Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la Cour les 18 décembre 2002 et 17 février 2003, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE SAINT PAUL, dont le siège est ...Hôpital à Saint Paul Cedex (97866), par Me le Prado ;
Le CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE SAINT PAUL demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 18 juillet 2002, par lequel le Tribunal administratif de Saint-Denis l'a condamné à verser aux consorts X... et à M. B une indemnité en réparation du préjudice moral subi du fait du décès de Laurence X..., le 12 février 1997 ;
2°) de rejeter la demande présentée par les consorts X... et M. B devant le Tribunal administratif de Saint-Denis ;
Vu le jugement attaqué ;
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Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 juin 2006 :
- le rapport de Mme Billet-Ydier, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Péano , commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par un jugement en date du 18 juillet 2002, le Tribunal administratif de Saint-Denis a déclaré le CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE SAINT PAUL responsable des conséquences du suicide de Laurence X... après sa fuite de l'hôpital, le 12 février 1997, alors qu'elle était hospitalisée, après une tentative de suicide, à la demande d'un tiers, depuis le 3 février 1997 ; que le tribunal a condamné le CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE SAINT PAUL à payer, au titre du préjudice moral, une somme de 22 867 euros à Mme Reinette X..., une somme de 12 000 euros à Mlle Karine X... et M. Vincent Lionel X..., une somme de 6 000 euros à M. René X... et M. Y... B ; que le CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE SAINT PAUL relève appel de ce jugement ;
Sur la recevabilité de la requête :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE SAINT PAUL a reçu notification du jugement attaqué le 20 septembre 2002 ; que sa requête, qui est suffisamment motivée, a été adressée par télécopie et confirmée par courrier, enregistrée au greffe de la Cour le 18 décembre 2002, et n'est dès lors pas tardive ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement du tribunal administratif manque en fait ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que Laurence X... a été hospitalisée le 3 février 1997, à la demande de ses parents, au CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE SAINT PAUL, à la suite d'une tentative de suicide ; qu'en raison de son état dépressif, une surveillance stricte a été mise en place, assouplie à compter de l'acceptation des soins par l'intéressée, le 6 février 1997 ; que la circonstance que l'intéressée ait bénéficié d'une permission de fins de semaine chez ses parents et qu'une levée de la mesure d'hospitalisation à la demande d'un tiers ait été envisagée, n'est pas nature à exonérer le CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE SAINT PAUL de sa responsabilité, dès lors que ces mesures n'impliquaient pas que Laurence X..., fût libre de circuler dans les locaux hospitaliers, sans surveillance particulière, et d'en sortir, comme elle l'a fait de sa propre initiative de l'établissement, le 12 février 1997, jour où elle s'est suicidée ;
Considérant qu'eu égard à une précédente tentative de suicide, qui avait motivé son hospitalisation au mois de janvier 1996 dans le même établissement, Laurence aurait dû faire l'objet d'une surveillance spéciale ; que, quelles que soient les méthodes thérapeutiques pratiquées dans le centre dont s'agit, le fait que Laurence ait pu, dans ces circonstances, sortir librement de l'hôpital sans y être autorisée, révèle un mauvais fonctionnement du service, constitutif d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'établissement ;
Sur l'indemnisation :
Considérant que les premiers juges ont fait une juste appréciation du préjudice moral subi par Mme Reinette X..., mère de la victime, Mlle Karine X... et M. Vincent Lionel X..., soeur et frère de la victime ; qu'en revanche, le CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE SAINT PAUL est fondé à soutenir qu'il a été fait une appréciation exagérée du préjudice moral subi par M. Y... B, beau-père de la victime, qui l'avait élevée depuis son plus jeune âge ; qu'il sera fait une juste appréciation de son préjudice moral en l'évaluant à la somme de 3 000 euros ; que M. René X..., oncle de la victime, qui demeure sur le territoire européen de la République, n'allègue pas l'existence de relations privilégiées avec sa nièce ; qu'aucune indemnisation ne peut dès lors lui être allouée ; qu'il résulte de ce qui précède que le CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE SAINT PAUL est fondé à demander que le montant de l'indemnité versée à M. Y... B et M. René X... soit révisé ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. René X... et M. Y... B doivent dès lors être rejetées ; que, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, il n'y a pas lieu de condamner le CENTRE HOSPITALIER DE SAINT-PAUL à verser à Mme Reinette X..., Mlle Karine X... et M. Vincent X... les sommes qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Saint-Denis du 18 juillet 2002 est annulé en tant qu'il a fait droit à la demande d'indemnisation de M. René X....
Article 2 : La demande de M. René X... est rejetée.
Article 3 : La somme que le CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE SAINT PAUL est condamnée à verser à M. Y... B est ramenée à la somme de 3 000 euros et le jugement attaqué est réformé dans cette mesure.
Article 4 : Le surplus des conclusions du CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE SAINT PAUL est rejeté.
Article 5 : Les conclusions des consorts X... et M. Y... B tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N°02BX02643