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30/12/2005 | FRANCE | N°02BX01490

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 30 décembre 2005, 02BX01490


Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 22 juillet 2002, présentée par la SELARL Gangate-Rapady, avocats, pour M. David Y, demeurant ... ;

M. Y demande à la cour :

- d'annuler le jugement du 24 avril 2002 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis a rejeté sa demande tendant à la réalisation d'une expertise médicale et à la condamnation du centre hospitalier Sud Réunion à l'indemniser des préjudices subis suite aux soins reçus dans cet établissement ;

- d'ordonner une expertise permettant d'apprécier les fautes commises par le centre hosp

italier et d'évaluer les préjudices subis ;

- de condamner le groupe hospitalier...

Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 22 juillet 2002, présentée par la SELARL Gangate-Rapady, avocats, pour M. David Y, demeurant ... ;

M. Y demande à la cour :

- d'annuler le jugement du 24 avril 2002 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis a rejeté sa demande tendant à la réalisation d'une expertise médicale et à la condamnation du centre hospitalier Sud Réunion à l'indemniser des préjudices subis suite aux soins reçus dans cet établissement ;

- d'ordonner une expertise permettant d'apprécier les fautes commises par le centre hospitalier et d'évaluer les préjudices subis ;

- de condamner le groupe hospitalier Sud Réunion à réparer les préjudices subis ;

- de condamner le groupe hospitalier Sud Réunion à verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;

Vu la loi n° 2002-203 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de soins ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 décembre 2005 :

- le rapport de M. Margelidon, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Jayat, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'après avoir été admis au groupe hospitalier Sud Réunion, le 3 février 1993, pour une fracture de l'extrémité inférieure du radius, M. Y, alors âgé de 13 ans, a été amputé le 10 février 1993 suite à une gangrène gazeuse ; que sa mère a saisi le tribunal de police de Saint-Pierre afin d'obtenir la condamnation pour blessures involontaires des deux médecins qui ont pris en charge son fils ; que le tribunal s'est déclaré incompétent ; que la cour d'appel de Saint-Denis a, par un premier arrêt du 27 août 1998, amnistié les faits reprochés, et, par un second arrêt du 18 février 1999, reconnu que les deux médecins avaient commis des « négligences fautives et particulièrement graves » et les a condamnés à verser une somme de 200 000 francs à M. Y ; qu'enfin, par une décision du 15 février 2000, la Cour de Cassation a annulé le jugement de la cour d'appel au motif que les fautes n'étaient pas détachables du service ; qu'après rejet de sa demande préalable présentée au centre hospitalier le 28 février 2000, M. Y a saisi le juge administratif d'une demande d'expertise et de conclusions indemnitaires ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics alors applicable aux créances détenues sur les établissements publics hospitaliers en matière de responsabilité médicale : « Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public » ; qu'aux termes de l'article 2 de la même loi : « La prescription est interrompue par : (…) Tout recours formé devant une juridiction relatif au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l'auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître et si l'administration qui aura finalement la charge du règlement n'est pas partie à l'instance ; un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l'interruption. Toutefois, si l'interruption résulte d'un recours juridictionnel, le nouveau délai court à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle la décision est passée en force de chose jugée » ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi, la prescription ne court pas contre le créancier « qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement » ;

Considérant que les dispositions précitées de l'article 2 de la loi du 31 décembre 1968 subordonnent l'interruption du délai de prescription qu'elles prévoient en cas de recours juridictionnel, à la mise en cause d'une collectivité publique ; qu'une plainte contre deux médecins, qui n'est pas expressément dirigée contre une collectivité publique, ne peut interrompre jusqu'à l'intervention d'une décision passée en force de chose jugée la prescription d'une créance sur un établissement public hospitalier ; que, toutefois, s'agissant de l'indemnisation de l'incapacité permanente partielle, des troubles dans les conditions d'existence et du préjudice esthétique nés à l'occasion de dommages causés aux personnes, la prescription quadriennale court à compter de la date de consolidation des blessures, laquelle ne doit pas nécessairement se confondre avec celle qui marque la fin de l'incapacité temporaire totale ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et, notamment, du rapport d'une expertise ordonnée par le juge judiciaire saisi à l'encontre des praticiens hospitaliers, que l'état de santé de M. Y n'était pas consolidé au 30 juin 1995, date du rapport ; que, dans ces conditions, c'est à tort que le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion, pour considérer comme prescrite la créance du requérant vis-à-vis de l'établissement, a estimé que la date de consolidation devait être fixée à la fin du mois de mars 1993, époque à laquelle a pris fin la première période d'incapacité temporaire totale subie par la victime ;

Considérant que l'état du dossier ne permet de déterminer ni la date de consolidation de l'état de santé du requérant, ni les éventuelles fautes commises par le centre hospitalier dans le traitement et le suivi du patient ni, enfin, l'étendue du préjudice résultant pour le requérant de ces fautes; que, par suite, il y a lieu, avant de statuer sur la requête de M. Y, d'ordonner une expertise aux fins précisées ci-après ;

DECIDE :

Article 1er : Il sera, avant de statuer sur la requête de M. Y, procédé à une expertise médicale.

Article 2 : L'expert sera désigné par le président de la cour. Il accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R 621-2 à R 621-14 du code de justice administrative.

Article 3 : Il aura pour mission :

1) de prendre connaissance de l'entier dossier médical de M. Y,

2) de décrire les conditions dans lesquelles M. Y a été hospitalisé au centre hospitalier Sud Réunion et notamment de réunir tous les éléments devant permettre de déterminer si des fautes médicales ont été commises dans le traitement de sa fracture de l'extrémité inférieure du radius,

3) de décrire la nature et l'étendue des troubles et séquelles, et particulièrement :

- la date de consolidation du dommage,

- la durée de l'incapacité temporaire totale ou partielle,

- le taux de l'incapacité permanente partielle,

- l'importance des souffrances physiques endurées,

- le préjudice esthétique,

- le préjudice d'agrément.

Article 4 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

3

N° 02BX01490


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 02BX01490
Date de la décision : 30/12/2005
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. MARROU
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe MARGELIDON
Rapporteur public ?: Mme JAYAT
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS GANGATE RAPADY

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2005-12-30;02bx01490 ?
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