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15/12/2005 | FRANCE | N°05BX02086

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, Juge des reconduites a la frontiere, 15 décembre 2005, 05BX02086


Vu la requête, enregistrée le 17 octobre 2005, présentée par le PREFET de la HAUTE-VIENNE ; le PREFET de la HAUTE-VIENNE demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0501221 du 19 septembre 2005, par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Limoges a annulé les arrêtés en date du 15 septembre 2005 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X..., alias Carlos Y, fixant le pays de renvoi et prononçant la mise en rétention administrative de l'intéressé ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu les pièces desquelles il résulte que le recours a été communiqué à M. X..., pour ...

Vu la requête, enregistrée le 17 octobre 2005, présentée par le PREFET de la HAUTE-VIENNE ; le PREFET de la HAUTE-VIENNE demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0501221 du 19 septembre 2005, par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Limoges a annulé les arrêtés en date du 15 septembre 2005 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X..., alias Carlos Y, fixant le pays de renvoi et prononçant la mise en rétention administrative de l'intéressé ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu les pièces desquelles il résulte que le recours a été communiqué à M. X..., pour lequel il n'a pas été produit de mémoire ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le décret n° 95-304 portant publication de la convention d'application de l'accord de Schengen du 19 juin 1990 ;

Vu le décret n° 82-442 modifié du 27 mai 1982 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 décembre 2005 :

- le rapport de Mme Erstein, président délégué ;

- et les conclusions de M. Doré, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « I. - L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants :

1º Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; 2º Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré … » ; qu'en vertu de l'article L. 511-2 du même code : « Les dispositions du 1° de l'article L. 511-1 sont applicables à l'étranger qui n'est pas ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne : a) S'il ne remplit pas les conditions d'entrée prévues à l'article 5 de la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 ; b) Ou si, en provenance directe du territoire d'un Etat partie à cette convention, il ne peut justifier être entré sur le territoire métropolitain en se conformant aux stipulations de ses articles 19, paragraphe 1 ou 2, 20, paragraphe 1, et 21, paragraphe 1 ou 2 » ; que l'article L. 511-3 dudit code ajoute : « Les dispositions du 2º et du 8º de l'article L. 511-1 sont applicables à l'étranger qui n'est pas ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne si, en provenance directe du territoire d'un des Etats parties à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, il s'est maintenu sur le territoire métropolitain sans se conformer aux stipulations de l'article 19, paragraphe 1 ou 2, de l'article 20, paragraphe 1, et de l'article 21, paragraphe 1 ou 2, de ladite convention » ;

Considérant qu'en vertu de l'article 2 de la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985, signée le 19 juin 1990 : « 1. Les frontières intérieures peuvent être franchies en tout lieu sans qu'un contrôle des personnes soit effectué. (…) 3. La suppression du contrôle des personnes aux frontières intérieures ne porte atteinte ni aux dispositions de l'article 22, ni à l'exercice des compétences de police par les autorités compétentes en vertu de la législation de chaque Partie contractante sur l'ensemble de son territoire, ni aux obligations de détention, de port et de présentation de titres et documents prévues par sa législation » ; que selon son article 5 : « 1. Pour un séjour n'excédant pas trois mois, l'entrée sur les territoires des Parties contractantes peut être accordée à l'étranger qui remplit les conditions ci-après : (…) c) Présenter, le cas échéant, les documents justifiant de l'objet et des conditions du séjour envisagé et disposer des moyens de subsistance suffisants, tant pour la durée du séjour envisagé que pour le retour dans le pays de provenance ou le transit vers un Etat tiers dans lequel son admission est garantie, ou être en mesure d'acquérir légalement ces moyens … » ; qu'en application de son article 20 : « 1. Les étrangers non soumis à l'obligation de visa peuvent circuler librement sur les territoires des Parties contractantes pendant une durée maximale de trois mois au cours d'une période de six mois à compter de la date de première entrée, pour autant qu'ils remplissent les conditions d'entrée visées à l'article 5, paragraphe 1, points a, c, d et e » ; qu'enfin, son article 23 prévoit que : « 1. L'étranger qui ne remplit pas ou ne remplit plus les conditions de court séjour applicables sur le territoire de l'une des Parties contractantes doit en principe quitter sans délai les territoires des Parties contractantes (…) 3. Lorsque le départ volontaire d'un tel étranger n'est pas effectué ou lorsqu'il peut être présumé que ce départ n'aura pas lieu (…), l'étranger doit être éloigné du territoire de la Partie contractante sur lequel il a été appréhendé, dans les conditions prévues par le droit national de cette Partie contractante » ;

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 2 du décret n° 82-442 du 27 mai 1982 modifié pris pour l'application de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 : « En fonction de ses déclarations sur les motifs de son voyage, l'étranger doit présenter selon les cas : 1. Pour un séjour touristique, tout document de nature à établir l'objet et les conditions de ce séjour, et notamment sa durée ; (…) 3. Pour un séjour en France d'une durée n'excédant pas trois mois dans le cadre d'une visite familiale ou privée, un justificatif d'hébergement, tel qu'il est défini à l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée » ; que selon le premier alinéa de l'article 4 du même texte : « Les documents relatifs aux garanties de rapatriement doivent permettre à l'étranger qui pénètre en France d'assurer les frais afférents à son retour du lieu situé sur le territoire métropolitain ou dans un département d'outre ;mer, où il a l'intention de se rendre, jusqu'au pays de sa résidence habituelle » ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de la combinaison de ces stipulations et dispositions que peuvent faire l'objet d'une reconduite à la frontière, sur le fondement des dispositions précitées du b) de l'article L. 511-2, les étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, en provenance directe du territoire d'un Etat partie à la convention d'application de l'accord de Schengen, qui ne peuvent justifier être entrés sur le territoire métropolitain en se conformant aux exigences définies à l'article 5 de la convention, notamment celles du c) du paragraphe 1 dudit article relatives à la présentation des documents justificatifs de l'objet et des conditions de séjour ainsi qu'à la disposition de moyens de subsistance suffisants ; qu'il en va de même, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 511-3, de ceux d'entre eux qui ne remplissent plus les conditions posées par ces stipulations ;

Considérant, en second lieu, qu'aucune des stipulations de la convention d'application de l'accord de Schengen ne prive les autorités de l'Etat où se trouve l'étranger de vérifier la régularité de la situation de celui ;ci et de prendre une mesure de reconduite à la frontière à l'égard de celui qui ne remplit pas ou ne remplit plus les conditions de séjour prévues par la convention ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., de nationalité équatorienne, est entré, par l'Espagne, dans l'espace couvert par la convention d'application de l'accord de Schengen, et qu'il s'est ensuite rendu sur le territoire français où il a été interpellé le 14 septembre 2005 ; qu'alors que, selon ses dires, il était venu en France pour une visite privée, il est constant qu'il ne disposait, ni de l'attestation d'accueil prévue par l'article 2 du décret du 27 mai 1982, ni des garanties de rapatriement exigées par l'article 4 du même décret et qu'il ne disposait pas davantage de moyens de subsistance suffisants ; que M. X... se trouvait ainsi dans un cas où le préfet peut légalement faire application des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET de la HAUTE-VIENNE est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler les arrêtés attaqués, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Limoges s'est fondé sur la seule circonstance que l'intéressé disposait d'un titre de séjour délivré par les autorités espagnoles pour en déduire qu'il ne pouvait faire l'objet d'une reconduite à la frontière ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... devant le tribunal administratif de Limoges ;

Sur la légalité de la décision de reconduite à la frontière :

Considérant que la décision attaquée, ordonnant la reconduite à la frontière de M. X..., comporte les éléments de droit et de fait sur lesquels elle se fonde ; qu'elle est ainsi suffisamment motivée au regard des prescriptions de l'article L. 511-1 du code déjà cité ;

Considérant qu'en invoquant l'atteinte à la vie privée et familiale qu'il mène en Espagne, M. X... ne démontre pas que la décision prescrivant son éloignement du territoire français serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

Considérant que la décision attaquée, fixant le pays à destination duquel M. X... doit être reconduit, comporte les éléments de droit et de fait sur lesquels elle se fonde ; qu'elle est ainsi suffisamment motivée ;

Considérant que M. X..., qui a déclaré, lors de son interpellation, ne pas être opposé à un retour dans le pays dont il a la nationalité et ne justifie pas résider habituellement en Espagne, n'apporte aucun élément susceptible d'établir qu'il aurait effectivement dans ce pays, où il n'a pas demandé à être reconduit, une vie privée et familiale et, qu'ainsi, la décision susvisée fixant l'Equateur comme pays de renvoi serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité de la décision de mise en rétention administrative :

Considérant que la décision attaquée, prononçant la mise en rétention administrative de M. X..., comporte les éléments de droit et de fait sur lesquels elle se fonde ; qu'elle est ainsi suffisamment motivée au regard des prescriptions de l'article L. 511-2 du code déjà cité ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 551-1 dudit code : « Le placement en rétention d'un étranger dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire peut être ordonné lorsque cet étranger : … 3º Soit, faisant l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière pris en application des articles L. 511-1 à L. 511-3 et édicté moins d'un an auparavant, ne peut quitter immédiatement le territoire français » ;

Considérant qu'en se bornant à invoquer la vie privée et familiale qu'il mènerait en Espagne, M. X... ne peut être regardé comme critiquant utilement la décision susvisée du 15 septembre 2005 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET de la HAUTE-VIENNE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Limoges a annulé les arrêtés en date du 15 septembre 2005 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X..., alias Carlos Y, fixant le pays de renvoi et prononçant la mise en rétention administrative de l'intéressé ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 19 septembre 2005 du Tribunal administratif de Limoges est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X... devant le Tribunal administratif de Limoges est rejetée.

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N° 05BX02086


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Lucienne ERSTEIN
Rapporteur public ?: M. DORE

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : Juge des reconduites a la frontiere
Date de la décision : 15/12/2005
Date de l'import : 05/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 05BX02086
Numéro NOR : CETATEXT000007511774 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2005-12-15;05bx02086 ?
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