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10/07/2007 | FRANCE | N°05BX01097

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre (formation à 3), 10 juillet 2007, 05BX01097


Vu la requête, enregistrée le 3 juin 2005au greffe de la cour sous le n° 05BX01097, présentée pour M. Jacques X, demeurant ..., par Me Pielberg ;

Il demande à la cour :

- d'annuler le jugement du 22 juillet 2004 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 280 704,38 euros en réparation du préjudice qu'il a subi à raison de l'émeute intervenue les 12 et 13 novembre 1987 à la maison centrale de Saint-Maur où il était concessionnaire d'un contrat de main-d'oeuvre pénale ; >
- de condamner l'Etat à lui verser ladite indemnité ;

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Vu la requête, enregistrée le 3 juin 2005au greffe de la cour sous le n° 05BX01097, présentée pour M. Jacques X, demeurant ..., par Me Pielberg ;

Il demande à la cour :

- d'annuler le jugement du 22 juillet 2004 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 280 704,38 euros en réparation du préjudice qu'il a subi à raison de l'émeute intervenue les 12 et 13 novembre 1987 à la maison centrale de Saint-Maur où il était concessionnaire d'un contrat de main-d'oeuvre pénale ;

- de condamner l'Etat à lui verser ladite indemnité ;

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Vu l'ensemble des pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement convoquées à l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 juin 2007 :

- le rapport de Mme Fabien, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Jayat, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X, qui était concessionnaire de main-d'oeuvre pénale à la maison centrale de Saint-Maur en vertu d'une convention conclue avec l'administration pénitentiaire le 26 juin 1986, fait appel du jugement en date du 22 juillet 2004 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à l'indemniser des pertes en matériel, pièces fabriquées et matières premières et des pertes d'exploitation qu'il a subies par suite de la mutinerie des détenus ayant eu lieu les 12 et 13 novembre 1987 et au cours de laquelle des ateliers de travail ont été incendiés ;

Sur la fin de non-recevoir de la requête opposée par le ministre de la justice :

Considérant que M. X a présenté le 23 septembre 2004 une demande d'aide juridictionnelle en vue de faire appel du jugement attaqué qui lui a été notifié le 10 août 2004 ; que cette demande, intervenue avant l'expiration du délai d'appel de deux mois à l'encontre de ce jugement, a eu pour effet de proroger ledit délai jusqu'à la notification de la décision du bureau d'aide juridictionnelle, intervenue le 12 avril 2005 soit moins de deux mois avant l'enregistrement de la requête au greffe de la cour ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par le ministre de la justice et tirée de la tardiveté de la requête doit être écartée ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X a saisi le 22 janvier 2002 le ministre de la justice, soit avant que ce dernier n'oppose en première instance la fin de non-recevoir tirée du défaut de liaison du contentieux, d'une demande indemnitaire préalable ayant fait l'objet, à l'expiration d'un délai de deux mois, d'une décision implicite de rejet à l'encontre de laquelle l'intéressé a précisé diriger ses conclusions ; qu'en conséquence, ladite fin de non-recevoir ne peut être accueillie ;

Sur le fond :

Considérant que si l'administration s'est prévalu, par un mémoire enregistré le 7 mars 2002 au tribunal administratif de Limoges, de la prescription quadriennale de la créance de M. X, elle n'a pas justifié d'une délégation donnant compétence au signataire de ce mémoire pour opposer l'exception de prescription quadriennale ; que, par suite, celle-ci ne peut en tout état de cause être retenue ;

Considérant qu'aux termes de l'article 92 de la loi du 7 janvier 1983, devenu l'article L 2216-3 du code général des collectivités territoriales : « L'Etat est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis, à force ouverte ou par violence, par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre les personnes, soit contre les biens » ;

Considérant que , contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, la qualité de cocontractant de l'administration de M. X à l'époque des faits litigieux ne fait pas obstacle à la recevabilité de son action tendant à l'engagement de la responsabilité sans faute de l'Etat sur le fondement des dispositions précitées de l'article L 2216-3 du code général des collectivités territoriales ; que, par suite, le requérant est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté comme étant irrecevable sa demande tendant à la condamnation de l'Etat sur ce seul fondement ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Limoges ;

Considérant que les dispositions précitées de l'article L 2216-3 du code général des collectivités territoriales ne distinguent pas entre les causes de la formation de l'attroupement ou du rassemblement et n'énoncent par ailleurs aucune restriction quant à la nature des dommages indemnisables ; qu'il résulte de l'instruction que l'émeute des détenus au sein de la maison centrale de Saint-Maur les 12 et 13 novembre 1987 a revêtu le caractère d'un mouvement général, spontané et violent au cours duquel ont notamment été incendiés les ateliers de travail ; que les pertes en matériel et d'exploitation résultant pour M. X de l'incendie de l'atelier dans lequel il exerçait son activité revêtent ainsi le caractère de dommages résultant de crimes ou délits commis à force ouverte ou par violence par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés ; que, par suite, la responsabilité sans faute de l'Etat se trouve engagée à raison de ces dommages ;

Considérant que les seules pièces produites par M. X ne permettent pas d'établir que les pertes en matériel, pièces fabriquées et matières premières et les pertes d'exploitation qu'il a subies à la suite de l'incendie de son atelier de travail seraient supérieures au montant de 168 000 F retenu par le rapport de l'expert désigné par l'administration pénitentiaire en 1987 ainsi que par le ministre de la justice lui ayant proposé une indemnité le 15 février 1990 ; que, par suite, l'indemnité mise à la charge de l'Etat doit être fixée à 25 611,43 euros ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le jugement attaqué doit être annulé et que l'Etat doit être condamné à verser une indemnité de 25 611,43 euros à M. X ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Limoges en date du 22 juillet 2004 est annulé.

Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. X une indemnité d'un montant de 25 611,43 euros.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Limoges est rejeté.

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N° 05BX01097


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 05BX01097
Date de la décision : 10/07/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DUDEZERT
Rapporteur ?: Mme Mathilde FABIEN
Rapporteur public ?: Mme JAYAT
Avocat(s) : SCP PIELBERG-BUTRUILLE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2007-07-10;05bx01097 ?
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