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18/07/2006 | FRANCE | N°03BX00194

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3eme chambre (formation a 3), 18 juillet 2006, 03BX00194


Vu la requête transmise par télécopie enregistrée au greffe de la cour le 27 janvier 2003, régularisée par courrier le 28 janvier 2003, présentée pour la société anonyme C MAQUINE, ayant son siège social zone industrielle à Tarnos (40220), représentée par son président-directeur général, M. Christian Z..., par Me Bernard X..., avocat ; la société anonyme C MAQUINE demande à la cour :

1)° d'annuler le jugement du 5 décembre 2002 par lequel le tribunal administratif de Pau ne lui a accordé qu'une décharge partielle des compléments d'impôt sur les sociétés et d

es pénalités y afférentes auxquels elle a été assujettie au titre des années 1993...

Vu la requête transmise par télécopie enregistrée au greffe de la cour le 27 janvier 2003, régularisée par courrier le 28 janvier 2003, présentée pour la société anonyme C MAQUINE, ayant son siège social zone industrielle à Tarnos (40220), représentée par son président-directeur général, M. Christian Z..., par Me Bernard X..., avocat ; la société anonyme C MAQUINE demande à la cour :

1)° d'annuler le jugement du 5 décembre 2002 par lequel le tribunal administratif de Pau ne lui a accordé qu'une décharge partielle des compléments d'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes auxquels elle a été assujettie au titre des années 1993 à 1995 ;

2°) de lui accorder la décharge des impositions et pénalités restant en litige ;

……………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 juin 2006 :

- le rapport de M. Marrou, président-rapporteur,

- et les conclusions de Mme Jayat, commissaire du gouvernement ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 30 juin 2006, produite pour la SA C MAQUINE ;

Considérant que la société C MAQUINE, qui a pour objet la fabrication et la commercialisation de litières pour animaux, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices 1993, 1994 et 1995 à l'issue de laquelle l'administration a, notamment, remis en cause les provisions constituées pour risque de non-recouvrement d'avances consenties à ses filiales et pour travaux afférents à l'immeuble en lequel la société a installé ses services administratifs ; qu'elle fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Pau ne lui a accordé qu'une décharge partielle des impositions en résultant ; que par la voie de l'appel incident, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie demande le rétablissement de la société au rôle de l'impôt sur les sociétés à raison des droits et pénalités dont elle a été déchargée ;

Sur la recevabilité de l'appel incident du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie :

Considérant que les conclusions incidentes du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en tant qu'elles visent les compléments d'impôt sur les sociétés afférents à l'année 1994, dont le tribunal administratif a prononcé la décharge totale, soulèvent un litige distinct de celui sur lequel porte l'appel de la SA C MAQUINE et sont, par suite, irrecevables ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 60-3 du livre des procédures fiscales : « L'avis ou la décision de la commission départementale doit être motivé. Il est notifié au contribuable par l'administration des impôts » ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'avis émis le 26 septembre 1997 par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires a été notifié le 28 novembre 1997 au président-directeur général de la société C MAQUINE par l'administration ; que cette notification mentionne les noms du président, des membres et du secrétaire de la commission et reproduit l'intégralité du texte de l'avis émis par la commission ; que, dans ces conditions, et sans que la requérante puisse utilement faire valoir que ladite notification ne lui permettrait pas de s'assurer que l'avis notifié est bien conforme à l'avis émis ni se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la doctrine administrative 13 M 2542 selon laquelle « l'administration notifie l'avis ou la décision dans son intégralité », dès lors qu'elle se rapporte à la procédure d'imposition, le moyen tiré de ce que les impositions ont été mises en recouvrement sans que la contribuable ait reçu notification régulière de l'avis émis par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires doit être écarté ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'aux termes de l'article 39-1 du code général des impôts : « Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment (…) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice… » ;

En ce qui concerne la provision pour risque de non-recouvrement :

Considérant que la société Paul Y... et fils, à laquelle la SA C MAQUINE a succédé en mai 1994, a consenti à partir de 1987 des avances de trésorerie à la Sarl Sofraser et à la SA Christian
Y...
-CMI-, dont M. Christian Y..., son gérant, était également le dirigeant, pour des montants qui devaient s'élever, en 1991, année où elle prend des participations dans ces dernières, respectivement, à 2 147 252 F et 1 883 031 F, pour atteindre, en 1995, 3 049 937 F et 2 480 933 F ; que, dès 1992, elle constitue une provision pour risque de non- recouvrement de ses créances à hauteur de 793 531 F et de 2 152 031 F, montants portés, en 1994, à 2 946 996 F et 2 395 305 F ; qu'en 1995, la société requérante constate une perte sur la créance détenue sur Sofraser et consent à la société CMI un abandon de créance de 1 000 000 F ; que l'administration a considéré que les avances consenties ne pouvaient être regardées comme relevant d'une gestion commerciale normale et a, en conséquence, réintégré les provisions constituées au bilan des exercices vérifiés dans les résultats de l'entreprise ;

Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale ; que le fait de consentir des avances sans intérêts à un tiers ne relève pas, en principe, d'une gestion commerciale normale ; que cette règle doit recevoir application même si le bénéficiaire des avances est une filiale de la société contribuable, hormis le cas où la société mère peut être regardée comme ayant agi dans son propre intérêt en venant en aide à une filiale en difficulté ; que, s'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu'un abandon de créances par une entreprise à un tiers constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié en retour de contreparties ;

Considérant que la SA C MAQUINE, soutient que la réactivation des sociétés Sofraser, en 1983, et CMI, en 1989, s'inscrivait dans le cadre de la restructuration de ses activités, avec pour objectif la réduction des coûts de transport des matières premières et des produits conditionnés grâce, d'une part, à la création d'une division transport pour la première à laquelle elle devait céder ses propres véhicules et, d'autre part, à l'implantation dans la région Rhône Alpes d'un second site de production ; qu'il est constant, cependant, que la société Sofraser, dont l'exploitation s'est avérée très rapidement déficitaire, a dû cesser toute activité et vendre ses véhicules de transport dès 1985 et que la société CMI cessait également son activité dès 1989, la production de litières restant concentrée comme auparavant sur le site principal de Labenne (Landes) ; que, néanmoins, la société Paul Y... et fils prenait, en 1991, une participation de 50 % dans la société Sofraser, elle-même détentrice de 79,60 % des parts de la société CMI, et de 10 % dans le capital de cette dernière, pour, cependant, procéder, en 1995, à la liquidation de la première, après avoir racheté sa participation dans la société CMI ; que les premiers juges ont considéré que si l'existence d'un intérêt commercial n'était pas démontré, la SA C MAQUINE avait néanmoins un intérêt financier à consentir des avances et ont réduit les bases d'imposition à hauteur seulement des avances accordées postérieurement aux prises de participation ;

Considérant que la requérante qui ne peut se prévaloir d'un quelconque intérêt commercial, ne saurait, davantage, prétendre que la prise en charge des besoins de trésorerie de sociétés tierces, aux lieu et place des associés de ces sociétés, serait conforme à ses intérêts propres, en alléguant les circonstances très générales selon lesquelles, ayant exercé le contrôle économique de ces dernières, sa responsabilité aurait pu être mise en jeu dans le cadre d'une action en comblement de passif ; que par suite et en l'absence de toute contrepartie effective, les aides initialement consenties en pure perte relèvent d'une gestion commerciale anormale ;

Considérant, par ailleurs, que la SA C MAQUINE ne démontre pas en quoi la prise de participation dans des sociétés en sommeil, dont le montant n'est pas indiqué, répondait aux nécessités de son développement ni que les avances de fonds consenties postérieurement étaient conformes à son intérêt financier et à la préservation de ses actifs ; que c'est, par suite, à tort que le tribunal administratif de Pau a admis la déductibilité des provisions constituées au titre des exercices vérifiés ;

En ce qui concerne la provision pour travaux :

Considérant que pour l'application des dispositions précitées de l'article 39-1 5° du code général des impôts, seules peuvent être comprises dans les frais généraux pour permettre la constitution d'une provision, les dépenses relatives à des travaux qui concourent à maintenir en état d'usage ou de fonctionnement les différents éléments de l'actif immobilisé de l'entreprise, à l'exclusion de toutes les dépenses qui font entrer de nouveaux éléments dans l'actif, qui entraînent normalement une augmentation de la valeur pour laquelle un élément immobilisé figure au bilan de l'entreprise ou qui ont pour objet de prolonger de manière notable la durée probable d'utilisation d'un élément de cette nature ;

Considérant que la société C MAQUINE a constitué au bilan de l'exercice 1995 une provision d'un montant de 530 000 F en vue de faire face à l'aménagement de ses nouveaux bureaux dans un immeuble, appartenant à la SCI Y..., situé à Tarnos ; que l'administration a refusé la déduction de cette provision au motif que les travaux ne pouvaient être considérés comme de simples travaux d'entretien ou de réparation, mais comme des travaux devant être immobilisés ; qu'il résulte de l'instruction et, notamment, des factures produites par la requérante que les travaux en question concernent, soit la création d'une voirie, la réfection de l'ossature et de la toiture du bâtiment, ainsi que sa redistribution intérieure, la mise aux normes des installations électrique et téléphonique, et ont eu nécessairement pour effet d'accroître la valeur et la durée d'utilisation de l'immeuble, soit, des travaux de peinture et de revêtements intérieurs, indissociables des premiers ; que les travaux litigieux ne sauraient, dès lors, donner lieu à la constitution d'une provision ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société C MAQUINE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau ne lui a accordé qu'une décharge partielle des impositions contestées ; qu'en revanche, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est fondé à soutenir que c'est à tort que, par ledit jugement, le tribunal administratif a décidé que les bases imposables de la société C MAQUINE au titre des exercices clos en 1993 et 1995 seraient réduites respectivement de 235 715,91 € et de 28 747,16 € ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société anonyme C MAQUINE est rejetée.

Article 2 : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, ainsi que les intérêts et pénalités y afférents dont le tribunal administratif de Pau a prononcé la décharge au titre des exercices clos en 1993 et 1995 sont remis à la charge de la société anonyme C MAQUINE.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Pau du 5 décembre 2002 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de l'appel incident du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est rejeté.

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N° 03BX00194


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3eme chambre (formation a 3)
Numéro d'arrêt : 03BX00194
Date de la décision : 18/07/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. MARROU
Rapporteur ?: M. Pierre-Alain MARROU
Rapporteur public ?: Mme JAYAT
Avocat(s) : FRAU

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2006-07-18;03bx00194 ?
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