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14/03/2006 | FRANCE | N°02BX01439

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2eme chambre (formation a 3), 14 mars 2006, 02BX01439


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour, le 17 juillet 2002, présentée par M.Eric X, demeurant ... ;

M. X demande à la cour :

- d'annuler le jugement du 9 avril 2002 du Tribunal administratif de Toulouse rejetant sa demande tendant à la condamnation de la ville de Toulouse à lui verser une indemnité de 488 292 F en réparation des pertes de rémunération que lui a causées son maintien en disponibilité du 30 mars 1993 au 1er décembre 1998, et une somme de 200 000 F en réparation de son préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence ;

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de condamner la ville de Toulouse à lui verser la somme de 74 439,64 euros en ré...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour, le 17 juillet 2002, présentée par M.Eric X, demeurant ... ;

M. X demande à la cour :

- d'annuler le jugement du 9 avril 2002 du Tribunal administratif de Toulouse rejetant sa demande tendant à la condamnation de la ville de Toulouse à lui verser une indemnité de 488 292 F en réparation des pertes de rémunération que lui a causées son maintien en disponibilité du 30 mars 1993 au 1er décembre 1998, et une somme de 200 000 F en réparation de son préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence ;

- de condamner la ville de Toulouse à lui verser la somme de 74 439,64 euros en réparation des pertes de rémunération, avec intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts, et une somme de 30 489,80 euros au titre de son préjudice moral ;

- de condamner la ville de Toulouse à lui verser une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 février 2006 :

- le rapport de Mme Balzamo, premier conseiller ;

- les observations de Me Sanson du cabinet d'avocats Sanson-Flint pour la ville de Toulouse ;

- et les conclusions de M. Péano, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X fait appel du jugement du 9 avril 2002 du Tribunal administratif de Toulouse rejetant sa demande tendant à la condamnation de la ville de Toulouse à lui verser une indemnité de 488 292 F en réparation des pertes de rémunération que lui a causées son maintien en disponibilité du 30 mars 1993 au 1er décembre 1998, et une somme de 200 000 F en réparation de son préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence ;

Considérant qu'aux termes de l'article 72 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée : « La disponibilité est la position du fonctionnaire qui, placé hors de son administration ou service d'origine, cesse de bénéficier , dans cette position, de ses droits à l'avancement et à la retraite. La disponibilité est prononcée soit à la demande de l'intéressé, soit d'office à l'expiration des congés prévus aux 2°, 3°et 4° de l'article 57. Le fonctionnaire mis en disponibilité qui refuse successivement trois postes qui lui sont proposés dans le ressort territorial de son cadre d'emplois, emploi ou corps, en vue de la réintégration peut être licencié après avis de la commission administrative paritaire. Dans les autres cas, si la durée de la disponibilité n'a pas excédé trois années, une des trois premières vacances dans la collectivité ou l'établissement d'origine doit être proposée au fonctionnaire. » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, éducateur territorial des activités physiques et sportives exerçant les fonctions de maître-nageur titulaire de la ville de Toulouse, a été placé en disponibilité pour convenances personnelles, pour une durée d'un an, par arrêté du 25 septembre 1991 ; que cette disponibilité a été prolongée pour un an, à sa demande, par arrêté du 1er décembre 1992 ; que le 30 mars 1993, M. X a demandé sa réintégration anticipée à la ville de Toulouse ; que la ville a rejeté sa demande au motif qu'aucun poste correspondant à sa demande n'était vacant ; que, ce n'est que par arrêté du 30 octobre 1998 qu'il a été réintégré, à compter du 1er décembre 1998, en qualité d'éducateur territorial des activités physiques et sportives à la direction des sports de la ville ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 10 janvier 1995 portant statut particulier du cadre d'emploi des éducateurs territoriaux des activités physiques et sportives : « Les membres du cadre d'emplois (…) conduisent et coordonnent sur le plan administratif, social, technique, pédagogique et éducatif les activités physiques et sportives de la collectivité ou de l'établissement public, assurent l'encadrement des personnels qui s'y consacrent, veillent à la sécurité du public et surveillent les installations. Ils sont également chargés de l'encadrement des groupes d'enfants et d'adolescents qui pratiquent les activités sportives ou de plein air de la collectivité. Les éducateurs des activités physiques et sportives occupant les fonctions de chef de bassin assurent l'encadrement des activités de natation. Ils veillent à la sécurité du public et à la bonne tenue d'un ou plusieurs bassins. » ; qu'il résulte de ces dispositions, qui se bornent à préciser la mission des éducateurs occupant les fonctions de chefs de bassin, que les éducateurs territoriaux des activités physiques et sportives ont vocation à encadrer l'ensemble des activités physiques et sportives de la collectivité sans qu'il y ait lieu de tenir compte d'une spécialisation ; que, dès lors, M. X est fondé à soutenir que le maire et le tribunal administratif auraient dû prendre en compte l'ensemble des postes d'éducateurs territoriaux d'activités physiques et sportives devenus vacants dès 1993 et figurant sur la liste établie par la ville de Toulouse, pour apprécier les possibilités de le réintégrer avant 1998, et non les seuls postes de maître-nageurs sauveteurs, alors même qu'il avait demandé initialement, le 30 mars 1993, à être réintégré dans un poste de maître-nageur sauveteur ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment de la liste des postes établie par la ville de Toulouse et des explications fournies par cette collectivité, qu'aucun poste d'éducateur sportif n'était vacant de 1993 à 1995 ; qu'en revanche la ville de Toulouse n'apporte aucun élément de nature à établir qu'aucun des trois postes d'éducateurs d'activités physiques et sportives, figurant sur la liste qu'elle produit, qui ont été pourvus pendant l'année 1996 par des contractuels remplaçants, ne pouvait être proposé à M. X ; que, dès lors, celui-ci est fondé à soutenir qu'il aurait dû être réintégré dans un emploi d'éducateur territorial avant 1998 et que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté ses conclusions indemnitaires au motif qu'il ne pouvait se prévaloir d'un préjudice subi du fait de la faute commise par l'administration ;

Considérant qu'en décidant ainsi de maintenir M. X en disponibilité jusqu'en 1998, malgré l'existence de vacances de postes d'éducateur territorial dès le 1er septembre 1996, la ville de Toulouse a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;

Considérant qu'en l'absence de service fait, M. X ne saurait prétendre au paiement de l'intégralité des traitements dont il a été privé, à compter du 1er septembre 1996, du fait de l'absence de réintégration malgré la vacance de postes d'éducateurs territoriaux des activités physiques et sportives ; que le préjudice dont il se prévaut est seulement égal à la différence entre, d'une part la rémunération qu'il aurait perçue de la ville de Toulouse entre le 1er septembre 1996 et le 30 novembre 1998, rémunération prenant en compte le grade et l'échelon dont il aurait dû bénéficier au titre de son ancienneté pour les années 1996 à 1998, à l'exception des éléments de rémunération liés à l'exercice effectif des fonctions, et d'autre part, les revenus de toute nature perçus pendant cette période et qui ne l'auraient pas été si M. X avait été réintégré ; que toutefois l'état du dossier ne permet pas de se prononcer sur le montant des sommes en question ; qu'il y a lieu de renvoyer M. X devant la ville de Toulouse pour qu'il soit procédé à la liquidation des sommes auxquelles il a droit, dans la limite de 74 439,64 euros ; que M. X a droit aux intérêts, au taux légal, sur ces sommes à compter du 11 juin 1999, date de réception de sa demande préalable d'indemnisation par la ville de Toulouse ;

Considérant que pour l'application des dispositions de l'article 1154 du code civil, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond ; que cette demande prend toutefois effet au plus tôt à la date à laquelle elle est enregistrée et pourvu qu'à cette date il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ; qu'en l'espèce, à la suite de la demande de capitalisation des intérêts présentée le 11 juin 1999, il y a lieu de prescrire que les intérêts échus au 11 juin 2000 seront capitalisés à cette date et à chaque échéance annuelle suivante pour produire eux-mêmes intérêt ;

Considérant, enfin, qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice moral et de celui résultant des troubles dans les conditions d'existence, subi par M. X du fait de son maintien illégal en disponibilité en fixant l'indemnité destinée à le réparer à la somme de 4 000 euros ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. X, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à la ville de Toulouse une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner la ville de Toulouse à verser à M. X une somme de 1 300 euros sur le fondement de l'article L. 761 1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Toulouse du 9 avril 2002 est annulé.

Article 2 : La ville de Toulouse est condamnée à verser à M. X une somme de 4 000 euros au titre du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence.

Article 3 : La ville de Toulouse est condamnée à verser à M. X une indemnité égale à la différence entre la rémunération qu'il aurait perçue entre le 1er septembre 1996 et le 30 novembre 1998, prenant en compte le grade et l'échelon dont il aurait dû bénéficier au titre de son ancienneté pour les années 1996 à 1998, à l'exception des éléments de rémunération liés à l'exercice effectif des fonctions, et les revenus de toute nature perçus pendant cette période par M. X. M. X est renvoyé devant la ville de Toulouse pour liquidation, sur les bases ci-dessus définies, de l'indemnité qui lui est due en réparation de son préjudice matériel et dans la limite de la somme de 74 439,64 euros.

Article 4 : L'indemnité déterminée comme il est dit à l'article 3 produira intérêt au taux légal à compter du 11 juin 1999. Les intérêts échus à la date du 11 juin 2000 seront capitalisés à cette date et à chaque échéance annuelle suivante pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : La ville de Toulouse versera à M. X une somme de 1 300 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 02BX01439


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2eme chambre (formation a 3)
Numéro d'arrêt : 02BX01439
Date de la décision : 14/03/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LEPLAT
Rapporteur ?: Mme Evelyne BALZAMO
Rapporteur public ?: M. PEANO
Avocat(s) : SCP BROCARD FAURE XUEREB

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2006-03-14;02bx01439 ?
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