ; que, par voie de conséquence, M. X n'est pas fondé à demander la condamnation de l'Etat à lui rembourser les sommes prélevées en vertu de cet avis à tiers détenteur ;

Sur l'application de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de condamner l'Etat à verser à M. X la somme que celui-ci demande au titre des frais d'instance exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 3 mai 2001 du tribunal administratif de Fort-de-France est annulé.

Article 2 : La décision du trésorier-payeur général de la Martinique du 23 mars 1998 est annulée.

Article 3 : Le surplus de la demande de M. X devant le tribunal administratif et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.

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N° 01BX01972


Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. MADEC
Rapporteur ?: Mme Elisabeth JAYAT
Rapporteur public ?: Mme BOULARD
Avocat(s) : SCP WAQUET, FARGE, HAZAN

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3eme chambre (formation a 3)
Date de la décision : 05/04/2005
Date de l'import : 05/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 01BX01972
Numéro NOR : CETATEXT000007507428 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2005-04-05;01bx01972 ?
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