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06/07/2006 | FRANCE | N°03BX00071

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3eme chambre (formation a 3), 06 juillet 2006, 03BX00071


Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 13 janvier 2003, présentée pour M. Jean-Pierre X, demeurant ..., par Me Burri ;

M. X demande à la cour :

1) d'annuler l'article 2 du jugement en date du 31 octobre 2002 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1992 et 1993 ;

2) de prononcer la décharge desdites impositions restant en litige ;

3) de condamner l'Etat à lui

verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice admi...

Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 13 janvier 2003, présentée pour M. Jean-Pierre X, demeurant ..., par Me Burri ;

M. X demande à la cour :

1) d'annuler l'article 2 du jugement en date du 31 octobre 2002 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1992 et 1993 ;

2) de prononcer la décharge desdites impositions restant en litige ;

3) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 juin 2006 :

- le rapport de M. Le Gars, premier conseiller,

- les observations de Mme Luchetta représentant le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie,

- et les conclusions de Mme Jayat, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X demande l'annulation de l'article 2 du jugement en date du 31 octobre 2002 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1992 et 1993 ; que les impositions ainsi contestées procèdent des redressements fondés initialement sur la mise en oeuvre de la procédure de répression des abus de droit ayant conduit l'administration à remettre en cause le bénéfice d'une exonération d'imposition d'une plus-value d'apport réalisée en 1992 sur le fondement de l'article 151 septies du code général des impôts ainsi qu'à prendre en compte, dans les revenus imposables de M. X, une quote-part des résultats de la SCEA des Thermes ;

En ce qui concerne la plus-value réalisée en 1992 :

Considérant que le ministre, qui n'abandonne pas le motif précité tiré de l'abus de droit, entend également, dans le dernier état de ses conclusions, fonder les redressements restant en litige concernant la plus-value sur le fait que M. X avait en tout état de cause déclaré des recettes supérieures à 1 000 000 F au titre de l'exercice clos en 1992 et qu'il ne pouvait donc pas bénéficier de l'exonération précitée ;

Considérant qu'aux termes de l'article 151 septies du code général des impôts dans sa rédaction applicable en l'espèce : “Les plus-values réalisées dans le cadre d'une activité agricole… par des contribuables dont les recettes n'excèdent pas le double de la limite du forfait ou de l'évaluation administrative sont exonérées, à condition que l'activité ait été exercée pendant au moins cinq ans…” ; qu'il résulte notamment de ces dispositions que la condition tenant à l'absence de dépassement du double de la limite du forfait ou de l'évaluation administrative s'apprécie en additionnant toutes les recettes réalisées par le contribuable, provenant d'activités imposables dans une même catégorie de revenus et afférentes à l'année de réalisation effective de la plus-value ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, dans sa déclaration de bénéfices agricoles soumis au régime du bénéfice réel normal pour l'exercice correspondant à l'année 1992, M. X, arboriculteur, a produit un compte de résultat faisant apparaître des produits d'exploitation d'un montant de 1 316 969 F dont 1 181 295 F au titre des produits autres que ceux de son exploitation individuelle et correspondant à sa quote-part de bénéfices sur opérations faites en commun ; qu'en prenant en compte l'ensemble des produits d'exploitation déclarés perçus par M. X en 1992, tant en sa qualité d'exploitant individuel qu'au titre de sa participation dans les résultats de la SCEA du Therme PLC, société transparente fiscalement, l'administration s'est bornée à faire une régulière application des seules dispositions de l'article 151 septies du code général des impôts et n'a pas, ce faisant, fait une application anticipée de la modification apportée à l'article 70 du code général des impôts par l'article 14 de la loi n°2000-1352 du 30 décembre 2000 autorisant la prise en compte de la quote-part de recettes brutes des sociétés transparentes pour le calcul du seuil d'exonération de l'article 151 septies précité ; qu'il est constant que le montant de recettes ainsi déterminé et déclaré pour le revenu agricole imposable du contribuable pour la seule année 1992 dépassait la limite du double du forfait telle que prévue par les dispositions précitées de l'article 151 septies du code général des impôts ; que l'administration était, par suite, fondée à refuser à M. X le bénéfice de l'exonération prévue par ce texte ;

En ce qui concerne la requalification des bénéfices de la SARL Demeter :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales : Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses : (...) qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus (...)./ L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. En cas de désaccord sur les redressements notifiés sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité dont les avis rendus feront l'objet d'un rapport annuel. Si l'administration ne s'est pas conformée à l'avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé du redressement ; qu'il résulte de ces dispositions que lorsque l'administration use des pouvoirs que lui confère ce texte dans des conditions telles que la charge de la preuve lui incombe, elle est fondée à écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable dès lors qu'elle établit que ces actes ont un caractère fictif, ou bien, à défaut, n'ont pu être inspirés par aucun motif autre que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées eu égard à sa situation et à ses activités réelles ;

Considérant que M. X a créé le 13 décembre 1989 avec Mlle Y, sa compagne, la S.A.R.L. Demeter dont il détient 94 % des parts sociales ; que le 31 janvier 1990 Mlle Y a créé avec la S.A.R.L. Demeter qui détient 95,24 % des parts sociales, la S.C.E.A. du Therme ; que M. X a donné en location à cette dernière société 62 hectares de terres arboricoles lui appartenant ; qu'il a créé à cette même date, avec la S.C.E.A du Therme et Mlle Y, la S.C.E.A. du Therme P.L.C. ; que M. X et la S.A.R.L. Demeter ont successivement créé en avril 1991, juillet 1991 et juillet 1992, les S.C.I. Résidence du Parc, du Mazet et de Laschamps, sociétés dont il détient la majorité des parts sociales ; que le 1er septembre 1992 M. X a apporté à la S.C.E.A. du Therme, des plantations pour un montant de 3 713 000 F (566 043,20 euros), du matériel d'exploitation pour 973 700 F (148 439,61 euros) et 4 084 parts sociales de la coopérative huilière du Limousin, soit une valeur globale de 4 800 000 F (731 755,28 euros) déduction faite d'un emprunt sur le matériel ; que l'administration a estimé que la SARL Demeter a été constituée dans le seul but de faire échapper la plus-value de l'apport précité du 1er septembre 1992 à l'impôt dû en bénéficiant de l'exonération prévue à l'article 151 septies du code général des impôts, la quote-part des revenus de la SCEA du Therme étant soumise à l'impôt sur les sociétés de la SARL Demeter au lieu de compter parmi les recettes de M. X pour l'appréciation du seuil d'exonération précité ;

Considérant, toutefois, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la plus-value d'apport était en tout état de cause imposable dès lors que, à supposer même que la quote-part des résultats de la SCEA du Therme n'eût pas dû être prise en compte parmi les recettes de M. X au titre de 1992, le montant des recettes du requérant provenant d'activités imposables dans une même catégorie de revenus pour la seule année 1992 dépassait la limite du double du forfait telle que prévue par les dispositions précitées de l'article 151 septies du code général des impôts ; que, par suite, nonosbtant l'absence de déclaration de ladite plus-value, la constitution de la SARL Demeter ne saurait être regardée comme ayant été réalisée pour aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que M. X aurait dû supporter autrement ; que la quote-part des bénéfices de la SCEA du Therme a, par suite, été à tort réintégrée dans les bases de l'impôt sur le revenu de M. X au titre des années 1992 et 1993 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté ses conclusions tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui ont été maintenues à sa charge en tant seulement qu'elles portent sur la prise en compte, dans ses bases imposables, de sa quote-part des bénéfices de la SCEA du Therme au titre des années 1992 et 1993 ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à M. X une somme de 1300 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les bases de l'impôt sur le revenu des années 1992 et 1993 de M. X sont réduites du montant de sa quote-part des bénéfices de la SCEA du Therme.

Article 2 : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui ont été maintenues à la charge de M. X au titre des années 1992 et 1993 sont réduites à concurrence de la réduction des bases mentionnées à l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Limoges en date du 31 octobre 2002 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

Article 5 : L'Etat versera à M. X la somme de 1 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 03BX00071


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3eme chambre (formation a 3)
Numéro d'arrêt : 03BX00071
Date de la décision : 06/07/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. MADEC
Rapporteur ?: M. Julien LE GARS
Rapporteur public ?: Mme JAYAT
Avocat(s) : BURRI

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2006-07-06;03bx00071 ?
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