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25/10/2005 | FRANCE | N°01BX01041

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre (formation à 3), 25 octobre 2005, 01BX01041


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour, le 19 avril 2001, présenté par le MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITE ;

Le MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITE demande à la cour :

- d'annuler le jugement du 22 novembre 2000 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a condamné l'Etat à verser à Mme une indemnité de 2 000 000 F intérêts compris ;

- de ramener l'indemnisation susceptible d'être allouée à Mme à 798 500 F provision incluse ;

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Vu l'ordonnance en date du 3 décembre 2004 fixant la clôture de l'instruction au 1...

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour, le 19 avril 2001, présenté par le MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITE ;

Le MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITE demande à la cour :

- d'annuler le jugement du 22 novembre 2000 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a condamné l'Etat à verser à Mme une indemnité de 2 000 000 F intérêts compris ;

- de ramener l'indemnisation susceptible d'être allouée à Mme à 798 500 F provision incluse ;

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Vu l'ordonnance en date du 3 décembre 2004 fixant la clôture de l'instruction au 11 janvier 2005

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 septembre 2005 :

- le rapport de Mme Balzamo, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Péano, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITE fait appel du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 22 novembre 2000, par lequel celui-ci a condamné l'Etat à verser à Mme une somme de 2 000 000 francs en réparation des préjudices financiers subis du fait des refus illégaux opposés à ses demandes de création d'une officine de pharmacie ; que par la voie de l'appel incident, Mme demande que l'indemnité relative à son préjudice moral soit portée à la somme de 100 000 francs et celle relative à ses autres préjudices, à 7 481 250 francs ;

Considérant que par un jugement en date du 19 juillet 1996, devenu définitif, le tribunal administratif de Toulouse a condamné l'Etat à verser à Mme une somme de 50 000 francs en réparation de son préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence résultant des refus illégaux opposés à ses demandes d'ouverture d'une officine ; que, dès lors, Mme n'est pas recevable à demander, dans le cadre de l'appel portant sur le jugement du 22 novembre 2000 relatif aux préjudices financiers qu'elle a subis, que cette indemnité soit portée à 100 000 francs ;

Considérant que pour fixer, par le jugement attaqué en date du 22 novembre 2000, à 2 000 000 francs la somme que l'Etat a été condamné à verser à Mme HUYNH KIEU du fait des préjudices financiers résultant des décisions illégales qui lui ont été opposées, le tribunal administratif a omis de préciser les différents éléments pris en compte pour le calcul de cette indemnité ; qu'ainsi ledit jugement est insuffisamment motivé et doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme devant le tribunal administratif de Toulouse ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme a droit à obtenir réparation des préjudices financiers résultant de l'impossibilité d'exploiter une officine de pharmacie 17 rue Valade à Toulouse, entre le 15 septembre 1988, date du premier refus qui lui a été illégalement opposé et le 30 juillet 1996 date à laquelle elle indique avoir obtenu une autorisation d'ouverture ; que le Ministre de l'emploi et de la solidarité n'apporte aucun élément de nature à établir que Mme , qui a toujours sollicité l'ouverture d'une pharmacie à la même adresse, ne remplissait pas dès 1988 les conditions légales de création de cette officine ;

Considérant que pour apprécier le manque à gagner subi par Mme , il convient de se référer aux chiffres d'affaires effectivement réalisés lors des deux premières années d'ouverture de l'officine en 1998 et 1999 qui s'élèvent à une moyenne de 1 497 000 F et de leur appliquer un taux de marge bénéficiaire non contesté de 10 % ; que Mme , qui ne soutient pas que l'ouverture d'une autre officine aurait été autorisée, n'établit pas qu'elle aurait subi une perte de clientèle durant les années où elle n'a pu exploiter son officine alors, au contraire, qu'elle fait valoir que la population desservie s'est accrue ; que, contrairement à ce que soutient le Ministre de l'emploi et de la solidarité, Mme justifie ne pas avoir perçu d'autres revenus pendant ladite période ; que, dès lors, il sera fait une juste appréciation de la perte de revenus subie pendant huit ans par Mme en la fixant à la somme de 182 588 euros (1 197 600 F) y compris la provision de 600 000 F déjà accordée par l'arrêt de la cour du 8 juin 1998 ;

Considérant que si Mme fait valoir que, durant la période en cause, elle n'a pu verser de cotisations de retraite en raison de l'impossibilité d'exploiter une officine, elle n'établit pas que la perte de ses droits à retraite résulte directement de l'illégalité des refus d'ouvrir une officine qui lui ont été opposés par l'Etat ; qu'elle n'établit pas non plus que la perte de ses droits à retraite n'aurait pas été compensée par l'absence de prélèvements sur les revenus non perçus ; que, par suite, les conclusions relatives à l'indemnisation de ce chef de préjudice doivent être rejetées ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le montant de l'indemnité qui doit être accordée à Mme en réparation de ses préjudices financiers doit être fixé à la somme de 182 588 euros (1 197 600 francs) ;

Sur les intérêts :

Considérant, d'une part, que Mme a droit aux intérêts de la somme de 182 588 euros à compter du 3 octobre 1995, date de la réception par l'Etat de sa demande préalable ;

Considérant, d'autre part, que la capitalisation des intérêts a été demandée le 25 octobre 2001 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, il y a lieu de faire droit à cette demande, tant à cette date, qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur l'application de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas la partie perdante dans la présente affaire, soit condamné à verser à Mme une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 22 novembre 2000 est annulé.

Article 2 : L'Etat est condamné à verser à Mme une somme de 182 588 euros . Cette somme portera intérêt, au taux légal, à compter du 3 octobre 1995. Les intérêts échus le 25 octobre 2001 seront capitalisés à cette date et à chaque échéance annuelle pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

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N°01BX01041


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 01BX01041
Date de la décision : 25/10/2005
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LEPLAT
Rapporteur ?: Mme Evelyne BALZAMO
Rapporteur public ?: M. PEANO
Avocat(s) : SCP CATUGIER-DUSAN

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2005-10-25;01bx01041 ?
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