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30/12/2005 | FRANCE | N°04BX01034

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3eme chambre (formation a 3), 30 décembre 2005, 04BX01034


Vu I), la requête enregistrée au greffe de la cour le 21 juin 2004, présentée pour M. Christophe X, demeurant ... ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 10 mars 2004 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 3 septembre 2003 par laquelle le ministre de l'éducation nationale a prononcé sa révocation ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

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Vu II), enregistrée au greffe de la cour le 21 septembre 2005, la requête présentée par M. X ;

M. X demande à la cour :

1°) de suspendre l'arrêté en da...

Vu I), la requête enregistrée au greffe de la cour le 21 juin 2004, présentée pour M. Christophe X, demeurant ... ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 10 mars 2004 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 3 septembre 2003 par laquelle le ministre de l'éducation nationale a prononcé sa révocation ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

…………………………………………………………………………………………….

Vu II), enregistrée au greffe de la cour le 21 septembre 2005, la requête présentée par M. X ;

M. X demande à la cour :

1°) de suspendre l'arrêté en date du 3 septembre 2003 par lequel le ministre de l'éducation nationale a prononcé sa révocation ;

2°) d'enjoindre au ministre de l'éducation nationale de le réintégrer sur un poste d'enseignant dans un établissement de formation ou dans un établissement de l'enseignement supérieur ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Convention Européenne de Sauvegarde des droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales ;

Vu le Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques ;

Vu la loi n°83-451 du 13 juillet 1983 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu le décret n°82-451 du 28 mai 1982 ;

Vu le décret n°84-961 du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires de l'Etat ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 décembre 2005 :

- le rapport de M. Margelidon, premier conseiller,

- les observations de M.X,

- et les conclusions de Mme Jayat, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes n° 04BX01034 et 05BX01969 de M. X présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'éducation nationale ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort du jugement attaqué que les premiers juges se sont prononcés sur la compétence de l'auteur du rapport soumis aux membres du conseil de discipline en affirmant qu'il était le fait de l'autorité ayant le pouvoir disciplinaire ; qu'en outre, ils ont implicitement mais nécessairement répondu au moyen tiré de l'absence de signature du rapport en soulignant que ce dernier avait été établi par les services du rectorat de l'académie ;

Considérant, en second lieu, que le requérant soutient que les premiers juges auraient omis de répondre au moyen tiré de l'incomplète information des membres du conseil de discipline relativement aux conditions dans lesquelles il a été informé de son droit de se faire assister par un avocat ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier et, notamment, des écrits du requérant en première instance, que ce dernier a entendu soulever un moyen tiré du fait qu'il n'aurait « jamais » été informé de son droit à être assisté par un avocat ; qu'il ressort du jugement attaqué que les premiers juges, qui ne sont pas tenus de répondre à tous les arguments soulevés à l'appui dudit moyen, ont estimé, au regard des pièces de la procédure disciplinaire, que le requérant avait été informé de la possibilité de se faire assister par un avocat ; que, dès lors, ce moyen ne peut qu'être rejeté ;

Sur la légalité externe :

Considérant qu'aux termes de l'article 1 du décret du 25 octobre 1984 : « L'administration doit dans le cas où une procédure disciplinaire est engagée à l'encontre d'un fonctionnaire informer l'intéressé qu'il a (…) la possibilité de se faire assister par un ou plusieurs défenseurs de son choix » ; qu'il ne résulte nullement de ces dispositions que l'administration soit tenue, dans le cas où une procédure disciplinaire est engagée à l'encontre d'un fonctionnaire, d'informer l'intéressé de la possibilité de se faire assister spécifiquement par un avocat dès lors qu'elle l'informe de la possibilité de se faire assister par un ou plusieurs « défenseurs » de son choix ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le courrier du 23 mai 2003 notifiant à l'intéressé l'engagement d'une procédure disciplinaire à son encontre procède à cette information conformément aux dispositions précitées ; que le requérant ne peut utilement invoquer les dispositions de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relatives à « l'aide juridictionnelle », lesquelles ne sont applicables que lors des litiges pendants devant une juridiction ; qu'il en est de même pour ce qui concerne les stipulations de l'alinéa 3 de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi, en tout état de cause, que pour ce qui concerne les stipulations du paragraphe 3D de l'article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 25 octobre 1984 : « L'organisme siégeant en conseil de discipline (…), est saisi par un rapport émanant de l'autorité ayant pouvoir disciplinaire (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que ledit rapport, portant en en-tête le logo de l'académie de Poitiers, a été lu en séance par le recteur de l'académie qui doit, de ce fait, être regardé comme l'ayant repris à son compte ; que, par suite, le moyen tiré de l'absence de compétence de l'auteur dudit rapport, nonobstant la circonstance qu'il ne soit pas signé, ne peut qu'être rejeté ; que, de même, le requérant ne peut utilement, en l'espèce, se prévaloir des dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000, lesquelles ne sont applicables que lors d'un échange entre un usager et l'administration ;

Considérant qu'aux termes de l'article 5 du décret du 25 octobre 1984 : « Lorsque le conseil de discipline examine l'affaire au fond, son président porte, en début de séance, à la connaissance des membres du conseil les conditions dans lesquelles le fonctionnaire poursuivi et, le cas échéant, son ou ses défenseurs ont exercé leur droit à recevoir communication intégrale du dossier individuel et des documents annexes » ;

Considérant qu'il ressort du rapport lu en séance que sont mentionnés le jour au cours duquel l'intéressé à pu prendre connaissance de son dossier ainsi que les documents qu'il a, à cette occasion, jugé utile, de déposer dans son dossier ; qu'il ne ressort donc pas des pièces du dossier que les membres du conseil de discipline n'aient pas été suffisamment et correctement informés des conditions dans lesquelles le requérant a pu prendre connaissance de son dossier ;

Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 5 dudit décret : « Le fonctionnaire et, le cas échéant, son ou ses défenseurs peuvent, à tout moment de la procédure devant le conseil de discipline, demander au président l'autorisation d'intervenir afin de présenter des observations orales. Ils doivent être invités à présenter d'ultimes observations avant que le conseil ne commence à délibérer » ;

Considérant qu'il ressort du procès-verbal du conseil de discipline qu'à l'issue du débat devant le conseil de discipline, et en l'absence de question supplémentaire de la part des membres, l'intéressé a été invité par le président de séance à faire valoir ses observations ; que ces observations ont suscité une dernière question de la part d'un membre du conseil à laquelle l'intéressé a pu répondre ; qu'en l'absence de question complémentaire, le président de séance a proposé de passer au délibéré ; que, dans ces conditions, l'intéressé ne peut être regardé comme ayant été privé de la possibilité de présenter d'ultimes observations avant le délibéré ;

Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 6 du décret du 25 octobre 1984 que le conseil de discipline délibère à huis clos ; qu'il n'est pas contesté que le secrétaire de séance, fonctionnaire des services du rectorat, a pu assister audit délibéré ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que ledit agent ait cherché, tant au cours du débat qu'à l'occasion du délibéré, à peser sur le cours du conseil ;qu'ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ait outrepassé ses fonctions ; que, dans ces conditions, sa seule présence au cours du délibéré ne peut être regardée comme une irrégularité ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 du décret du 25 octobre 1984 : « (…), le président du conseil de discipline met aux voix la proposition de sanction la plus sévère parmi celles qui ont été exprimées lors du délibéré. Si cette proposition ne recueille pas l'accord de la majorité des membres présents, le président met aux voix les autres sanctions figurant dans l'échelle des sanctions disciplinaires en commençant par la plus sévère après la sanction proposée, jusqu'à ce que l'une d'elles recueille un tel accord. (…) Dans l'hypothèse où aucune des propositions soumises au conseil de discipline, y compris celle consistant à ne pas prononcer de sanction, n'obtient l'accord de la majorité des membres présents, le conseil est considéré comme ayant été consulté et ne s'étant prononcé en faveur d'aucune de ces propositions. Son président informe alors de cette situation l'autorité ayant pouvoir disciplinaire. Si cette autorité prononce une sanction, elle doit informer le conseil des motifs qui l'ont conduite à prononcer celle-ci » ;

Considérant que, d'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'ordre d'examen des sanctions ait été inversé ; qu'à cet égard, le requérant ne peut utilement se prévaloir des motifs des premiers juges à ce propos, lesquels ne constituent pas, en l'espèce, le support nécessaire du dispositif du jugement et n'ont eu aucune influence sur le sens de la solution retenue ; que, d'autre part, il ressort des pièces du dossier qu'aucune sanction n'ayant recueilli l'accord de la majorité des membres présents, le président du conseil de discipline en a informé le ministre qui a, alors, prononcé la sanction de révocation à l'encontre de l'intéressé ;

Sur la légalité interne :

Considérant qu'en principe, l'autorité de la chose jugée au pénal ne s'impose aux autorités et juridictions administratives qu'en ce qui concerne les constatations de fait que les juges répressifs ont retenues et qui sont le support nécessaire de leurs décisions ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'autorité administrative s'est fondée sur les seules constatations de fait relevées par le juge répressif relatives aux agissements de l'intéressé, professeur certifié d'anglais, à l'encontre d'un mineur hors de l'enceinte de l'établissement scolaire où il enseigne ; qu'au regard de l'ensemble des circonstances de fait, le ministre de l'éducation nationale a prononcé, sans erreur de droit, la sanction de révocation sans s'être cru tenu par les qualifications juridiques données aux faits par le juge pénal ; que, par suite, la circonstance que le juge pénal ait considéré qu'il n'y avait pas lieu de prononcer à l'égard de l'intéressé la peine complémentaire d'« interdiction d'exercer » ses fonctions d'enseignant, est, par elle-même, sans influence sur le bien-fondé de la sanction disciplinaire ;

Considérant, enfin, que compte tenu des faits reprochés à l'intéressé et eu égard à la nature des fonctions et aux obligations qui incombent au personnel enseignant ainsi qu'à la nécessité d'assurer le bon fonctionnement du service public de l'éducation nationale et de préserver sa réputation, le ministre de l'éducation nationale n'a pas, en prononçant la révocation de M. X, entaché sa décision d'une erreur manifeste, alors même qu'il ressort des pièces du dossier que le comportement professionnel de ce dernier à l'intérieur de l'enceinte de l'établissement scolaire où il enseigne est irréprochable ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande ; que le présent arrêt statuant au fond, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. X tendant à la suspension de la décision du ministre de l'éducation nationale prononçant sa révocation ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X tendant à l'annulation de la décision prononçant sa révocation est rejetée.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 05BX01969.

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N° 04BX01034/05BX01969


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3eme chambre (formation a 3)
Numéro d'arrêt : 04BX01034
Date de la décision : 30/12/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MARROU
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe MARGELIDON
Rapporteur public ?: Mme JAYAT
Avocat(s) : SCP PIELBERG - PIELBERG-CAUBET - BUTRUILLE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2005-12-30;04bx01034 ?
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