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02/05/2006 | FRANCE | N°03BX00924

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3eme chambre (formation a 3), 02 mai 2006, 03BX00924


Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 28 avril 2003, présentée pour Mme Catherine X, demeurant ..., par MeBreillat ;

Mme X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 19 février 2003 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 30 juillet 2001 par laquelle le directeur général du Centre National d'Enseignement à Distance (CNED) a prononcé son licenciement et à la condamnation du CNED à l'indemnisation du préjudice en résultant ;

2°) d'annuler ladite décisi

on et de condamner le CNED à lui verser l'intégralité des salaires dont elle a été pr...

Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 28 avril 2003, présentée pour Mme Catherine X, demeurant ..., par MeBreillat ;

Mme X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 19 février 2003 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 30 juillet 2001 par laquelle le directeur général du Centre National d'Enseignement à Distance (CNED) a prononcé son licenciement et à la condamnation du CNED à l'indemnisation du préjudice en résultant ;

2°) d'annuler ladite décision et de condamner le CNED à lui verser l'intégralité des salaires dont elle a été privée depuis son licenciement jusqu'au 31 août 2002, la somme de 100 000 euros en réparation de son préjudice moral, la somme de 50 000 euros en réparation de ses troubles dans les conditions d'existence ;

3°) de condamner le CNED à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l 'Etat ;

Vu le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 portant dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l'Etat ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 mars 2006 :

- le rapport de M. Le Gars, premier conseiller,

- les observations de Me Lachaume, représentant le Centre National d'Enseignement à Distance (CNED),

- et les conclusions de Mme Jayat, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par contrat du 25 août 1999, Mme X a été recrutée en qualité de directeur adjoint par le Centre National d'Enseignement à Distance (CNED, pour une durée déterminée de 3 ans, dans le cadre défini par l'article 4 (alinéa 2) de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 et le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ; que le 9 juillet 2001, le directeur général du CNED, estimant que l'attitude de Mme X et les propos tenus par elle au cours d'une soirée organisée par le CNED le 5 juillet 2001, constituaient une faute professionnelle grave, lui a adressé une lettre l'informant de son intention de la licencier et la convoquant à un entretien préalable ; que le 30 juillet 2001, le directeur général du CNED lui a ainsi adressé une lettre lui notifiant son licenciement ; que Mme X interjette régulièrement appel du jugement du tribunal administratif de Poitiers qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et à la condamnation du CNED à l'indemnisation du préjudice en résultant ;

Sur les conclusions en annulation :

Considérant que, pour prononcer par la décision contestée du 30 juillet 2001 le licenciement de Mme X, le directeur général du CNED s'est fondé sur le fait qu'au cours du dîner et de la soirée dansante organisée le 5 juillet précédent pour le 10ème anniversaire de la première émission de télévision de l'établissement public, l'intéressée aurait exprimé « à plusieurs reprises » sa « forte réprobation à l'encontre de la politique choisie par le CNED », dans des termes « violents et infamants à l'égard du CNED et de ses dirigeants », et qu'elle aurait « adopté un comportement indigne de (ses) fonctions » ; qu'en se bornant à produire trois témoignages d'ailleurs établis postérieurement à la date à laquelle Mme X a pu prendre connaissance de son dossier, qui ne font état que de propos tenus « sur un ton de confidence » et de critiques exprimées sur le comportement humain et professionnel de deux responsables du CNED, l'établissement n'établit pas la réalité des « propos violents et infamants » qu'il impute à la requérante ; que l'attitude de l'intéressée ne constitue pas, à elle seule, dans le contexte d'une soirée telle que celle qui a eu lieu le 5 juillet 2001, un comportement de nature à justifier une sanction disciplinaire ; que, dans ces conditions, et alors surtout qu'aucune personne extérieure à l'établissement ne participait à la manifestation dont s'agit, le licenciement « pour faute grave » de Mme X est entaché d'excès de pouvoir ; que, par suite et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de légalité, la requérante est fondée à demander l'annulation de la décision du directeur général du CNED en date du 30 juillet 2001 prononçant son licenciement ;

Sur les conclusions en réparation :

Considérant que la fin de non-recevoir opposée aux conclusions à fin de réparation doit être écartée dès lors que le préjudice est chiffré par référence aux rémunérations que la requérante aurait perçues jusqu'à la fin de son contrat ;

Considérant que la requérante qui, en l'absence de service fait, ne peut prétendre au rappel de son traitement, est fondée à demander la condamnation du CNED à réparer le préjudice qu'elle a réellement subi du fait de son licenciement injustifié ; qu'il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce, en fixant le montant de l'indemnité due de ce chef à Mme X à celui des traitements qu'elle aurait perçus si elle était restée en fonctions entre le 20 novembre 2001 et la date d'échéance normale de son contrat, le 25 août 2002, à l'exclusion des primes ou indemnités liées à l'exercice effectif des fonctions et déduction faite des sommes perçues le cas échéant par l'intéressée au titre de l'indemnité de licenciement ou d'un emploi rétribué durant la période concernée ; qu'en l'absence d'éléments de calcul nécessaires à la fixation de l'indemnité à laquelle elle a droit, il y a lieu de renvoyer l'intéressée devant l'administration pour qu'il soit procédé à la liquidation de cette indemnité ;

Considérant qu'eu égard aux circonstances et aux motifs de ce licenciement, à l'atteinte à la réputation de la requérante et aux répercussions sur son état de santé et ses conditions de vie familiale, il sera fait une juste appréciation du préjudice moral de Mme X en condamnant le CNED à lui verser une indemnité de 10 000 euros, inférieure au montant des ses prétentions présentées devant les premiers juges et, par suite, sans qu'il soit besoin de statuer sur

la fin de non-recevoir partielle des conclusions indemnitaires formulées en appel afférentes à ce chef de préjudice ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que Mme X, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser au Centre National d'Enseignement à Distance (CNED) la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le CNED à verser à Mme X la somme de 1 300 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 19 février 2003 est annulé.

Article 2 : La décision en date du 30 juillet 2001 par laquelle le directeur général du Centre National d'Enseignement à Distance (CNED) a prononcé le licenciement de Mme X est annulée.

Article 3 : Le CNED est condamné à verser à Mme X une indemnité égale aux traitements qu'elle aurait perçus si elle était restée en fonctions entre le 20 novembre 2001 et la date d'échéance normale de son contrat, le 25 août 2002, à l'exclusion des primes ou indemnités liées à l'exercice effectif des fonctions et déduction faite des sommes perçues le cas échéant par l'intéressée au titre de l'indemnité de licenciement ou d'un emploi rétribué durant la période concernée. Mme X est renvoyée devant l'administration pour qu'il soit procédé à la liquidation de cette indemnité.

Article 4 : Le CNED est condamné à payer la somme de 10 000 euros à Mme X en réparation de son préjudice moral.

Article 5 : Le CNED versera à Mme X la somme de 1 300 euros au titre de l'article L. 761 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X et les conclusions du CNED tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

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N° 03BX00924


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3eme chambre (formation a 3)
Numéro d'arrêt : 03BX00924
Date de la décision : 02/05/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. MARROU
Rapporteur ?: M. Julien LE GARS
Rapporteur public ?: Mme JAYAT
Avocat(s) : BREILLAT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2006-05-02;03bx00924 ?
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