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06/11/2007 | FRANCE | N°07BX01277

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, Juge des reconduites à la frontière, 06 novembre 2007, 07BX01277


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 19 juin 2007 sous le numéro 07BX01277, et le mémoire, enregistré au greffe de la Cour le 22 octobre 2007, présentés pour Mme Petcharat X, de nationalité thaïlandaise, demeurant au centre de rétention de Cornebarieu (31700), par Me Laspalles, avocat ;

Mme X demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du 30 mai 2007 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Aude du 26 mai 2007 décidant sa reconduite à

la frontière et des décisions du même jour fixant la Thaïlande comme pays d...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 19 juin 2007 sous le numéro 07BX01277, et le mémoire, enregistré au greffe de la Cour le 22 octobre 2007, présentés pour Mme Petcharat X, de nationalité thaïlandaise, demeurant au centre de rétention de Cornebarieu (31700), par Me Laspalles, avocat ;

Mme X demande à la Cour : 1°) d'annuler le jugement du 30 mai 2007 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Aude du 26 mai 2007 décidant sa reconduite à la frontière et des décisions du même jour fixant la Thaïlande comme pays de destination et ordonnant son placement en rétention administrative ; 2°) d'annuler les décisions du 26 mai 2007 susmentionnées ; 3°) d'enjoindre au préfet de l'Aude de lui délivrer un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale » sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir ; 4°) d'enjoindre au préfet de l'Aude d'examiner sa situation sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir ; 5°) de condamner l'Etat à lui payer une somme de 1.500 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, et ce entre les mains de son conseil ;

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Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir, au cours de l'audience publique du 23 octobre 2007, présenté son rapport et entendu les conclusions de Mme Viard, commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme X, de nationalité thaïlandaise, demande l'annulation du jugement du 30 mai 2007 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Aude du 26 mai 2007 décidant sa reconduite à la frontière et des décisions du même jour fixant la Thaïlande comme pays de destination et ordonnant son placement en rétention administrative ;

Sur la légalité des décisions critiquées :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article L.511-1 II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (…) » ; qu'il est constant que Mme X est entrée irrégulièrement sur le territoire national et qu'elle n'a pas sollicité son admission au séjour ; qu'elle se trouvait ainsi dans la situation où, en vertu des dispositions précitées, le préfet peut légalement décider de reconduire un étranger à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : « Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale » ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant que Mme X a vécu en concubinage avec une personne de nationalité française et que de cette union est né, le 3 avril 2003, un enfant ; que si le couple s'est séparé et si, depuis cette séparation, l'enfant vit exclusivement au domicile de son père, compte tenu notamment de ce que Mme X, qui ne dispose pas de ressources financières stables, ne peut subvenir à ses besoins matériels, il ressort des pièces du dossier que l'appelante a conservé des relations intenses avec son fils, auquel elle rend régulièrement visite, et participe ainsi à son éducation ; que, dans ces conditions, l'exécution de la mesure de reconduite à la frontière aurait pour effet soit de priver l'enfant de Mme XXX est fondée à soutenir que l'arrêté du 26 mai 2007 a été pris en méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant et doit, par suite, être annulé ; que l'illégalité dont est entachée cette mesure entraîne, par voie de conséquence, celle de la décision fixant le pays de destination et celle de l'arrêté de placement en rétention du même jour ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Aude du 26 mai 2007 décidant sa reconduite à la frontière et des décisions du même jour fixant la Thaïlande comme pays de destination et ordonnant son placement en rétention administrative ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé » ; qu'en vertu de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au titre V du présent livre et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas » ;

Considérant qu'à la suite de l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière, il incombe au préfet, en application des dispositions précitées de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, non seulement de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour mais aussi, qu'il ait été ou non saisi d'une demande en ce sens, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour ; que, dès lors, il appartient au juge administratif, lorsqu'il prononce l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière et qu'il est saisi de conclusions en ce sens, d'user des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 911-2 du code de justice administrative pour fixer le délai dans lequel la situation de l'intéressé doit être réexaminée au vu de l'ensemble de la situation de droit et de fait existant à la date de ce réexamen ;

Considérant que l'annulation de l'arrêté du 26 mai 2007 implique nécessairement que le préfet de l'Aude, après avoir délivré une autorisation provisoire de séjour à Mme X, se prononce à nouveau sur sa situation dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a toutefois pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que Mme X a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761 ;1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Laspalles, avocat de Mme X, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'État, qui est dans la présente instance la partie perdante, la somme de 1.000 euros au profit de Me Laspalles au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement rendu le 30 mai 2007 par le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Toulouse, l'arrêté du préfet de l'Aude du 26 mai 2007 décidant la reconduite à la frontière de Mme X, ensemble les décisions du même jour fixant la Thaïlande comme pays de destination et ordonnant son placement en rétention administrative, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Aude, après avoir délivré une autorisation provisoire de séjour à Mme X, de se prononcer à nouveau sur sa situation dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1.000 euros à Me Laspalles, avocat de Mme X, en application des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761 ;1 du code de justice administrative, sous réserve que Me Laspalles renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

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07BX01277


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : Juge des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 07BX01277
Date de la décision : 06/11/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Hervé VERGUET
Rapporteur public ?: Mme VIARD
Avocat(s) : LASPALLES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2007-11-06;07bx01277 ?
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