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09/03/2006 | FRANCE | N°02BX02121

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ere chambre - formation a 3, 09 mars 2006, 02BX02121


Vu la requête, enregistrée le 4 octobre 2002 au greffe de la Cour, présentée pour la COMMUNE DE TOULOUSE, représentée par son maire ; la COMMUNE DE TOULOUSE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 27 juin 2002 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a, sur la demande de France Télécom, annulé la délibération en date du 25 juin 1999 par laquelle le conseil municipal de la commune a adopté une convention type relative aux droits et obligations des opérateurs de télécommunication pour l'utilisation des infrastructures de télécommunication lui ap

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Vu la requête, enregistrée le 4 octobre 2002 au greffe de la Cour, présentée pour la COMMUNE DE TOULOUSE, représentée par son maire ; la COMMUNE DE TOULOUSE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 27 juin 2002 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a, sur la demande de France Télécom, annulé la délibération en date du 25 juin 1999 par laquelle le conseil municipal de la commune a adopté une convention type relative aux droits et obligations des opérateurs de télécommunication pour l'utilisation des infrastructures de télécommunication lui appartenant et déterminé les tarifs de location de ces infrastructures applicables à partir du 1er janvier 1999 ;

2°) de rejeter la demande présentée par France Télécom devant le Tribunal administratif de Toulouse ;

3°) de condamner France Télécom à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.......................................................................................................................................…

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code des postes et communications électroniques ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 février 2006,

- le rapport de Mme Hardy ;

- les observations de Me X... de la SCP Flint-Sanson, avocat de la COMMUNE DE TOULOUSE ;

- les observations de Me Cazin d'Honincthun, avocat de France Télécom ;

- et les conclusions de M. Chemin, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la COMMUNE DE TOULOUSE interjette appel du jugement, en date du 27 juin 2002, par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a, sur la demande de France Télécom, annulé la délibération en date du 25 juin 1999 par laquelle le conseil municipal de la commune a adopté une convention type relative aux droits et obligations des opérateurs de télécommunication pour l'utilisation des infrastructures de télécommunication, tels que gaines, canalisations et chambres d'accès, lui appartenant et déterminé les tarifs de location de ces infrastructures applicables à partir du 1er janvier 1997 ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'en estimant, sur le fondement des stipulations des cahiers des charges des concessions d'aménagement des zones d'aménagement concerté, que les infrastructures réalisées dans lesdites zones avant 1996 avaient fait l'objet d'une remise de fait soit à l'Etat soit à France Télécom, le Tribunal administratif de Toulouse a implicitement mais nécessairement écarté le moyen tiré de ce que les infrastructures en cause constituaient des biens de retour en application de ces cahiers des charges ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement attaqué doit être écarté ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la délibération du 25 juin 1999 :

Considérant que la COMMUNE DE TOULOUSE a, dans le cadre de diverses conventions de concession, confié à la société d'économie mixte dénommée société d'équipement de Toulouse Midi-Pyrénées, la réalisation des travaux d'aménagement de plusieurs zones d'aménagement concerté ; que les cahiers des charges de ces concessions prévoyaient que « les ouvrages réalisés en application du présent cahier des charges, et notamment les voiries et réseaux constituent des biens de retour qui appartiennent au concédant dès leur réalisation et qui lui reviennent gratuitement et automatiquement dès leur achèvement (…) Les collectivités publiques autres que le concédant et les concessionnaires de service public intéressés par les ouvrages réalisés seront invités aux opérations de remise et le concédant propriétaire de ces biens de retour leur remettra les ouvrages en présence du concessionnaire. Le concessionnaire a l'obligation de préparer et présenter à la signature du concédant ou le cas échéant des personnes autres intéressées, un acte authentique constatant le transfert de propriété notamment des voies (…) » ;

Considérant qu'en application de ces stipulations, les ouvrages, tels que les chambres d'accès, les gaines et les canalisations destinées à accueillir les réseaux de télécommunication, réalisés dans le cadre de ces opérations d'aménagement, constituaient des biens de retour dont la COMMUNE DE TOULOUSE, qui en a assuré la maîtrise d'ouvrage et ne peut être regardée comme ayant agit pour le compte de l'Etat ou de France Télécom, était propriétaire dès leur réalisation ; que les circonstances que ces ouvrages ont été réalisés avec la participation technique des services de France Télécom et lui ont été remis après leur achèvement pour leur exploitation et que ladite société a assuré leur entretien ne sauraient avoir pour effet d'emporter un transfert des droits de propriété sur lesdits ouvrages ; que France Télécom ne peut utilement invoquer les dispositions du code des postes et télécommunications, applicables lors des opérations d'aménagement en cause, en vertu desquels les réseaux de télécommunication ouverts au public ne pouvaient être établis que par l'exploitant public, dès lors que le monopole ainsi institué ne concernait que les installations de télécommunication elles-mêmes et non les infrastructures destinées à les accueillir, lesquelles ne constituent pas des réseaux de communication au sens des dispositions dudit code ; que France Télécom ne peut davantage utilement invoquer les dispositions de l'article R. 311-11 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable aux opérations en cause, aux termes desquels « lorsque le programme des équipements publics comporte des équipements dont la maîtrise d'ouvrage et le financement incombent normalement à d'autres collectivités ou établissements publics, le dossier doit comprendre les pièces faisant état de l'accord de ces personnes publiques sur le principe de la réalisation de ces équipements, les modalités de leur incorporation dans leur patrimoine et, le cas échéant, sur leur participation au financement », dès lors que, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la réalisation des infrastructures dont s'agit n'incombait pas normalement à France Télécom et que les cahiers des charges des concessions susmentionnés ne prévoyaient pas leur incorporation dans le patrimoine de l'Etat ou de France Télécom ; que la circonstance que lesdites infrastructures aient pu être regardées comme un accessoire des installations de France Télécom est sans incidence sur la propriété de ces ouvrages ; que, pour établir sa qualité de propriétaire, France Télécom ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article 544 du code civil qui ne sont pas applicables au domaine public ; que, dans ces conditions, c'est à tort que le Tribunal administratif de Toulouse a considéré que, à la date de la délibération contestée, France Télécom était propriétaire des infrastructures en cause ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par France Télécom devant le Tribunal administratif de Toulouse ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 47 du code des postes et des communications électroniques, dans sa rédaction applicable à la date de la délibération litigieuse : « L'occupation du domaine routier fait l'objet d'une permission de voirie, délivrée par l'autorité compétente, suivant la nature de la voie empruntée, dans les conditions fixées par le code de la voirie routière. La permission peut préciser les prescriptions d'implantation et d'exploitation nécessaires à la circulation publique et à la conservation de la voirie. L'autorité mentionnée à l'alinéa précédent doit prendre toutes dispositions utiles pour permettre l'accomplissement de l'obligation d'assurer le service universel des télécommunications. Elle ne peut faire obstacle au droit de passage des opérateurs autorisés qu'en vue d'assurer, dans les limites de ses compétences, le respect des exigences essentielles. Lorsqu'il est constaté que le droit de passage de l'opérateur peut être assuré, dans des conditions équivalentes à celles qui résulteraient d'une occupation autorisée, par l'utilisation des installations existantes d'un autre occupant du domaine public et que cette utilisation ne compromettrait pas la mission propre de service public de cet occupant, l'autorité mentionnée au premier alinéa peut inviter les deux parties à se rapprocher pour convenir des conditions techniques et financières d'une utilisation partagée des installations en cause. Dans ce cas, et sauf accord contraire, le propriétaire des installations accueillant l'opérateur autorisé assume, dans la limite du contrat conclu entre les parties, l'entretien des infrastructures et des équipements qui empruntent ses installations et qui sont placés sous sa responsabilité, moyennant paiement d'une contribution négociée avec l'opérateur. En cas de litige entre opérateurs, l'Autorité de régulation des télécommunications peut être saisie, dans les conditions fixées à l'article L. 36 ;8. La permission de voirie ne peut contenir des dispositions relatives aux conditions commerciales de l'exploitation. Elle donne lieu à versement de redevances dues à la collectivité publique concernée pour l'occupation de son domaine public dans le respect du principe d'égalité entre tous les opérateurs. Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités d'application du présent article et notamment le montant maximum de la redevance mentionnée à l'alinéa ci-dessus » ; que ces dispositions ont pour objet de déterminer les conditions dans lesquelles les opérateurs peuvent obtenir des permissions de voirie pour permettre l'établissement de leurs réseaux de télécommunications ; qu'elles ne font pas obstacle à ce qu'une collectivité institue une redevance pour l'utilisation, par l'ensemble des opérateurs qui en font la demande, des installations déjà existantes dont elle est propriétaire et qui ne sont pas soumises à la redevance pour permission de voirie visée à l'article L. 47 ;

Considérant que la redevance instituée par la délibération contestée a pour objet l'utilisation, par des opérateurs privés de télécommunication, des infrastructures de télécommunication dont la COMMUNE DE TOULOUSE est propriétaire et qui sont affectées à l'usage du service public des télécommunications en vue duquel elles ont été spécialement aménagées ; qu'il n'est pas établi ni d'ailleurs allégué que les installations en cause auraient donné lieu au versement de la redevance prévue à l'article L. 47 du code des postes et des communications électroniques ; que, dès lors, la COMMUNE DE TOULOUSE a pu légalement, par la délibération litigieuse, instaurer une redevance pour l'utilisation desdites infrastructures ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la délibération attaquée aurait été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 47 du code des postes et communications électroniques doit être écarté ;

Considérant que, la redevance en cause étant instituée non pour service rendu mais pour occupation du domaine public, France Télécom ne peut utilement invoquer la méconnaissance des dispositions du code des marchés publics relatives aux modalités de passation des marchés publics ;

Considérant, toutefois, que la délibération contestée du 25 juin 1999 fixe, par son article 2, le 1er janvier 1997 comme date d'effet de la perception de la redevance dont s'agit ; qu'elle présente ainsi une portée rétroactive qui l'entache, dans cette mesure, d'illégalité ; que, eu égard aux termes dans lesquels elle est rédigée, la délibération du 16 décembre 1999 ne peut être regardée comme ayant retiré la portée rétroactive de la délibération du 25 juin 1999 ; que, dès lors, cette dernière est entachée d'illégalité en tant qu'elle a instauré une redevance avant la date de son entrée en vigueur ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE TOULOUSE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Toulouse a annulé la délibération du 25 juin 1999 sauf en ce qui concerne ses dispositions rétroactives ;

Sur l'application de l'article L. 761-1du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la COMMUNE DE TOULOUSE, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à France Télécom la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner France Télécom à verser à la COMMUNE DE TOULOUSE une somme de 1 300 euros sur ce fondement ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Toulouse en date du 27 juin 2002 est annulé en tant qu'il prononce l'annulation de la délibération du conseil municipal de la COMMUNE DE TOULOUSE en date du 25 juin 1999 en tant qu'elle porte sur la période postérieure à son entrée en vigueur.

Article 2 : La demande présentée par la SA France Télécom devant le Tribunal administratif de Toulouse est rejetée en tant qu'elle porte sur la période postérieure à la date d'entrée en vigueur de la délibération du 25 juin 1999.

Article 3 : France Télécom versera à la COMMUNE DE TOULOUSE la somme de 1 300 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête et les conclusions de la SA France Télécom tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

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No 02BX02121


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ere chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 02BX02121
Date de la décision : 09/03/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CHOISSELET
Rapporteur ?: Mme Marianne HARDY
Rapporteur public ?: M. CHEMIN
Avocat(s) : SCP FLINT-SANSON

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2006-03-09;02bx02121 ?
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