La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/06/2006 | FRANCE | N°06BX00442

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, Juge des reconduites a la frontiere, 29 juin 2006, 06BX00442


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 1er mars 2006 sous le n° 06BX00442, et le mémoire, enregistré le 13 avril 2006, présentés pour M. Sankoum X, demeurant ..., par la SCP Brottier Zoro ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 3 février 2006 par lequel le magistrat délégué du Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 janvier 2006 par lequel le préfet de la Vienne a décidé sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant le pays de destination de la

reconduite ;

2°) d'annuler cet arrêté et cette décision ;

3°) d'enjoindre au préf...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 1er mars 2006 sous le n° 06BX00442, et le mémoire, enregistré le 13 avril 2006, présentés pour M. Sankoum X, demeurant ..., par la SCP Brottier Zoro ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 3 février 2006 par lequel le magistrat délégué du Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 janvier 2006 par lequel le préfet de la Vienne a décidé sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) d'annuler cet arrêté et cette décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Vienne de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Vienne de lui délivrer un titre de séjour provisoire ainsi qu'à sa famille ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

.......................................................................................................................................…

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code d'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 juin 2006 :

- le rapport de Mme Hardy,

- et les conclusions de M. Chemin, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X, ressortissant sénégalais, interjette appel du jugement, en date du 3 février 2006, par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 janvier 2006 par lequel le préfet de la Vienne a décidé sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ;

Considérant que M. X soutient sans être contredit que, à la date de l'arrêté litigieux, son épouse était sur le point d'accoucher ; que, si celle-ci, ressortissante guinéenne, était elle-même en situation irrégulière et avait fait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière pris à son encontre le 4 mars 2003 par le préfet de la Loire-Atlantique, elle ne pouvait, le 30 janvier 2006, date de l'arrêté litigieux, rejoindre M. X dans son pays d'origine ; qu'il n'est pas davantage contesté que M. X et son épouse ont également à leur charge deux enfants en bas âge ; qu'ainsi la présence en France de M. X auprès de son épouse et de ses enfants était alors nécessaire ; que, par suite, en ordonnant à cette date sa reconduite à la frontière, l'arrêté du préfet de la Vienne en date du 30 janvier 2006 a porté au droit de M. X au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et a donc méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 janvier 2006 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'à la suite d'une annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière, il incombe au préfet, en application des dispositions de l'article L. 512 ;4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, non seulement de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour, mais aussi, qu'il ait été ou non saisi d'une demande en ce sens, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour ; que, dès lors, il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Vienne de délivrer à M. X une autorisation provisoire de séjour et de lui prescrire de se prononcer sur la situation de M. X dans le délai d'un mois suivant la notification de la présente décision ;

Considérant, en revanche, que l'annulation de l'arrêté de reconduite à la frontière pris à l'encontre de M. X n'implique pas nécessairement qu'un titre de séjour provisoire soit délivré aux autres membres de sa famille ; que les conclusions de M. X tendant à ces fins doivent donc être rejetées :

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative :

Considérant que M. X, qui a obtenu l'aide juridictionnelle totale, n'allègue pas avoir exposé d'autres frais que ceux pris en charge par l'Etat ; que, par suite, ses conclusions tendant à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat la somme de 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ne peuvent être accueillies ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Poitiers en date du 3 février 2006 et l'arrêté du préfet de la Vienne en date du 30 janvier 2006 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Vienne de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. X et de se prononcer sur la situation de ce dernier dans le délai d'un mois suivant la notification de la présente décision.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

3

No 06BX00442


Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Marianne HARDY
Rapporteur public ?: M. CHEMIN
Avocat(s) : SCP BROTTIER-ZORO

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : Juge des reconduites a la frontiere
Date de la décision : 29/06/2006
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 06BX00442
Numéro NOR : CETATEXT000007512950 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2006-06-29;06bx00442 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award