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23/10/2006 | FRANCE | N°04BX00826

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5eme chambre (formation a 3), 23 octobre 2006, 04BX00826


Vu, enregistrée au greffe de la Cour le 17 mai 2004, la requête présentée par le PREFET DE LA CORREZE ;

Le PREFET DE LA CORREZE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 8 avril 2004 par lequel le Tribunal administratif de Limoges a annulé, à la demande de M. X, son arrêté du 13 septembre 2002 refusant d'abroger l'arrêté du 1er août 1996 du ministre de l'intérieur prononçant son expulsion ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Limoges ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés...

Vu, enregistrée au greffe de la Cour le 17 mai 2004, la requête présentée par le PREFET DE LA CORREZE ;

Le PREFET DE LA CORREZE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 8 avril 2004 par lequel le Tribunal administratif de Limoges a annulé, à la demande de M. X, son arrêté du 13 septembre 2002 refusant d'abroger l'arrêté du 1er août 1996 du ministre de l'intérieur prononçant son expulsion ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Limoges ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifié ;

Vu le décret n° 82-440 du 26 mai 1982, modifié notamment par le décret n° 97-24 du 13 janvier 1997 et le décret n° 2002-814 du 3 mai 2002 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 septembre 2006 :

- le rapport de Mme Viard ;

- et les conclusions de M. Pouzoulet, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'en principe, l'autorité administrative compétente pour modifier, abroger ou retirer un acte administratif est celle qui, à la date de la modification, de l'abrogation ou du retrait, est compétente pour prendre cet acte et, le cas échéant, s'il s'agit d'un acte individuel, son supérieur hiérarchique ;

Considérant que, depuis l'entrée en vigueur du décret du 13 janvier 1997 modifiant l'article 1er du décret du 26 mai 1982 portant application des articles 24 et 33 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, la compétence pour édicter un arrêté d'expulsion sur le fondement de l'article 23 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, devenu l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, suivant la procédure de droit commun, n'est plus exercée par le ministre de l'intérieur mais, dans les départements, par le préfet et, à Paris, par le préfet de Police ;

Considérant qu'il suit de là que le changement des règles de compétence relatives aux décisions d'expulsion résultant de ces dispositions implique, nonobstant les termes de l'article 3 du décret du 26 mai 1982 d'après lesquels « l'arrêté d'expulsion peut à tout moment être abrogé par l'autorité qui l'a prononcé », que l'abrogation d'un arrêté d'expulsion pris suivant la procédure de droit commun relève désormais de la compétence de l'autorité préfectorale, alors même que l'arrêté dont l'abrogation est sollicitée a été pris par le ministre de l'intérieur conformément aux règles applicables avant l'entrée en vigueur du décret du 13 janvier 1997 ; que, dans un tel cas, l'examen de la demande tendant à l'abrogation d'un arrêté d'expulsion pris par le ministre de l'intérieur suivant la procédure de droit commun relève du préfet qui a été chargé par le ministre de veiller à l'exécution de cet arrêté ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité marocaine, a fait l'objet le 1er août 1996 d'un arrêté du ministre de l'intérieur ordonnant son expulsion du territoire français, suivant la procédure de droit commun, sur proposition du PREFET DE LA CORREZE ; que le préfet de police et les préfets ont été chargés de l'exécution de cet arrêté ; que, par suite, le PREFET DE LA CORREZE était compétent pour rejeter, par la décision contestée du 13 septembre 2002, la demande de M. X tendant à l'abrogation de l'arrêté d'expulsion du 1er août 1996 ; qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le Tribunal administratif de Limoges s'est fondé sur l'incompétence du PREFET DE LA CORREZE pour annuler cette décision du 13 septembre 2002 ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le Tribunal administratif de Limoges ;

Considérant qu'aux termes de l'article 23 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, alors applicable : « Sous réserve des dispositions de l'article 25, l'expulsion peut être prononcée si la présence sur le territoire français d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public. L'arrêté d'expulsion peut à tout moment être abrogé. Lorsque la demande d'abrogation est présentée à l'expiration d'un délai de cinq ans à compter de l'exécution effective de l'arrêté d'expulsion, elle ne peut être rejetée qu'après avis de la commission prévue à l'article 24, devant laquelle l'intéressé peut se faire représenter » ;

Considérant que M. Alain Bucquet, secrétaire général de la préfecture de Corrèze, qui a signé la décision refusant d'abroger l'arrêté d'expulsion dont M. X avait fait l'objet, bénéficiait d'une délégation de signature du PREFET DE LA CORREZE, en date du 22 juillet 2002, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs du 1er août 2002, à l'effet notamment de signer les arrêtés d'expulsion ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que M. Alain Bucquet n'aurait pas été compétent pour signer la décision contestée doit être écarté ;

Considérant qu'en se fondant, pour refuser d'abroger l'arrêté d'expulsion dont M. X avait fait l'objet, sur la nature de la condamnation qui est à l'origine de cette mesure d'expulsion et sur les renseignements recueillis sur le comportement de l'intéressé, le PREFET DE LA CORREZE a suffisamment motivé sa décision ;

Considérant que, par un arrêt du 30 novembre 1993, la Cour d'appel de Montpellier a condamné M. X à six ans d'emprisonnement pour importation, détention, cession et usage de stupéfiants au cours des années 1990 et 1991 ; que, si M. X fait valoir que les faits sont anciens, et que, depuis son « sevrage », il ne présenterait plus de menace à l'ordre public, et se prévaut de ce que, depuis son expulsion au Maroc, il n'a commis aucun fait délictueux, il ne ressort pas des pièces du dossier que le PREFET DE LA CORREZE ait commis une erreur d'appréciation en estimant, conformément d'ailleurs à l'avis émis par la commission départementale d'expulsion, qu'eu égard à la gravité des faits commis par l'intéressé, et en l'absence de toute preuve de réinsertion professionnelle, la présence de ce dernier sur le territoire français constituait toujours une menace grave pour l'ordre public, et en refusant, en conséquence, d'abroger l'arrêté d'expulsion ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, après avoir épousé le 23 mai 1990 une ressortissante française dont il a divorcé le 20 novembre 2000, s'est marié le 27 février 2001 avec une ressortissante marocaine installée en France depuis douze ans dont il a eu trois enfants, lesquels sont nés en France respectivement en 1991, 1994 et 2001 et y ont toujours vécu ; que, toutefois, il ressort aussi des pièces du dossier qu'il n'est arrivé en France qu'à l'âge de trente et un ans, en 1987, et que, depuis son expulsion en 1996, il ne subvient pas aux besoins de ses enfants ; que, dans ces conditions, et, eu égard à la gravité des faits qui sont à l'origine de son expulsion, le préfet n'a pas, en refusant d'abroger l'arrêté d'expulsion pris le 1er août 1996, porté une atteinte disproportionnée au droit de M. X au respect de sa vie privée et familiale protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA CORREZE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Limoges a annulé sa décision du 13 septembre 2002 rejetant la demande de M. X tendant à l'abrogation de l'arrêté d'expulsion du 1er août 1996 ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Limoges du 8 avril 2004 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Limoges est rejetée.

3

No 04BX00826


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5eme chambre (formation a 3)
Numéro d'arrêt : 04BX00826
Date de la décision : 23/10/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DE MALAFOSSE
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre VIARD
Rapporteur public ?: M. POUZOULET

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2006-10-23;04bx00826 ?
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